Intervention de Michel Boutant

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 9 novembre 2016 à 9h05
Loi de finances pour 2017 — Mission « sécurités » - programme 152 « gendarmerie nationale » - examen du rapport pour avis

Photo de Michel BoutantMichel Boutant, rapporteur pour avis :

Je ne serai pas aussi pessimiste que mon co-rapporteur ! En cette période d'intense mobilisation de toutes les forces de sécurité pour la protection des Français, le budget de la gendarmerie pour 2017 offre en effet plusieurs sujets de satisfaction : une augmentation de 3,5 % des crédits de paiement, des effectifs en hausse de 255 ETP après de très nombreux recrutements en 2016, la commande de 3 000 nouveaux véhicules ou encore l'extension du projet Néogend à l'ensemble du territoire national. Il ne faut pas oublier en outre que 144 effectifs supplémentaires, financés par EDF, iront renforcer les Pelotons spécialisés de protection de la Gendarmerie (PSPG), affectés à la sécurité des centrales nucléaires.

Je voudrais quant à moi attirer plus particulièrement votre attention sur plusieurs missions de la gendarmerie qui sont en train de connaître des évolutions importantes.

Tout d'abord, la gendarmerie mobile a été sous forte pression à la fin de 2015 et en 2016 et devrait le rester en 2017.

En particulier, la mission de maintien de l'ordre a été très mobilisatrice, notamment en raison d'événements majeurs tels que le crash de la Germanwings, les manifestations liées au projet du barrage de Sivens, la COP 21 ou encore l'Euro 2016.

Cette intense activité a fort heureusement été partiellement équilibrée par les évolutions permises par le budget voté l'année dernière, avec le recrutement d'effectifs supplémentaires dédiés.

Ces effectifs ont d'une part permis la mise en place d'un 5ème peloton au sein de 22 escadrons de gendarmerie mobile à compter du 1er juillet 2016, ce qui représente 22 hommes supplémentaires au sein de chacun de ces escadrons.

D'autre part, un nouvel escadron de gendarmerie mobile a été créé à Rosny-sous-Bois. Il s'agit de la première création d'un escadron depuis de nombreuses années. Désormais, la gendarmerie mobile en compte ainsi 109.

Autre formation de la gendarmerie à avoir connu des évolutions importantes en 2016, le GIGN.

La gendarmerie a fait évoluer les pelotons d'intervention interrégionaux de gendarmerie en « antennes GIGN » avec un armement et des protections renforcés. Trois nouvelles antennes GIGN ont été créées à Nantes, Reims et Tours.

Le nouveau schéma national d'intervention (SNI), que le Ministre de l'intérieur est venu présenter devant notre commission, distingue les unités d'intervention spécialisées que sont le GIGN, les six Antennes GIGN de métropole et les sept Antennes GIGN outre-mer, et les unités d'intervention intermédiaire, à savoir les pelotons de surveillance et d'intervention (PSIG) en configuration dite SABRE, les pelotons d'intervention des escadrons de gendarmerie mobile ainsi que les pelotons spécialisés de protection de la gendarmerie (PSPG).

Je précise que les pelotons de surveillance et d'intervention dits SABRE constituent une nouvelle configuration des pelotons de surveillance et d'intervention, dotés de moyens de protection et offensifs supplémentaires et d'une mobilité supérieure grâce à des véhicules Sharan.

La gendarmerie nationale est ainsi pleinement intégrée dans le schéma national d'intervention. Un tel progrès dans la coordination était nécessaire après certaines critiques qui avaient suivi les attentats et pour éviter les habituelles remises en cause de la coexistence de deux forces distinctes de sécurité intérieure, coexistence à laquelle notre commission reste attachée.

Je voudrais à présent évoquer la question de l'organisation du Renseignement au sein de la gendarmerie nationale. Nous avons pu entendre à ce sujet le général Sauvegrain, sous-directeur à l'anticipation opérationnelle.

Je rappelle que la SDAO, créée en 2013, n'est pas un service de renseignement du type de la DGSE ou de la DGSI. Il s'agit d'une structure légère d'environ 70 personnels chargée de centraliser le renseignement produit par les bureaux renseignement des régions ainsi que les cellules et officiers adjoints « renseignement » des groupements de gendarmerie. L'information recueillie est intégrée dans le système d'information « base de données de sécurité publique » (BDSP) en vue de son exploitation et de son analyse.

Nous avons interrogé le Général Sauvegrain sur l'articulation de cette chaîne du renseignement de la gendarmerie avec le Service central du renseignement territorial (SCRT). En effet, certains (Commission d'enquête Fenech/Pietrasanta à l'AN) estiment qu'il y a une redondance entre la SDAO et le SCRT et que ces deux services devraient être fusionnés.

Or, tout d'abord, la SDAO et le SCRT coopèrent dorénavant étroitement. Des bureaux de liaison ont été créés à tous les niveaux : départementaux, régionaux et zonaux. Trois services départementaux du renseignement territorial sont en outre dirigés par des officiers de gendarmerie. Au total, le renseignement territorial emploie 198 gendarmes. En outre, au niveau central, un adjoint gendarmerie est placé auprès du chef du SCRT et deux divisions du service sont pilotées par des officiers de gendarmerie, tandis que la SDAO accueille un commissaire de police, adjoint au sous-directeur, ainsi qu'un capitaine de police.

Selon le Général Sauvegrain, il n'y a pas de doublons mais une saine répartition des tâches. Au SCRT, le rôle de service centralisateur qui rédige des notes d'angle stratégiques pour le Gouvernement. Au SDAO la préparation des opérations délicates en zone gendarmerie, avec par exemple des informations très concrètes sur les difficultés du terrain que les gendarmes mobiles vont devoir affronter lors d'une intervention.

Par ailleurs, la gendarmerie a besoin d'avoir un service de renseignement en propre et perdrait beaucoup en opérationnalité à dépendre d'une nouvelle direction qui serait probablement rattachée à la police nationale.

Enfin, il paraît imprudent de remettre encore en cause une organisation récemment bouleversée. La question aujourd'hui est plutôt celle du partage d'information maximal pour ne laisser échapper aucun « signal faible ». Il reste encore du chemin à parcourir pour arriver à cette fluidité dans la circulation de l'information, mais nous avons le sentiment que la situation s'améliore.

Sous réserve de ces quelques observations, je vous proposerai quant à moi de donner un avis favorable aux crédits de la gendarmerie au sein de la mission Sécurités, qui, comme l'année dernière, affichent une augmentation satisfaisante, après une période de vaches maigres.

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