Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 29 janvier 2008 à 22h00
Titre xv de la constitution — Suite de la discussion et adoption conforme d'un projet de loi constitutionnelle

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Madame la présidente, madame le garde des sceaux, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le projet de loi constitutionnelle est la première étape de la ratification du traité de Lisbonne et nous pouvons difficilement séparer les deux étapes.

La question de principe essentielle qui se pose, au-delà même du contenu juridique du traité, c'est celle du choix du Congrès plutôt que celle du référendum, après le rejet massif par les Français du traité établissant une Constitution pour l'Europe le 29 mai 2005.

Or il est clair, et plus encore sous la Ve République, qu'une décision référendaire est d'essence supérieure à une décision parlementaire, parce qu'il s'agit de l'expression la plus directe de la volonté générale.

C'est d'ailleurs en partant de ce postulat que, pendant la campagne présidentielle, le candidat Nicolas Sarkozy envisageait le recours à la procédure parlementaire uniquement pour un traité qui serait, comme il l'avait alors écrit et déclaré, substantiellement différent sur deux points essentiels : il devait s'agir d'un texte simple - mini-traité ou traité simplifié - ne reprenant que les dispositions n'ayant pas suscité de désaccord majeur durant la campagne référendaire, donc d'une sorte de compromis ou de synthèse entre le oui et le non.

Cette position était juridiquement fondée et politiquement légitime. C'est donc à l'aune de ces deux critères qu'il faut examiner le traité de Lisbonne.

En premier lieu, s'agit-il d'un traité simplifié ?

Tout d'abord, jamais l'élaboration d'un traité ne s'est faite avec aussi peu de transparence. Il n'a été organisé aucune consultation des parlements nationaux, dont aucun des représentants n'aura été associé aux travaux de la présidence allemande.

Ensuite, il faut avoir une bonne dose d'humour pour prétendre qu'avec plus de 250 pages il s'agirait d'un traité simplifié. Ce texte est encore moins lisible que le projet constitutionnel qu'on a éclaté en mille morceaux pour les disperser et les loger dans les traités existants, lesquels, du coup, changent profondément de nature pour pourvoir avaler, digérer et intégrer la première et la troisième partie du projet constitutionnel.

Ce n'est plus un mini-traité, c'est un maxi-traité. Ce n'est pas non plus un traité simplifié, c'est un traité complexifié, et qui malmène au passage un principe essentiel, celui de la sécurité juridique : les normes édictées doivent être claires et intelligibles.

En second lieu, le traité de Lisbonne permet-il de réconcilier le oui et le non ? Bien sûr que non ! Du reste, avez-vous entendu beaucoup de partisans du non, de droite comme de gauche, affirmer qu'ils se retrouvaient dans ce texte ? Cela n'a rien d'étonnant. Ainsi, le groupe Open Europe a réalisé un minutieux travail d'analyse qui révèle que seules dix dispositions diffèrent sur le fond des deux cent cinquante propositions du traité constitutionnel.

Surtout, les points de désaccord entre le oui et le non subsistent toujours. Je n'en citerai que quatre.

Le principe de primauté du droit européen, y compris sur la Constitution, n'est pas inscrit dans le corps du traité, mais la déclaration n° 27 consacre définitivement la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes : aucun doute ne subsiste !

Le principe de concurrence libre et non-faussée n'est plus un objectif de l'Union européenne, mais il est réaffirmé dans le protocole n° 6, qui a la même portée en droit que le traité.

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