Cet amendement porte cette fois sur l’adjectif « authentique ».
En matière d’évitement des atteintes à l’environnement et à la santé, on distingue habituellement la prévention – il s’agit d’éviter un danger avéré et ses effets reconnus par les instances officielles – et la précaution, qui suppose, face à un faisceau vraisemblable et convergent de risques probables, d’engager des compléments de recherche et de mettre en place des mesures transitoires d’évitement.
Le terme « authentique » inscrit dans le texte renvoie uniquement à des certitudes sans que soient mises en perspective les instances légitimes qui donnent acte de ces certitudes. Qu’est-ce que l’authenticité, la vérité ? Caricaturalement, le ministre de la santé considère que le tabac est dangereux, tandis que British American Tobacco, qui organisait voilà encore quelques années des déjeuners au Sénat, affirme le contraire. Selon Philipp Morris, le taux des cancers dus au tabac n’est pas authentique. À qui dois-je faire confiance ?
Dans le dossier de l’amiante, à partir de quand peut-on considérer que l’information était « authentique » ? De 1994, quand la Cour de cassation a parlé du danger des poussières ? De 1970, à la suite des alertes des salariés d’Amissol ou de Ferodo-Valeo ? De 1972, année où, lors du congrès qu’elle a tenu à Lyon, l’OMS, l’Organisation mondiale de la santé, a fait le lien entre amiante et cancer ? De 1977, date du décret réglementant l’amiante au travail, ou de 1997, année où cette fibre a été interdite ?
Quelle information était « authentique » en 1996 : le rapport de l’INSERM, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, commandé par Jacques Barrot, qui concluait à la dangerosité de l’amiante, ou celui d’Étienne Fournier de l’Académie de médecine, qui en minimisait les risques ?
Monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je vous conseille d’éviter de vous engager sur le terrain très glissant de l’authenticité en matière de risques et de dangers sanitaires.