Je suis solidaire de mon groupe, comme il l’a été quand j’étais chef de file sur des textes difficiles qui ont été débattus ici au Sénat.
Je voudrais dire mes motivations, qui ne sont pas tout à fait les mêmes que celles qui viennent d’être exposées.
Cette loi, telle qu’elle sort des travaux du Sénat et telle qu’elle sera sans doute votée in fine, présente un gros défaut à mes yeux : il s’agit d’un texte de circonstance, qui ne règle absolument rien pour l’avenir. En fait – et la majorité sénatoriale s’entend finalement assez bien avec le Gouvernement sur ce point – la loi arbitre entre deux capacités de nuisance. Et ceux qui l’emportent sont ceux qui ont une capacité de nuisance plus forte, parce qu’ils sont plus anciens et mieux organisés. Elle ne prépare absolument pas l’avenir, car elle met des barrières qui ne tiendront pas.
On a beaucoup parlé des plateformes. Je voudrais quand même rappeler qu’elles ne sont pas toutes américaines. Il y a beaucoup de petites plateformes françaises. Et cette loi a un caractère antiéconomique. En effet, si les VTC se sont développés, certes de façon anarchique, il n’en demeure pas moins que l’arrivée de ces nouveaux acteurs correspond à un besoin, qui dépasse l’Île-de-France. Ces phénomènes, toutes les grandes agglomérations les connaissent, avec des spécificités. Outre que ce texte est contre le consommateur, il apporte peu de reconnaissance à un secteur qui crée des emplois. Et je croyais que l’emploi était la lutte n° 1 du Gouvernement, dont je suis solidaire par ailleurs !
Pour terminer, je voudrais m’adresser à M. le secrétaire d'État et, au-delà de lui, aux uns et aux autres, pour leur demander s’ils ont mesuré la portée sociale de cette affaire. En effet, cette loi est et sera ressentie comme un outil de ségrégation sociale. Avez-vous remarqué le statut de tous ceux qui sont partants pour cette aventure, qu’ils soient indépendants ou salariés ?
Lors de la discussion de la loi Travail, nous avons évoqué ce problème des plateformes. Mme la ministre a eu le courage de défendre, face à la majorité sénatoriale – et je l’ai soutenue – le fait que ceux qui travaillaient pour un seul donneur d’ordre n’étaient ni des indépendants ni des salariés et qu’il fallait travailler pour leur reconnaissance. En effet, là où je vous rejoins, c’est sur le fait que, quelle que soit la formule développée, ces travailleurs ne doivent pas être exploités. Mais la loi ne règle absolument pas le problème de l’exploitation de ces travailleurs.