L’adoption des amendements n° 70, 112 et 145 rectifié, qui portent sur le même sujet, aurait pour conséquence de mettre sur le même plan le supérieur hiérarchique et les instances représentatives du personnel. Je ne crois pas que cette absence de hiérarchie du signalement soit appropriée.
En outre, quelle serait la compétence de l’instance représentative du personnel pour traiter de l’alerte ou attester de la véracité d’un signalement ? A-t-elle une immunité pour violer des secrets protégés par la loi ? Certainement pas !
La procédure de signalement doit permettre une sélection, un tri entre les signalements utiles et les dénonciations abusives ou infondées. Le supérieur hiérarchique, puis l’autorité judiciaire, par exemple, me semblent des acteurs plus appropriés à cette procédure.
La procédure de signalement retenue par la commission des lois, qui a très légèrement modifié la procédure retenue par l’Assemblée nationale, n’empêche en rien la personne de se confier aux délégués du personnel en cas de danger grave et imminent. Elle n’enlève rien au droit existant, qui se justifie pleinement en raison des compétences des instances représentatives du personnel en droit du travail.
C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
L’amendement n° 122 rectifié relatif à la saisine immédiate du Défenseur des droits en cas de mise en cause des employeurs est contraire à la position de la commission.
J’ai peur qu’il y ait un malentendu. Aucune saisine du Défenseur des droits n’est prévue dans le dispositif de signalement de l’alerte, même dans le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale. Le Défenseur des droits l’a assez répété en audition et de façon publique : il ne se considère pas comme une agence de traitement des alertes. Seules l’autorité judiciaire et certaines autorités administratives peuvent enquêter, vérifier et traiter un signalement.
Dès lors, on ne peut envisager une saisine immédiate du Défenseur des droits, puisque le texte de la commission ne prévoit pas l’intervention de ce dernier.
Sur le fond, le paragraphe I bis A de l'article 6 C prévoit d’ores et déjà la possibilité d’éviter une dénonciation auprès de l’employeur.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Quant aux amendements identiques n° 111 et 154 rectifié, il s’agit là encore d’un malentendu, aucune saisine du Défenseur des droits n’étant prévue dans le dispositif du signalement d’alerte. La commission y est donc défavorable, pour les mêmes raisons.
Elle émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 115. Comme je l’ai indiqué ce matin, être lanceur d’alerte correspond non pas à un statut, une récompense, un trophée, mais à une protection. Il s’agit non seulement de protéger les lanceurs d’alerte contre les discriminations dont ils pourraient faire l’objet de la part de leur employeur, mais également de leur garantir une protection pénale eu égard aux secrets professionnels qu’ils auraient pu ou pourraient violer.
Or une personne qui révèle à l’autorité judiciaire ou administrative des faits n’étant pas couverts par le secret professionnel puisqu’elle n’en a pas pris connaissance dans le cadre d’une relation de travail n’a pas besoin de suivre la procédure de signalement. Elle ne risque rien sur le plan pénal. Comme tout citoyen, elle peut écrire au procureur de la République et porter ces faits à sa connaissance.
La loi doit être normative et protéger ceux qui ont besoin de protection. Il n’y a pas lieu en l’occurrence de « normer » la procédure de signalement des citoyens témoignant d’un fait. Il faut protéger ceux qui commettent un délit, qui violent le secret professionnel pour de bonnes raisons, définies limitativement par la loi.
Pour les mêmes motifs que précédemment, la commission est défavorable à l’amendement n° 147 rectifié, qui vise à associer les organisations syndicales représentatives du personnel au dispositif de signalement.
Au risque de me répéter, de quelle compétence une organisation syndicale dispose-t-elle pour traiter une alerte ou attester de la véracité d’un signalement ? Elle n’a pas d’immunité pour violer les secrets protégés par la loi.