Merci pour votre accueil. Je suis venu devant vous le 18 mai lors de ma nomination : votre vote favorable m'honore et m'oblige.
Cela fait cinq mois, aujourd'hui même, que j'ai pris la tête de l'AFD. J'ai fait repartir la maison pour qu'elle tienne les engagements fixés pour 2016. Je suis très attentif au dialogue social, au siège à Paris mais aussi dans le réseau. J'ai rencontré tous les agents des agences locales lors du voyage que j'ai effectué il y a quelques jours en Afrique avec quelques sénateurs et sénatrices autour du Premier ministre.
J'ai également adressé des messages à tous les partenaires de l'Agence, dont bien sûr ceux d'Afrique. J'ai déjà fait sept déplacements, notamment au Tchad et au Ghana. Je suis aussi allé dans les autres régions d'intervention de l'AFD : en Tunisie, au Vietnam, en Colombie, en Équateur, à La Réunion... Je me suis également rendu à Rome, à Francfort, à Bruxelles, à Luxembourg, car l'Europe du développement est en train de se construire. Bien sûr, je rencontre tous les partenaires de l'AFD en France. J'ai commencé un tour des régions : je me suis ainsi rendu à Lille et à Roubaix pour rencontrer les acteurs de la politique du développement au niveau territorial et aussi pour engager le débat avec ceux qui sont moins convaincus de l'utilité de cette politique. J'irai bientôt dans la région Grand-Est. J'ai été à l'université d'été du Medef ; je rencontre les ONG et nous travaillons activement avec la Caisse des dépôts pour renforcer l'ancrage territorial de notre Agence.
Dans les prochaines semaines, nous vivrons trois moments importants : le vote des lois de finances de cet automne, le comité interministériel à la coopération internationale et au développement (CICID), qui se tiendra sans doute fin novembre ou début décembre. Enfin, nous fêterons le 75e anniversaire de l'AFD créée à Londres en décembre 1941. Nous nous retrouverons au musée du Quai Branly le 6 décembre : nous présenterons l'Agence et les axes de son nouveau projet. Pierre-René Lemas et moi-même signerons alors la convention entre nos deux établissements publics, convention que le Sénat a appelé de ses voeux lors du vote d'un amendement dans la loi Sapin II.
J'en viens au budget : nous devons avoir les moyens d'atteindre les objectifs fixés par le Président de la République. Le projet de loi de finances rectificative prévoit la recapitalisation de l'AFD, soit 2,4 milliards de fonds propres supplémentaires par transformation du stock de prêts du Trésor qui se trouvent au passif de notre bilan. Cela nous permettra de réaliser les 4 milliards d'engagements annuels supplémentaires d'ici à 2020. Le projet de loi de finances pour 2017, qui vous viendra de l'Assemblée, devrait favoriser la politique de développement. Le projet de loi initial est satisfaisant, prévoyant une augmentation de 80 millions des crédits de bonification sur le programme 110 et de 100 millions de ressources à conditions spéciales sur le programme 153, afin de proposer des prêts dans les pays les moins avancés. En outre, le projet de loi de finances double les autorisations d'engagement pour l'outre-mer : nous les utiliserons en faveur du rayonnement régional de nos territoires ultramarins. Les montants en subventions ont cristallisé les débats à l'Assemblée nationale. Dans le texte initial, une augmentation de 30 millions était prévue pour les moyens en dons confiés à l'AFD au sein du programme 209. Le débat lors de la première partie de la loi de finances a entraîné une augmentation de 270 millions, soit un total de 300 millions. Si vous confirmez ce vote, ce sera plus qu'un doublement de nos moyens sur le programme 209. N'ayez aucun doute : nous serons capables d'utiliser ces moyens supplémentaires. Dans le passé, l'AFD a géré des enveloppes en dons supérieures à 300 millions. Nous avions trouvé les emplois utiles dans les zones les plus fragiles. De plus, la décrue des crédits bilatéraux nous a poussés à aller chercher des délégations de crédits européens à Bruxelles : cette année, nous obtiendrons certainement plus de 400 millions, soit plus que la contribution de la France au budget du Fonds européen de développement (FED). Ainsi, dans le projet en faveur du lac Tchad, la France a financé 5 millions, tandis que le budget européen versait 30 millions. Ce projet a été valorisé par le Président de la République au sommet d'Abuja. Si le Parlement nous confie 300 millions supplémentaires, nous pourrons intervenir dans les pays fragiles que vous avez évoqués dans plusieurs de vos rapports. Notre priorité portera sur les secteurs sociaux, notamment sur l'éducation qui a beaucoup souffert ces dernières années, surtout au Sahel. Les dossiers relatifs à la gouvernance devraient atteindre, à terme, près de 10 % des engagements de l'Agence. Bien sûr, je défends ces montants additionnels. L'affectation de la TTF est également très positive pour l'AFD : la sanctuarisation de la ressource en dons nous est précieuse.
J'en viens à la stratégie que nous allons mettre en oeuvre. La priorité africaine sera réaffirmée, notamment en direction des pays les plus pauvres et des zones en crise. Nous porterons une grande attention aux sujets migratoires : l'Afrique doit être regardée comme un tout. Considérer le Sahara comme une frontière conduit à ne pas examiner un certain nombre de phénomènes. Le Sahara est une mer et non pas une frontière. Enfin, l'Afrique doit aussi être considérée comme une opportunité, avec les énergies renouvelables - voyez l'initiative de Jean-Louis Borloo - et le financement des non-souverains au-delà des États.
Le deuxième axe de notre projet stratégique portera sur la France : elle doit se projeter dans les pays prioritaires mais aussi s'approprier les expériences, les intentions et les aspirations de ses partenaires du sud. Le partenariat avec la Caisse des dépôts que nous signerons le 6 décembre sanctionnera cette stratégie : les discussions sont denses et fluides. La direction générale de la Caisse des dépôts et toutes les équipes que nous avons réunies la semaine dernière en séminaire sont conscientes des enjeux : nous allons bâtir en commençant par les projets et les équipes. L'ambition initiale de la mission de préfiguration est nullement réduite.