Monsieur le sénateur, la consommation d'alcool et de cannabis par les jeunes, sur laquelle vous m'interrogez, est un sujet qui me tient tout particulièrement à coeur.
Globalement, et il n'est pas inutile de le rappeler, la consommation de boissons alcoolisées est en baisse en France, et ce même parmi les jeunes de moins de vingt-cinq ans.
Pour autant, cette situation est loin d'être satisfaisante, puisque 9 % à 10 % des jeunes Français âgés de dix-huit ans à vingt-cinq ans présentent les signes d'une consommation problématique d'alcool. De plus, et vous l'avez très bien souligné, les ivresses alcooliques sont en hausse parmi les plus jeunes.
S'agissant du cannabis, la tendance à la consommation est maintenant à la stagnation, voire à une légère baisse, après une augmentation entre 2000 et 2002. En revanche, le niveau de l'usage régulier est stable et on constate que la part des usages quotidiens s'est accrue.
Ces tendances ont été confirmées par l'Académie nationale de médecine pour la consommation d'alcool, puis, récemment, par l'Académie nationale de pharmacie pour la consommation de cannabis.
Afin de lutter contre de tels phénomènes, des consultations mises en place en 2004 à destination des jeunes consommateurs de cannabis s'ouvriront aux jeunes en difficulté avec l'alcool, en particulier à ceux qui sont confrontés à des problématiques d'ivresse massive.
Ces consultations se dérouleront dans les centres de soins d'accompagnement et de prévention en addictologie, les CSAPA, structures issues de la fusion entre les centres de cure ambulatoire en alcoologie et les centres spécialisés de soins aux toxicomanes depuis la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 et un décret du 14 mai 2007, qui en définit les missions.
Cessant d'être centrés sur un produit et traitant l'ensemble des addictions, les CSAPA se révéleront particulièrement adaptés à la prise en charge des polyconsommations, associant drogues licites et illicites.
Cette amélioration de la prise en charge comprendra également l'offre de soins hospitalière, qui sera réorganisée, en particulier avec la création de services et de pôles d'addictologie spécifiques. En outre, la formation des professionnels sera renforcée, notamment par la création d'une filière addictologie au cours de la formation médicale.
Par ailleurs, l'articulation entre le secteur sanitaire et le système judicaire est importante. La loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance réorganise le système des injonctions thérapeutiques, qui peut désormais être mobilisé à tous les stades de la procédure pénale.
Améliorer la prise en charge globale des jeunes est nécessaire, mais pas suffisant. Diminuer l'accessibilité au produit est également indispensable.
La législation relative à la vente d'alcool aux mineurs de plus de seize ans est complexe et obsolète. Si ces derniers ont interdiction de consommer des alcools forts, c'est-à-dire les boissons des troisième, quatrième et cinquième groupes, dans les bars, ils peuvent les acheter en toute légalité dans les grandes surfaces et les épiceries. Inversement, ils peuvent consommer de la bière ou du vin dans les bars ou les cafés. Or nous savons que les ivresses massives des jeunes sont surtout liées à l'achat de boissons alcoolisées dans les grandes surfaces.
Il convient également, et vous l'avez souligné, de réfléchir aux nouveaux modes d'alcoolisation - je pense notamment au phénomène que l'on appelle le « binge drinking » - et de s'interroger sur les campagnes de prévention et d'information du public, qui sont plus centrées sur des consommations d'alcool de convivialité. Avant, ces pratiques étaient la norme ; aujourd'hui, nous assistons à des changements sociétaux. Parfois, l'objectif est non plus simplement de boire dans une ambiance festive, mais bien de s'alcooliser massivement pour obtenir une sorte de « shoot » qui amène très rapidement à l'ivresse.
Aussi, face à de tels changements du mode de consommation et à ce qui demeure un véritable problème de santé publique, je présenterai très prochainement un certain nombre de mesures destinées à mieux protéger notre jeunesse contre le phénomène des alcoolisations massives.
Le moment venu, la représentation nationale, donc la Haute Assemblée, sera amenée à se prononcer sur cet important sujet.