Certes, quelques derniers points restent à régler pour boucler une partie du financement du projet, dont le coût global est estimé à 1, 4 milliard d’euros.
Par voie d’amendement à l’Assemblée nationale, le Gouvernement a introduit un article additionnel visant à autoriser SNCF Réseau à déroger à la règle d’or qui s’impose à lui depuis 2014, pour lui permettre de participer en fonds propres au financement de l’infrastructure, à hauteur de 100 millions à 300 millions d’euros.
Il ne s’agit pas là, à proprement parler, d’une aggravation de la dette, dans la mesure où seront mobilisés des fonds propres pour contribuer à la création d’un actif, dont l’équilibre financier sera assuré d’une part par les recettes des gestionnaires de l’exploitation, d’autre part par une redevance complémentaire. Le niveau de risque est donc réduit.
À l’inverse, l’absence de cet article imposerait que l’État compense à SNCF Réseau sa participation aux fonds propres de la société en 2017. Cela remettrait en cause le principe selon lequel « l’État ne participe pas financièrement à l’opération ». La déclaration d’utilité publique s’en trouverait juridiquement affaiblie. Dès lors, c’est l’ensemble du projet qui serait en péril.
En réalité, ce projet traîne depuis 2006, tout le monde en convient. Nous ne pouvons donc plus attendre pour engager sa mise en œuvre. C’est pourquoi j’appelle la majorité sénatoriale, qui a supprimé l’article 1er bis en commission, à amender son opposition, qui confine à l’obstruction au projet, pour autoriser le rétablissement du dispositif proposé par le Gouvernement.
Monsieur le secrétaire d’État, en tant que rapporteur pour avis, depuis deux ans, de la mission « Transports aériens » du projet de loi de finances, je souhaite par ailleurs vous interroger sur un autre volet du financement du projet. Bien qu’il ne soit pas, à proprement parler, traité dans le présent texte, il en est indissociable, et nous devons profiter de cette occasion pour l’aborder.
Il est actuellement envisagé de taxer à hauteur de 1 euro par passager les compagnies aériennes opérant des vols au départ de l’aéroport Charles-de-Gaulle, ce dès 2017, afin de dégager une recette d’environ 40 millions d’euros par an.
Vous venez d’annoncer que cette participation financière ne serait instaurée qu’en 2023. C’est là un point positif. Toutefois, nos compagnies aériennes sont aujourd’hui confrontées à un environnement de concurrence féroce en termes de coûts. Retenir une telle solution de financement entrerait en contradiction avec l’intention manifestée par le Gouvernement de soutenir un secteur économique dont les acteurs français sont confrontés à un déficit de compétitivité qui hypothèque leur avenir.
À cet égard, je rejoins mon collègue député Bruno Le Roux, qui écrivait, en 2014, dans son rapport relatif à la compétitivité du transport aérien, que « le pavillon français profite très peu de la croissance du trafic aérien, et voit ses parts de marché diminuer. L’acquittement d’un grand nombre de taxes spécifiques et l’instabilité des réglementations qui s’appliquent à nos compagnies aériennes font partie des maux qui les affaiblissent. »
Par conséquent, la stabilisation et la simplification des réglementations, ainsi que l’amélioration de l’environnement fiscal, dans un contexte européen qui, en la matière, attend encore d’être harmonisé, sont des objectifs que nous devons continuer à viser. Or la création d’une taxe sur les passagers pour contribuer au financement du CDG Express n’irait pas dans ce sens. Les voies d’une autre répartition de la taxe, mobilisant davantage les ressources d’ADP, peuvent être explorées. Dans le même esprit, une solution alternative pourrait consister à réaffecter au projet CDG Express le surplus de recettes de la taxe de solidarité, aujourd’hui soumise à un plafond de 210 millions d’euros, au-delà duquel son produit est reversé au budget général. Le reversement a été de l’ordre de 12 millions d’euros en 2015, de 20 millions d’euros en 2016 : cet excédent pourrait être affecté au financement du CDG Express.
De même – je rejoins là encore les recommandations du rapport Le Roux –, l’assiette de cette taxe destinée à financer la lutte contre les maladies en Afrique pourrait être élargie. Elle est aujourd’hui supportée par les seules compagnies aériennes.
Ces deux voies pourraient permettre de mieux répartir les contributions des divers acteurs concernés sans remettre en cause les engagements de la France en matière de solidarité internationale.
Mes chers collègues, vous l’aurez compris, la réalisation rapide de ce projet est cruciale pour notre pays, au vu des retombées à en attendre. Il serait extrêmement préjudiciable de la compromettre en votant ce projet de loi sans fixer le cadre juridique dont le Gouvernement a besoin pour assurer sa réalisation.
En retour, monsieur le secrétaire d’État, il importe que, par votre voix, le Gouvernement nous apporte un éclairage sur les arbitrages qu’il entend opérer en termes de financement et se montre ouvert à la discussion lors de l’examen des textes financiers : c’est ainsi que nous pourrons trouver un compromis cohérent avec notre souhait commun de soutenir les acteurs français du tourisme et du transport aérien.