Intervention de François Pillet

Réunion du 3 novembre 2016 à 15h00
Transparence lutte contre la corruption et modernisation de la vie économique – orientation et protection des lanceurs d'alerte — Article 13

Photo de François PilletFrançois Pillet, rapporteur :

Je voudrais, en quelques mots, présenter la position constante de la commission au sujet de l’article 13 du présent projet de loi, relatif au répertoire des représentants d’intérêts. L’idée initiale, à laquelle correspondait le texte déposé par le Gouvernement, était de rendre transparentes les relations entre décideurs publics et représentants d’intérêts pour l’élaboration des lois et règlements. Le texte de l’Assemblée nationale s’en est considérablement éloigné : qui trop embrasse, mal étreint !

Ce travail pouvait s’appuyer sur l’expérience antérieure des bureaux des deux assemblées qui ont fixé, dès 2009, des règles relatives aux relations entre les parlementaires et les représentants d’intérêts. Il n’y a donc aucun retard à combler, si ce n’est à l’échelon du pouvoir exécutif où aucune règle n’existe, ce à quoi le Gouvernement a voulu, à juste titre, mettre fin en proposant l’article 13.

Sur le principe, cet article convenait parfaitement au Sénat dans sa rédaction initiale. Il est d’autant plus logique que, rappelons-le, la phase parlementaire de l’élaboration de la loi est tout à fait transparente : les textes déposés et adoptés, les amendements, les rapports, les débats sont tous publiés et consultables sur internet. Chaque rapporteur indique les personnes qu’il a entendues et celles dont il a reçu des contributions écrites. Bref, alors que le Parlement offre le plus de garanties au citoyen pour connaître qui est intervenu sur l’élaboration de la norme, l’Assemblée nationale a focalisé ces efforts sur l’institution parlementaire, opérant des reculs sur d’autres. Je pense, par exemple, aux sections administratives du Conseil d’État qui ont été retirées en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale sans que celle-ci explique ce choix mystérieux !

La réforme voulue par les députés est purement « optique » s’agissant des assemblées, puisque ces dernières disposent déjà de leurs propres règles qui, je le souligne, diffèrent. Sur ce point, sous l’empire de la réglementation actuelle, le Sénat est plus exigeant puisque nos collègues questeurs s’assurent qu’un groupe d’intérêts est réellement un représentant d’intérêts avant de l’inscrire sur le registre sénatorial, alors que, à l’Assemblée nationale, cette inscription est de droit. Avec la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, nul ne sait ce qu’il en sera à l’avenir, puisque le texte est muet sur les conditions pour examiner les demandes. Faut-il en conclure que c’est la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique qui statuera pour le compte du Gouvernement et du Parlement ?

En outre, le choix de la majorité de l’Assemblée nationale est trompeur : il donne l’impression de conforter la Haute Autorité en lui confiant toujours plus de missions, mais, ce faisant, il la fait crouler sous une charge de travail irréaliste. Les députés ont ajouté pêle-mêle dans le champ de ce répertoire : les élus locaux, leurs collaborateurs et les hauts fonctionnaires. Le président Nadal l’a dit devant notre commission : un tel périmètre est sans équivalent à l’étranger et il est insoutenable pour la Haute Autorité.

Toutefois, sur la proposition de son rapporteur, l’Assemblée nationale a marqué des ouvertures en nouvelle lecture par rapport aux observations du Sénat – je veux les saluer –, qu’il s’agisse des garanties procédurales accordées aux représentants d’intérêts, ou encore de la suppression du pouvoir de sanction de la Haute Autorité au profit de sanctions pénales prononcées par l’autorité judiciaire. J’ai donc proposé à la commission, en nouvelle lecture, de conserver les modifications qui n’appelaient pas d’objection de principe de notre part.

En revanche, la commission est revenue sur plusieurs points qui soulèvent des difficultés d’ordre constitutionnel. En lecture définitive, nos collègues députés pourront y remédier en reprenant nos amendements. J’ai longuement développé dans mon rapport les griefs constitutionnels qui peuvent être adressés au texte. L’examen des amendements nous permettra de les évoquer plus précisément. Si les députés ne se rangent pas à nos arguments constitutionnels, je ne doute pas que le Conseil constitutionnel sera alors appelé à en connaître.

J’invite également nos collègues députés à prendre connaissance des expériences étrangères dans ce domaine et à effectuer des comparaisons.

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