Intervention de Guillaume Arnell

Réunion du 23 novembre 2016 à 14h30
Action extérieure des collectivités territoriales et coopération des outre-mer — Adoption définitive en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Guillaume ArnellGuillaume Arnell :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’article 52 de la Constitution affirme clairement la responsabilité de l’État en matière d’engagements internationaux de la République, mais la situation géographique de nos collectivités d’outre-mer a rendu nécessaire une évolution du développement de la coopération régionale. En effet, depuis une vingtaine d’années, une véritable diplomatie territoriale de proximité tente de se développer, en dépit d’un cadre juridique encore trop incertain et restrictif.

Ce cadre, fixé par les lois de décentralisation de 1982 et 1992, mais principalement par la loi d’orientation pour l’outre-mer du 13 décembre 2000, prévoit la possibilité pour les collectivités territoriales ultramarines d’être autorisées par l’État à négocier et à signer des conventions internationales à des fins de coopération régionale. Cette faculté n’a pas toujours été très utilisée, en raison de la complexité des procédures de décision, quelque volontariste que soit la politique menée par les collectivités concernées.

La présente proposition de loi a pour objet d’accroître la liberté d’action des collectivités ultramarines, bien trop souvent enfermées dans des carcans imposés par la métropole. Permettez-moi d’insister sur quelques-unes des raisons pour lesquelles son adoption est nécessaire.

Premièrement, les États de la Caraïbe veulent régulièrement négocier avec les décisionnaires locaux, mais ceux-ci n’en ont pas les moyens, bien que, dans tous les cas, ils connaissent parfaitement les sujets, l’environnement et les contraintes.

Deuxièmement, la France continue d’agir de manière unilatérale, et la concertation avec les élus locaux peut encore être singulièrement améliorée.

Troisièmement, les outre-mer, aujourd’hui encore, sont considérés comme la périphérie d’une France malheureusement trop à l’aise avec la centralité décisionnaire.

Quatrièmement, trop souvent encore, les outre-mer sont regardés comme une charge pour la France, un handicap, et non – ou peu souvent – comme une richesse.

Il me plaît souvent de rappeler que les outre-mer sont des vitrines avancées de la France et que, pour cette raison, il leur importe de devenir encore plus des acteurs de leur propre développement économique. Il nous faut sortir non seulement des stéréotypes que je viens de décrire, mais aussi de notre dépendance socio-économique vis-à-vis de la métropole, et même de l’Europe, en accédant à ce vaste marché supplémentaire de près de 300 millions de personnes que représente la Grande Caraïbe.

Le territoire insulaire de Saint-Martin, que j’ai l’honneur de représenter, rencontre des difficultés liées à sa binationalité et à la coexistence de deux statuts européens différents : celui de région ultrapériphérique et celui de pays et territoire d’outre-mer.

Nous arrivons pourtant à avancer avec les autorités néerlandaises, en matière, par exemple, de coopération policière, de politique de l’eau et d’assistance hospitalière, mais sans cadre formalisé, sauf pour la coopération policière. Il me semble que c’est ce vers quoi tendent les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution. La définition d’un cadre formalisé est donc nécessaire.

Au demeurant, j’aurais souhaité que les collectivités territoriales régies par l’article 74 de la Constitution soient elles aussi comprises dans le dispositif de la proposition de loi, afin que la coopération régionale puisse aller encore plus loin. Je suis toutefois conscient qu’une modification des dispositions organiques régissant ces territoires eût été nécessaire, et que tel n’est pas l’objet du présent texte.

Par ailleurs, nous nous félicitons de l’élargissement de la notion de voisinage : plus vastes, les espaces de coopération permettront des échanges avec des pays situés dans un périmètre plus lointain.

De même, il est indispensable que les régions et collectivités territoriales d’outre-mer soient en mesure d’assurer à leurs représentants un régime indemnitaire – rémunération, protection sociale et retraite –, ainsi que des facilités de résidence et de remboursements de frais, en lien avec leurs fonctions, selon les articles 13, 14 et 15 du présent texte.

Permettez-moi toutefois de formuler une interrogation quant à l’article 16 de la proposition de loi, qui prévoit pour les agents territoriaux nommés dans les ambassades de France la possibilité de bénéficier des privilèges et immunités du corps diplomatique de l’État qui sont reconnus par la convention de Vienne sur les relations diplomatiques. J’ai bien entendu sur ce sujet la remarque de M. le rapporteur, éclairé par notre collègue Jean-Pierre Raffarin.

Malgré les quelques réserves que vous m’aurez autorisé à formuler, cette proposition de loi ouvre la voie à une réelle avancée pour la liberté d’action des collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution. Elle favorisera une meilleure intégration régionale et permettra une véritable diplomatie territoriale, sans altérer en rien le rayonnement international de la France, bien au contraire. Le groupe RDSE la votera donc avec conviction !

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