On crée donc beaucoup d'emplois, mais ceux-ci ne sont, en définitive, pas pourvus. Comment rendre attractif le métier ? En outre, la pénitentiaire a la charge de fonctions nouvelles, par exemple l'extraction des détenus, à la place de la police. Ce sont des emplois en moins pour garder les détenus.
S'agissant de l'évolution des personnels pénitentiaires, donc, sur le papier, c'est bien ; dans la réalité, ça l'est beaucoup moins.
La prison, par ailleurs, n'est pas seulement l'affaire des prisonniers et des surveillants ; c'est aussi celle des magistrats. Il serait bon que les magistrats aillent voir ce qui s'y passe. Seuls les juges de l'application des peines y vont, par obligation. Si l'on veut connaître les prisons, il faut les visiter.
Hier nous étions dans une prison où il y avait deux fois plus de détenus que de places. Le taux moyen d'occupation des prisons est de 140 %. Il est toutefois variable : la surpopulation est nulle dans les maisons centrales mais élevée dans les maisons d'arrêt, où beaucoup n'ont pas leur place : personnes atteintes de troubles mentaux, placées en détention provisoire - nous sommes le pays d'Europe dans lequel sa durée est la plus longue -, condamnées à des peines d'enfermement courtes ou inappropriées - alors que les juges pourraient, s'ils avaient adapté leur logiciel, prononcer des peines alternatives à l'enfermement... La surpopulation carcérale concerne aussi les femmes, car nous avons cessé de construire des prisons ou des quartiers de prison pour femmes. À Nice, où nous étions en juillet, j'ai compté six femmes par cellule, qui vivent dans des conditions innommables : les détenues avaient cassé les canalisations pour trouver de quoi se rafraîchir... Visiter les prisons françaises donne parfois l'impression de se trouver au Brésil ou au Salvador - les armes en moins.