Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j’interviendrai, au nom du groupe écologiste, à propos de la branche maladie et de la branche AT-MP. Mon collègue Jean Desessard traitera des autres branches dans la suite du débat.
Je voudrais tout d’abord dire quelques mots sur les équilibres budgétaires. Nous saluons la réduction du déficit de la branche maladie, qui témoigne du souci de ménager les difficultés des comptes publics et des générations futures. C’est tout à fait positif. Nous formulerons néanmoins deux remarques.
En premier lieu, la branche AT-MP est en excédent depuis maintenant trois ans. Concernant cet excédent, nous sommes totalement opposés à ceux qui, à droite, proposent en conséquence de réduire les cotisations.
En revanche, nous regrettons que cet excédent ne soit pas utilisé pour améliorer la santé au travail et la prévention, alors que les troubles musculo-squelettiques et les burn out explosent et que, selon les statistiques de l’assurance maladie pour 2014, le nombre de maladies reconnues comme professionnelles a augmenté de 3, 4 % par an depuis dix ans, sans compter le phénomène de sous-déclaration de ces pathologies.
La branche AT-MP ne peut pas être un livret d’épargne que l’on ponctionne pour compenser les déficits des autres branches ! Des problèmes existent : nous les dénonçons depuis des années. On peut ainsi citer le cas de certains travailleurs malades de l’amiante qui ne parviennent pas à être suivis ou indemnisés, ou encore la situation des personnes exposées à des pesticides ou à d’autres produits chimiques.
En second lieu, concernant la branche maladie, les économies ne peuvent évidemment pas être faites au détriment des conditions de travail des personnels. Il nous semble important de poursuivre et de renforcer le dialogue avec les personnels hospitaliers en souffrance. Je pense sincèrement que leur point de vue, issu de leur expérience, ainsi que de leur engagement professionnel, peut nous aider à trouver des solutions.
Madame la ministre, nous saluons les avancées que vous avez obtenues, au cours de ce quinquennat, dans le domaine de l’accès aux soins : le tiers payant, notamment, ou encore la protection maladie universelle. Nous saluons également votre détermination à lutter contre les immenses dégâts sanitaires provoqués par les addictions au tabac et à l’alcool, responsables respectivement de près de 80 000 et 50 000 morts par an.
Dans ces deux domaines, vous intervenez souvent dans un milieu hostile, parfois haineux, voire sexiste. Vous avez tout notre soutien. Il serait irresponsable de continuer comme avant. Nous approuvons donc les mesures de lutte contre le tabagisme prévues dans ce PLFSS.
Il nous semble très important qu’une proposition forte soit ajoutée, afin d’inciter et d’aider les buralistes à diversifier leurs activités en distribuant des produits autres que ceux du tabac. Des compensations financières ont été prévues ces derniers jours dans le cadre de la renégociation de leur contrat d’avenir, mais il faudrait aussi améliorer, selon nous, l’accompagnement à la diversification économique des activités des bureaux de tabac, lesquels sont souvent les derniers commerces dans des campagnes désertées et dans de nombreux quartiers. Nous avons déposé un amendement en ce sens.
Cela dit, mon rôle de parlementaire est aussi de lancer des alertes et de prendre date. Il serait inconvenant de ma part de ne pas le faire. Au nom du groupe écologiste, j’insisterai donc cette année encore sur quelques points.
Des économies de fond, durables, sont possibles, mais elles font invariablement défaut dans les textes budgétaires qui se succèdent. L’augmentation constante des dépenses de la branche maladie est largement due à l’explosion des maladies chroniques dans notre pays, explosion liée, pas uniquement, mais bien souvent, à nos modes de vie et à notre environnement, et pour lesquelles la prévention est l’élément clef.
En France, on estime que plus de 80 % des dépenses remboursées par l’assurance maladie sont attribuables à des maladies non contagieuses, comme le diabète, les cancers, les maladies respiratoires chroniques et cardiovasculaires, le stress, dont l’apparition et l’aggravation sont souvent directement ou indirectement liées à des éléments sur lesquels nous avons la possibilité d’agir.
Le groupe écologiste proposera comme à son habitude plusieurs amendements visant à réduire l’impact de certains facteurs environnementaux et de certains produits nuisibles pour la santé. C’est non pas une manie, une attitude obsessionnelle ou du radotage, mais l’expression d’une conviction forte. C’est surtout le constat objectif qu’il est possible de réaliser des milliards d’euros d’économies dans la durée.
Il existe une autre piste pour limiter les déficits à l’avenir. Même si des efforts et des progrès ont été accomplis dans ce domaine, la lutte contre le non-recours aux droits doit se poursuivre énergiquement. De nombreuses personnes modestes sont encore perdues, isolées, dans les méandres de l’administration, et n’ont souvent accès aux droits, notamment aux soins, que lorsque leur maladie s’est considérablement aggravée. Cela coûte très cher aux finances publiques !
Certains efforts ont été annoncés récemment par le Premier ministre, et nous nous en réjouissons, mais nous insistons : entre 21 % et 34 % des personnes éligibles à la CMU-C n’avaient pas ouvert leurs droits en 2013 selon le Fonds CMU, soit entre un et deux millions de personnes selon les estimations. Des économies considérables pourraient être réalisées à moyen et à long terme si l’on renforçait l’accès aux droits de ces personnes.
Par ailleurs, c’est un constat, les droits prévus dans la loi doivent être mis en application. On ne peut pas miser dans le budget de la Nation sur une part de non-recours pour faire des économies. Dans une démocratie, les droits doivent être respectés, sous peine de voir se brouiller les repères républicains, sous peine de voir grandir la méfiance et, de façon incontrôlable, un certain nombre de mouvements extrêmes, populistes, antirépublicains. Nous déposerons des amendements dans ce sens.
Le groupe écologiste sera très attentif aux débats dans l’hémicycle et arrêtera sa position sur ce texte à l’issue de son examen.