Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, mes propos seront d’une tonalité quelque peu différente de ceux de l’intervenant précédent.
Je tiens, pour commencer, à saluer le travail effectué par les rapporteurs afin de nous éclairer sur la lecture réelle qui doit être faite de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. Nos collègues Catherine Deroche et Corinne Imbert se sont largement exprimées sur la réalité des déficits et sur les difficultés de notre système de santé.
Les conclusions émises par chacun de nos rapporteurs sur ce dernier budget de la sécurité sociale de l’actuelle majorité viennent quelque peu relativiser votre satisfaction, madame la ministre, celle d’avoir sauvé la sécurité sociale, en oubliant notamment le Fonds de solidarité vieillesse.
Nous sommes loin de partager votre enthousiasme, même si nous reconnaissons que des efforts ont été accomplis. Nous sommes d'ailleurs confortés dans notre analyse par le Haut Conseil des finances publiques, qui, dans un avis du 24 septembre dernier, constatait une « fragilité de la trajectoire de retour à l’équilibre » des comptes publics.
Au-delà de ces remarques liminaires, je souhaite intervenir principalement sur le volet médico-social et sur la politique du Gouvernement en matière de handicap.
Un certain nombre de mesures proposées dans ce projet de loi nous interrogent et inquiètent les acteurs du monde du handicap. Je ne puis que soutenir la position de notre rapporteur, René-Paul Savary, sur ce point.
Dans un premier temps, je ne peux que regretter, en ce qui concerne le budget médico-social, que son financement soit fragilisé par l’utilisation des réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, qui vont en s’épuisant. Rappelons que nous avons pris beaucoup de retard dans la création de places d’accueil dans les établissements et les services pour les personnes handicapées. De plus, le système d’appel à projets pour la création et l’extension d’établissements entraîne des délais extrêmement longs. Il est à craindre que, dans les années à venir, il soit nécessaire de prendre des mesures difficiles afin de rattraper le retard ainsi pris.
Concernant le douloureux problème de nos compatriotes en situation de handicap, contraints de s’exiler en Belgique, faute de réponse appropriée à leur demande en France, je regrette que ce dossier ne soit plus une priorité pour le Gouvernement.
Rappelons que près de 8 500 Français, adultes et enfants, sont présents en Belgique et que nous estimons à environ 250 millions d’euros le coût actuel pour la France de l’accueil de nos ressortissants. L’année dernière, j’avais salué la mise en place par le Gouvernement d’un plan de prévention des départs non souhaités, tout en regrettant que les moyens financiers consacrés à la mise en place de ce plan – 15 millions d’euros – ne soient pas à la hauteur.
Je m’étonne qu’il n’y ait aucune disposition nouvelle pour 2017. Ce n’est pas la réponse attendue par des centaines de parents qui vivent séparés de leur enfant, ou de ces familles déchirées de devoir laisser l’un des leurs loin du domicile familial.
La seule disposition concernant ce dossier figure à l’article 46 bis du projet de loi – le rapporteur René-Paul Savary en demandera très justement la suppression –, qui prévoit la remise, par le Gouvernement, d’un rapport au Parlement définissant les conditions de mise en place d’un fonds d’amorçage pluriannuel de prévention des départs non choisis en Belgique.
Il est urgent d’agir, et nous ne pouvons plus reculer. D’ailleurs, je serai amené dans les prochains jours à proposer un certain nombre de mesures, en conclusion de la mission qui nous a été confiée par la commission des affaires sociales du Sénat.
En ce qui concerne maintenant les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, à compter du 1er janvier 2017, les crédits du budget de l’État qui sont normalement alloués à ces dernières seront transférés à la CNSA. Par ce transfert, l’État se désengage financièrement des MDPH, et il sera mal aisé pour le Parlement de vérifier les sommes véritablement consacrées à leur fonctionnement.
Rappelons de nouveau que les réserves de la CNSA sont en diminution, ce qui ne peut qu’inquiéter pour la pérennité du financement des MDPH. De plus, il est regrettable que les moyens financiers ne soient pas revus à la hausse, compte tenu de la surcharge de travail que suppose la généralisation de la « réponse accompagnée pour tous », notamment l’élaboration des plans d’accompagnement globaux, les PAG, qui seront généralisés sur l’ensemble du territoire au 1er janvier 2018.
Afin que le service apporté aux personnes touchées par un handicap soit de qualité, des moyens supplémentaires, notamment humains, sont nécessaires, dans un contexte financier tendu, les départements ne pouvant engager des moyens financiers supplémentaires.
À l’occasion de la semaine européenne pour l’emploi des personnes handicapées, je tiens à saluer les dispositions de l’article 30 bis, qui visent à permettre, par la mise en place d’une commission pluridisciplinaire, la prise en compte, pour le bénéfice de la retraite anticipée des travailleurs handicapés, de certaines périodes de handicap lourd que les assurés ne sont pas en mesure de justifier.
Il serait opportun que ces dispositions puissent s’appliquer à tous : salariés, fonctionnaires et indépendants, quel que soit le régime dont ils dépendent. Et je salue l’amendement déposé par le rapporteur Gérard Roche, qui tend à rétablir la prise en compte du critère de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé pour la retraite anticipée avec majoration de la pension.
Pour terminer, même si le sujet peut sembler de moindre importance, je suis extrêmement choqué par l’article 45 quinquies, qui prévoit que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur l’usage du packing. En effet, la Haute Autorité de santé s’est déclarée formellement opposée à l’usage de cette pratique, qui, selon moi, devrait être interdite et ne plus donner lieu à débat.
Cette pratique d’un ancien temps est inhumaine et devrait être proscrite. Je suis donc étonné, madame la ministre, que vous proposiez de relancer cette discussion au lieu de prendre les décisions qui, selon moi, s’imposent.