Concernant l’absence de données fiables sur le secteur du transport public particulier de personnes, la commission avait initialement supprimé l’article 2 autorisant l’autorité administrative à imposer aux acteurs du secteur la transmission périodique de données. Le rapporteur proposera un amendement de compromis, auquel je suis favorable, visant à récréer un dispositif d’échange de données respectueux des droits et libertés fondamentaux.
S’agissant du statut LOTI, l’article 4 traite de l’enjeu principal de cette proposition de loi : l’éviction d’un secteur entier du transport public de personnes dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants. Cette proposition est la conséquence d’une promesse hâtive faite par le Premier ministre lors des manifestations violentes des taxis.
Rappelons que les LOTI, tirant leur nom de la loi d’orientation des transports intérieurs, avaient été expressément autorisés à concurrencer les taxis dans la loi Thévenoud.
La proposition de loi vise à interdire, à partir du 1er juillet 2017, la fourniture de services occasionnels régis par la loi LOTI avec des véhicules de moins de 10 places dans les périmètres soumis à l’obligation de réaliser un plan de déplacement urbain, c’est-à-dire dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants. Une période transitoire d’un an est prévue pour permettre aux entreprises proposant ces services de se convertir en exploitants de taxis ou de VTC.
Nos collègues députés ont maintenu le 1er juillet 2018 comme date limite pour permettre aux chauffeurs LOTI d’effectuer leur changement de statut vers celui de VTC.
Notre commission avait initialement avancé au 1er janvier 2017 le début de la période transitoire, date à laquelle le rapporteur propose de ne plus faire référence. Il me semble indispensable de ne pas faire peser sur les acteurs les contraintes inhérentes aux changements politiques susceptibles d’intervenir en 2017.
Pour ma part, je suis favorable à ce que la période de transition débute dans les 12 mois, avec application pleine de la mesure sous 24 mois : 2017 étant une année d’élections, le Gouvernement ne sera pas en mesure de prendre des actes réglementaires permettant une transition correcte entre les statuts LOTI et VTC. Précisons que des milliers d’entreprises et de chauffeurs seront victimes des changements d’organisation et de l’incapacité des préfectures et des CMA, les chambres des métiers et de l’artisanat, à juguler l’afflux de candidats.
Sur le fond, je vous avoue, je me résous difficilement à mettre 10 000 personnes au chômage. Je conçois que le statut actuel prévu par la loi Thévenoud ne soit pas parfait. Néanmoins, il permet aux VTC d’être salariés. En l’état actuel du droit, je pense que le statu quo aurait mieux valu que la suppression.
En revanche, un vrai statut de VTC salarié aurait été opportun. Le texte passe à côté d’une réglementation qui aurait, pour le coup, été très utile. Le secteur des VTC souffrant de la paupérisation, tout comme celui des taxis, il aurait été bienvenu de traiter de la lutte contre la précarisation et le dumping social dans ce texte. Les salariés VTC et taxis sont insuffisamment protégés et aspirent à plus d’indépendance, à plus de liberté et à des salaires plus élevés.
Enfin, la formation, plus précisément l’examen de passage pour devenir chauffeur de VTC, fait débat. L’augmentation rapide du nombre de chauffeurs VTC inquiète, certes, les taxis, mais diminuer la fréquence des examens, alors que les demandes d’entrée dans le marché ne cessent d’augmenter, constituerait une restriction de l’accès à cette profession, ce qui ne serait pas acceptable.
Nous devons admettre que confier l’organisation des examens aux chambres de métiers et de l’artisanat, traditionnellement proches des taxis, est également de nature à inquiéter les VTC.
Autre source d’inquiétude : le durcissement de l’examen ne va pas dans le sens du développement des VTC. Je serai favorable à la mise en place d’un tronc commun de formation entre taxis et VTC si et seulement si les conditions d’accès à cet examen ne sont pas trop restrictives et que le cadre juridique est prochainement stabilisé.
La commission a fait le choix de supprimer l’article 6, qui confie aux CMA l’organisation de l’examen. Le rapporteur n’est pas opposé à cette mesure, mais il considère que ce transfert peut se faire par la voie réglementaire. D’ailleurs, mes chers collègues, je vous informe que c’est déjà le cas. Le Sénat n’a pas encore voté la mesure que le Gouvernement a déjà entrepris ce transfert !
J’ai ainsi sous les yeux le compte rendu d’une réunion qui s’est tenue le 25 octobre dernier en préfecture du Rhône, et qui avait pour ordre du jour la communication aux acteurs du secteur la future organisation de l’examen VTC par les CMA, sous le format d’un tronc commun VTC-taxis. La simple lecture de ce document et l’état d’avancement du dispositif montrent le peu d’intérêt que porte le ministère aux travaux du Parlement…
Sur le fond, l’article 5 doit être clairement aménagé par le législateur, sous peine de bloquer littéralement l’entrée dans la profession de VTC. En début d’année, l’État n’a pas été en mesure d’organiser l’examen pendant trois mois, empêchant ainsi les 2 000 candidats mensuels d’entrer sur le marché.
Je proposerai par voie d’amendement, lors de la discussion des articles, de border et de simplifier l’action réglementaire, en précisant que l’examen sera uniquement théorique et non pratique et qu’il sera régulier et accessible. Il devra par ailleurs être organisé par les centres que le Gouvernement a expressément agréés en début d’année, le modèle existant n’ayant fait l’objet d’aucune contestation jusqu’à présent.
Monsieur le secrétaire d’État, la création d’une épreuve pratique va tripler le coût de l’examen et en complexifier sensiblement l’accès. À raison d’une heure par candidat en région parisienne, nous craignons un véritable contingentement administratif. En effet, nous doutons que les CMA soient en mesure de recruter et de former des dizaines d’agents en ce sens pour le 1er janvier 2017.
Je rappelle enfin que nombre de chauffeurs de VTC sont des citoyens peu ou pas diplômés, n’ayant pas eu l’opportunité d’avoir accès à une formation qualifiante. L’examen ayant permis à plusieurs milliers d’entre eux de sortir du chômage, il a servi d’ascenseur social. La proposition de loi risque de casser cet élan. Nous devons faire en sorte de l’améliorer et de la rééquilibrer.
J’en profite pour féliciter M. le rapporteur, Jean-François Rapin, de son travail et pour le remercier des nombreux échanges que nous avons pu avoir sur ce texte. Mon groupe suivra sa position, mais, à titre personnel, je me réserve de voter différemment en fonction des débats.
Rappelons que le transport public particulier de personnes est l’un des secteurs les plus innovants, en plein essor en France comme dans le monde entier.