Intervention de Xavier Pintat

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 23 novembre 2016 à 9h15
Projet de loi de finances pour 2017 — Mission « défense » - programme 146 « equipement des forces » - examen du rapport pour avis

Photo de Xavier PintatXavier Pintat, rapporteur pour avis :

En complément des exposés de Jacques Gautier et Daniel Reiner, dont, bien sûr, je partage les orientations, j'aborderai trois sujets : la dissuasion, l'espace, et les drones.

Concernant notre force de dissuasion nucléaire, en 2017, l'action stratégique « dissuasion » doit bénéficier de près de 2,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 3,8 milliards d'euros en crédits de paiement. Ces sommes importantes ne doivent toutefois pas provoquer un effet d'éviction d'autres équipements.

La conjoncture internationale justifie le maintien de l'effort de dissuasion, qui est essentielle à la crédibilité de la France sur la scène internationale - elle justifie notre siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. La programmation militaire actualisée a renforcé les moyens de notre outil de défense, sans remettre en cause cet effort budgétaire, mobilisé pour les deux composantes de la dissuasion, aéroportée et océanique.

Dans les prochaines années, la modernisation du dispositif de dissuasion, en particulier de sa composante aéroportée, appellera d'importants investissements. Cet effort nécessaire devra faire l'objet d'une programmation financière pour soutenir les programmes de dissuasion, tout en conservant des marges de manoeuvre pour des opérations d'armements conventionnels. Ceux-ci permettent en effet de répondre aux menaces les plus pressantes, notamment le terrorisme.

Le budget pour 2017 intègre le financement de la poursuite de la rénovation indispensable à mi-vie du missile ASMP-A (air-sol moyenne portée amélioré), des travaux de conception du sous-marin nucléaire lanceur d'engins de troisième génération, de l'adaptation au missile M51 du Téméraire, le dernier sous-marin livré, et de la quatrième génération des supercalculateurs Tera 1000.

Le tir d'acceptation du M51 effectué le 1er juillet dernier a été couronné de succès. Il s'agissait du huitième tir d'essai du programme et le premier du missile dans sa version 2 depuis le SNLE Le Triomphant, permettant ainsi de qualifier la tête nucléaire océanique. L'échec de 2013 paraît désormais lointain.

S'agissant de l'espace militaire, les crédits sont prévus à hauteur de 492 millions d'euros, contre 489 millions en 2016, mais 151 millions en 2015 et 389 millions en 2014. Ces fortes variations s'expliquent par le cycle des programmes.

La dotation vise principalement à financer les programmes d'imagerie optique et de radar (Musis), de renseignement électromagnétique (Ceres), et de communications par satellite (Syracuse IV). Les priorités du spatial militaire restent en effet les télécommunications, avec Syracuse IV, le renseignement, avec les programmes Musis et Ceres, ainsi que l'alerte avancée pour la défense antimissile, dont le calendrier a cependant été décalé au-delà de la période couverte par la LPM pour 2014-2019.

Le secteur spatial doit être soutenu en tant qu'enjeu de souveraineté et parce qu'il représente un enjeu scientifique, technologique et industriel - les technologies spatiales constituent un véritable laboratoire d'innovations. La France est un investisseur mondial de premier plan, derrière les États-Unis, qui dépensent 50 milliards d'euros, et sans doute derrière la Russie et la Chine, dont les budgets, que l'on ne connaît pas, approchent peut-être 10 milliards d'euros.

Il faut donc soutenir les coopérations européennes, comme le programme Musis, issu de la coopération décidée en mars 2015 entre le système allemand d'observation radar par satellite (SARah) et la composante spatiale optique (CSO) réalisée sous responsabilité française. Je rappelle qu'un troisième satellite CSO est financé aux deux tiers de son coût, soit 210 millions d'euros, par l'Allemagne, pour un lancement prévu en 2021, à la suite du lancement des deux premiers, lesquels sont financés par la France.

Concernant les drones, l'accord conclu l'année dernière entre l'Allemagne, l'Italie et la France, rejointes par l'Espagne, pour conduire une étude sur deux ans visant à déterminer les prérequis opérationnels et à élaborer le prototype d'une nouvelle génération de drones de moyenne altitude et de longue endurance (Male) à l'horizon 2025, marque la poursuite de l'effort de recherche. L'arrangement-cadre est entré en vigueur le 22 juin 2016 et la notification du contrat d'étude de définition est intervenue en septembre dernier. Les maîtres d'oeuvre en sont Dassault, Airbus-Allemagne et Leonardo - anciennement Finmeccanica - en attendant une possible participation industrielle de l'Espagne. Il sera toutefois difficile de produire un drone Male européen conjuguant la satisfaction d'un besoin militaire partagé et un coût susceptible de créer un marché.

Concernant les drones Reaper en service dans notre armée de l'air, la loi de programmation militaire a prévu d'ici à 2019 la livraison de 4 systèmes complets, comprenant chacun 3 vecteurs, pour un total de 12 drones.

Un premier système, composé de 2 vecteurs, a été livré sur la base aérienne de Niamey, au Niger, fin 2013 et officiellement mis en service au début 2014, puis complété par son troisième vecteur en mai 2015. Un deuxième système a été commandé en juillet 2015, pour une livraison prévue fin 2016, et la commande d'un troisième système a été passée en décembre 2015, pour une livraison en 2019. La commande du quatrième système est programmée pour la fin de l'année 2016, pour une livraison en 2019. Nous disposerons alors des 4 systèmes complets.

Ces Reaper servent de manière intensive dans la bande sahélo-saharienne. Ils ont amélioré de manière significative la capacité opérationnelle de nos forces, qui ne peuvent désormais plus se passer de cet apport essentiel en matière de renseignement.

Du côté de l'armée de terre, le programme de système de drones tactiques (SDT) vise à remplacer, à l'horizon 2017, les drones tactiques Sperwer actuellement en service. En janvier dernier, la DGA a choisi le Patroller de Sagem, de préférence au Watchkeeper de Thalès qui équipe les forces britanniques. Un des points forts du Patroller tient à sa boule optronique, offrant des performances remarquables pour l'identification d'objectifs. De même, son acceptation dans l'espace aéronautique français paraît plus facile. Le premier système opérationnel est attendu pour la fin de l'année 2018, le second, avec les moyens de formation et d'entraînement, en 2019.

Le chef d'état-major de l'armée de terre attend beaucoup du Patroller. Lors de son audition par notre commission, il a souligné que l'armée de terre et l'armée de l'air ne se concurrençaient pas dans ce domaine. Un prochain exercice commun est d'ailleurs prévu, dans lequel des avions et des drones de l'armée de l'air vont travailler avec des drones de l'armée de terre afin de démontrer leur complémentarité.

Les drones concernent aussi la marine, le salon Euronaval l'a montré comme notre récente audition de l'amiral Prazuck, chef d'état-major de la marine. À cet égard, les crédits du programme 146 comprennent les moyens de financement du système de lutte anti-mines marines du futur (Slamf), qui prépare le renouvellement de la capacité de guerre des mines pour remplacer le système actuel. La réalisation d'un prototype a été commencée en 2016 et se poursuivra l'année prochaine. En outre, je signale que les études et les expérimentations en vue de l'intégration d'un drone aérien sur les plateformes de la marine doivent être lancées d'ici à 2019, notamment au profit des futures frégates de taille intermédiaire.

Jacques Gautier, Daniel Reiner et moi-même émettons, sur les crédits du programme 146 prévus pour 2017, une appréciation positive. Sous réserve de l'avis des autres rapporteurs, nous recommandons l'adoption des crédits de la mission « Défense », quand bien même leur examen ne devrait pas aller jusqu'à la séance publique du Sénat.

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