Intervention de Jean-Yves Le Drian

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 12 octobre 2016 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2017 — Audition de M. Jean-Yves Le drian ministre de la défense

Jean-Yves Le Drian, ministre :

Même devant vous, je ne saurais m'étendre sur l'action des forces spéciales... Je dirai simplement que, en Libye, nos hommes sont décédés dans l'exercice de leur mission, en particulier de renseignement. Quant au drone qui a blessé deux de nos soldats au Kurdistan, il s'agit d'un drone commercial, rustique, non armé mais adapté et bourré d'explosifs, une nouvelle sorte d'engin explosif improvisé.

Madame Perol-Dumont, merci de vos propos. La vente des douze sous-marins à l'Australie crée une relation de longue durée entre nos deux pays, car le contrat porte à la fois sur leur vente et leur entretien, mais elle témoigne plus largement d'un état d'esprit très positif des Australiens à notre égard et d'une confiance réciproque exceptionnelle. Je suis favorable à l'invitation du ministre australien de la défense à la prochaine université de la défense. Nos relations sont excellentes aussi bien avec le gouvernement fédéral qu'avec Adelaïde, capitale de l'Australie méridionale qui accueillera le chantier, et qui se trouve être la ville d'origine du Premier ministre.

La méthode polonaise n'est pas acceptable. Je me suis rendu en Pologne quatorze fois pour discuter stratégie et politique de défense avec mon homologue de l'époque, Tomasz Siemoniak, et le président de la République de Pologne, qui manifestaient alors une très forte volonté de rapprochement avec la France - et l'Allemagne. Le contrat en cause ici a été signé en septembre 2015 après une très longue négociation, et l'entreprise Airbus accordait des avantages exceptionnels à la Pologne, tels que la construction d'une usine spécifique ou l'entrée de la Pologne dans le capital du Groupe... Il a finalement été rompu très brutalement, et assez cyniquement, trois jours avant le déplacement du Président de la République à Varsovie, alors qu'il aurait dû donner lieu à la vente officielle de vingt et un hélicoptères pour les forces spéciales polonaises... Tout cela est assez spectaculaire, rappelle de mauvais souvenirs, et nous conduira à adopter une attitude assez ferme vis-à-vis de ce Gouvernement polonais. La décision est, dit-on, très politique... Je n'en suis pas moins mécontent, et une procédure judiciaire sera lancée. Bref, l'affaire n'est pas close.

Les associations professionnelles nationales militaires (APNM) représentatives d'au moins trois des quatre forces armées et de deux formations rattachées pourront participer au dialogue interne au niveau national et siéger au Conseil supérieur de la fonction militaire, où 16 sièges sur 61 leur sont réservés. Nous comptons pour l'heure une dizaine d'APNM dont aucune n'est reconnue représentative en ce sens : le mouvement n'est donc pas spectaculaire, mais il est enclenché.

Sur la retenue à la source, nous serons très vigilants, en raison des primes versées aux militaires. Le calendrier initialement prévu pour le déploiement de Source Solde est pour l'instant respecté. À une première phrase de vérification succédera une phase en double pilotage, après quoi la Marine nationale sera la première à utiliser le nouveau dispositif, en décembre 2017. Vu l'ampleur du désastre du système précédent, il vaut la peine de prendre le temps... Je m'enquiers régulièrement de la situation des victimes de Louvois et de la réparation des dégâts qu'il a causés. Nous restons très vigilants, et essayons de rendre opérationnel le dispositif qui sera légué à mon successeur.

S'agissant de l'entretien programmé du matériel (EPM), nous avons augmenté le niveau de l'entretien programmé du matériel de l'armée de terre à chaque budget depuis 2013, et de manière significative l'année dernière en raison de leur engagement important en opération. Ce niveau sera maintenu sans diminution en 2016-2017.

Nous avons inscrit dans le budget des crédits et les effectifs supplémentaires nécessaires au soutien à l'exportation : 24 millions d'euros ont été débloqués en 2016, ainsi que 400 équivalents temps-plein, dont 97 créés en 2016 pour remplir de nouvelles missions de soutien à l'export. Certes, cela entraîne des contraintes pour les armées, de l'air en particulier - l'accélération de la livraison des premiers Rafale à l'Égypte n'a pas été sans heurts -, mais les moyens d'assurer cette mission sont désormais acquis.

Monsieur de Legge, le remplacement des véhicules de l'avant blindé a été accéléré par le lancement du programme Scorpion. Nous avons certes amélioré la capacité de résistance des véhicules de retour d'opération extérieure, mais l'ampleur de ces opérations rendait nécessaire une telle accélération.

Sur les 250 millions d'euros de ressources exceptionnelles provenant de produits de cessions, 50 millions seulement sont liés à la vente de matériel usagé. Ces objectifs de cessions intègrent les perspectives de vente du site du Val-de-Grâce. Enfin, la baisse des autorisations d'engagement est normale : c'est le niveau de crédits de paiement qui importe ici.

Monsieur Bockel, l'Estonie est notre partenaire privilégié dans la cyberdéfense, je souhaite resserrer nos liens ; je regarderai de plus près le point que vous soulevez.

Monsieur Gautier, la deuxième tranche de rénovation des Mirage 2000 D, qui sera lancée en 2018, portera bien le nombre total d'appareils rénovés à 55. Nous ferons ensuite la jonction avec la fin de la quatrième tranche et ce qui sera sans doute la cinquième tranche du programme Rafale. Les objectifs de la loi de programmation militaire et du Livre blanc sur le modèle d'armée à l'horizon 2025 seront respectés - d'autant plus aisément grâce à nos succès à l'exportation.

S'agissant du combat aérien du futur, notre collaboration avec les Britanniques sur la préparation du démonstrateur du drone de combat de nouvelle génération progresse bien, et n'a aucune raison de s'arrêter - j'ai d'ailleurs vu mon homologue à plusieurs reprises depuis le Brexit. Inscrire l'aviation de chasse pilotée dans l'action préparatoire ? Pourquoi pas, c'est un vrai sujet, mais attendons. L'élaboration de l'action préparatoire est en bonne voie, mais les montants sont faibles : 25 millions d'euros. On peut désormais, en effet, obtenir des crédits européens en matière de défense ; cela nous a pris trois ans de travail, pour 25 millions d'euros...

Il faudra ensuite militer en faveur d'une consolidation plus poussée des futures orientations budgétaires de l'Union européenne. C'est ainsi que l'on pourrait parvenir à pousser un tel projet.

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