Je vais vous présenter les programmes 203 « Infrastructures et services de transports » et 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture » de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ». Je vous présenterai également les crédits du compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ».
Comme les années précédentes, je regrette que le budget des infrastructures et services de transports ne bénéficie pas d'une mission à part entière, alors qu'il s'agit d'un enjeu financier et socio-économique considérable pour notre pays. J'ajoute que tant d'un point de vue administratif que parlementaire, la politique publique des transports est bien distincte de la politique publique en faveur de l'écologie.
Plus profondément, je crains que cette faible visibilité budgétaire de la politique des transports et le rang de secrétaire d'État attribué au membre du Gouvernement qui en a la charge, ne traduise l'affaiblissement d'une politique dont notre pays s'est pourtant longtemps enorgueilli et qui reste stratégique pour notre avenir.
Le programme 203 ne présente qu'une partie des dépenses consacrées aux transports en raison du rôle majeur joué par l'Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF) dans le financement des grandes infrastructures.
Établissement public administratif de l'État créé en 2004 et placé sous la tutelle de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), l'AFITF est financée par des taxes qui lui sont affectées par l'État (redevance domaniale des sociétés d'autoroutes, taxe d'aménagement du territoire, une partie des amendes des radars automatiques et une fraction du produit de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques - TICPE).
L'AFITF reverse ensuite une partie de son budget sous forme de fonds de concours, en ayant préalablement fléché les sommes ainsi reversées vers des projets précis (routes, ferroviaires, fluvial, etc.). Ainsi qu'elle le reconnaît elle-même, l'AFITF est un opérateur transparent, dont les décisions engagent l'État.
Or, contrairement aux crédits budgétaires, les fonds de concours ne sont qu'évaluatifs et le Parlement ne dispose pas du budget initial de l'AFITF au moment où il examine le projet de loi de finances.
Si je ne plaide pas pour une suppression de l'Agence de financement des infrastructures de France (AFITF), qui est un lieu utile de débats et de sanctuarisation des crédits, je réclame donc une nouvelle fois que le budget prévisionnel de l'AFITF soit systématiquement transmis au Parlement avant l'examen de la loi de finances, voeu qui est aussi celui des autres membres du groupe de travail sur le financement des infrastructures de transport, selon le rapport d'information que nous vous avons présenté au mois de septembre.
C'est là la condition sine qua non pour que le Parlement puisse se prononcer de façon éclairée sur le montant effectivement consacré par l'État au financement des infrastructures de transport.
J'en viens à présent à l'analyse de la situation financière de l'AFITF.
Depuis sa création, l'AFITF a engagé 33 milliards d'euros. Fin 2015, il lui restait à mandater une somme d'environ 11,3 milliards d'euros, soit un montant correspondant à un peu moins de six exercices au regard de son budget actuel. Son équilibre financier apparaît pour le moins instable.
Selon les premiers éléments fournis par le Gouvernement, l'AFITF pourrait disposer, en crédits de paiement, de 2,2 milliards d'euros en 2017, contre 1,9 milliard d'euros en 2016, soit une augmentation de 16 % de ses moyens.
Une telle hausse demeure en réalité très insuffisante pour couvrir l'ensemble des besoins en crédits de paiement de l'AFITF en 2017, qui sont évalués par l'agence elle-même à 2,8 milliards d'euros, soit 600 millions d'euros supplémentaires. D'autant que la hausse des besoins se poursuivra dans les années à venir pour atteindre 3,2 milliards d'euros en 2018 et 3,1 milliards d'euros en 2019.
Plus problématique encore, l'évaluation faite par le Gouvernement pour les ressources de l'AFITF en 2017 serait, selon l'agence, pour le moins optimiste et, plus probablement, surévaluée d'environ 100 millions d'euros.
S'il « suffit » d'affecter 20 millions d'euros supplémentaires pour atteindre un volume de 735 millions d'euros de TICPE attribués à l'AFITF, comme le Gouvernement s'y engage dans le projet de performances pour 2017, et si l'augmentation de 0,9 % des recettes de taxe d'aménagement du territoire paraît envisageable, les prévisions de recette pour la taxe domaniale et sur les amendes radars, en forte hausse par rapport aux exercices précédents, paraissent manquer de sincérité.
C'est pourquoi j'estime qu'il sera nécessaire d'affecter à l'AFITF en 2017 une part plus importante du rehaussement de la TICPE qui avait été décidé en 2015 pour compenser l'abandon de l'écotaxe poids lourds.
S'agissant du programme 203 proprement dit, les crédits sont en légère diminution de 1,3 %.
Sur les 3,2 milliards d'euros du programme, l'essentiel de la dépense est constitué par la subvention versée à SNCF Réseau (ex-Réseau ferré de France), d'un montant de 2,5 milliards d'euros. L'entretien routier et la subvention à l'établissement public Voies navigables de France (VNF) resteront stables par rapport à 2016.
Pour les différentes raisons que j'ai mentionnées précédemment - absence de mission propre aux transports, illisibilité du budget qui leur est consacré, insuffisante couverture des besoins en crédits de paiement de l'AFITF et insincérité de ses prévisions de taxes affectées pour 2017 - je vous proposerai de ne pas adopter les crédits de la mission « Écologie ».
Quant au programme 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture », sa dotation en 2017 s'établit à 203,4 millions d'euros en autorisations d'engagements (AE) et 200 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse significative de 9,4 %.
Cette augmentation des crédits du programme s'explique uniquement par l'extension des allègements de charges patronales du transport maritime commercial relatifs aux cotisations famille et chômage décidée dans le cadre de la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue. L'action 03 « Flotte de commerce » porte ainsi désormais 83,5 millions d'euros de crédits, en hausse de 19 millions d'euros par rapport à 2016.
En revanche, les crédits consacrés aux missions régaliennes de sécurité et de sûreté en mer et à la formation des marins resteront stables.
Enfin, le compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » porte les crédits destinés à financer les trains d'équilibre du territoire (TET), c'est-à-dire une trentaine de lignes structurellement déficitaires dont l'exploitation est assurée par SNCF Mobilités sous l'autorité de l'État.
Historiquement, la SNCF assurait une péréquation interne entre ses TGV, excédentaires, et les TET, déficitaires.
Depuis 2010, l'État affecte des taxes au présent compte d'affectation spéciale afin de compenser le déficit d'exploitation de SNCF Mobilités dû aux TET ainsi que la régénération du matériel roulant.
Le déficit d'exploitation de ces lignes s'est aggravé ces dernières années, la fréquentation des TET ayant diminué de 20 % depuis 2011, notamment en raison de l'essor du covoiturage puis du transport par autocar. Pour tenir compte de cette réalité, les crédits du CAS atteindront 358 millions d'euros en 2016, soit une hausse significative de 6,9 % par rapport à 2016.
À la suite des travaux de la commission « TET d'avenir », le Gouvernement a décidé de cesser progressivement de financer six lignes de nuit entre le 1er octobre 2016 et le 1er octobre 2017, seules les lignes Paris-Briançon et Paris-Rodez-Latour de Carol restant en activité en tant que lignes d'aménagement du territoire.
D'autre part, il a signé un accord avec la région Normandie le 25 avril 2016 aux termes duquel la région a accepté de devenir autorité organisatrice des cinq lignes TET qui la desservent et d'en supporter les déficits, à compter du 1er janvier 2020 au plus tard, en contrepartie d'un financement de l'État de 720 millions d'euros pour renouveler le matériel roulant, largement vétuste, des lignes Paris-Caen-Cherbourg et Paris-Rouen-Le Havre.
Des discussions se poursuivent avec les autres régions pour mettre au point des accords analogues à celui conclu entre l'État et la Normandie concernant des lignes d'intérêt local pour lesquelles des synergies avec les lignes TER sont pertinentes.
Enfin, le Gouvernement s'est également engagé à acquérir d'ici 2025 des rames neuves adaptées aux besoins des voyageurs sur les lignes structurantes Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, Paris-Clermont-Ferrand et Bordeaux-Toulouse-Marseille, pour un montant d'environ un milliard d'euros.
S'agissant de ce compte d'affectation spéciale en pleine évolution, je vous propose que nous adoptions les crédits.