À périmètre constant et après neutralisation des mesures de transfert, les crédits de la mission pour 2017 connaissent une stagnation par rapport à l'an passé : on observe en effet une hausse de 0,5 % des crédits de la mission, mais une baisse de 0,7 % des crédits hors titre 2, c'est-à-dire hors frais de personnel. Cet état de fait tranche quelque peu avec trois années consécutives de baisse ininterrompue des crédits qui ont conduit à une diminution de 13 % par rapport à 2013.
Je regrette néanmoins que des changements de périmètres et des transferts entre missions rendent particulièrement peu aisée l'évaluation sur plusieurs années de l'évolution des crédits dévolus au soutien des entreprises. En effet, si l'on relève une hausse faciale de 10,7 % des crédits de paiement par rapport à l'année passée, cela vient pour l'essentiel du déversement des crédits de soutien aux entreprises électro-intensives, qui relevaient jusqu'alors de la mission « Écologie ». Comme pour les normes elles-mêmes, les documents budgétaires doivent s'efforcer de conserver une relative stabilité, qui est seule de nature à garantir leur pleine lisibilité.
Pour le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme », on observe une baisse de 1 % en crédits de paiement, à 830,8 millions, et de 2,3 % en autorisations d'engagement, à 831,8 millions. Cela fait suite à une baisse de 5 % en crédits de paiement et de 1,75 % en autorisations d'engagement l'année passée. Toutefois, comme l'année précédente, l'évolution des crédits hors titre 2 est nettement plus défavorable : - 3,2 % en crédits de paiement et - 6 % en autorisations d'engagement.
D'autre part, s'agissant des crédits du programme 220 « Statistiques et études économiques », c'est-à-dire, essentiellement, les fonds alloués à l'INSEE, par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2016, on constate une hausse de 5 % en autorisations d'engagement et de 3,7 % en crédits de paiement. Cet effort ne vise cependant qu'à compenser les incidences de la mise en oeuvre du principe de gratuité des données publiques à compter du 1er janvier 2017, en application de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique.
Enfin, je relève la stabilisation des crédits du programme 305 « Stratégie économique et fiscale », avec une faible augmentation de 0,9 %, à 429 millions en crédits de paiement.
Comme toujours, le levier essentiel de la mission reste la dépense fiscale : 23,9 milliards en 2017. Par rapport aux évaluations faites pour 2016, il y a une augmentation de 16 %.
Cette hausse s'explique par deux éléments : en premier lieu, le fonctionnement « à plein régime » du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), et l'augmentation de son taux, qui passerait de 6 % à 7 % en 2017. Le CICE concentre à lui seul les deux tiers de la dépense fiscale de la mission. Le second élément d'explication est la montée en charge et l'extension du dispositif de suramortissement en faveur des investissements industriels, qui a été reconduit pour une année supplémentaire en 2016, afin de bénéficier aux investissements intervenus jusqu'au 14 avril 2017. Cette prolongation conduit à un chiffrage de la mesure, pour 2017, à 1 milliard, contre 860 millions pour 2016.
Compte tenu de ces différents éléments, je vous proposerai d'émettre un avis de sagesse sur les crédits de la mission. Toutefois, avant de vous prononcer, je souhaite aborder deux éléments de l'accompagnement des entreprises que j'ai particulièrement étudiés cette année.
Le premier concerne le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). La période 2015-2016 aura été la première année de mise en oeuvre effective du FISAC dans son dispositif issu de la loi du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises. Il est donc possible, aujourd'hui, d'avoir un premier retour d'expérience.
La situation antérieure est complètement assainie. Tous les dossiers en stock avant la réforme ont désormais donné lieu à une décision positive ou négative d'attribution d'aide, les actions approuvées sont en cours de réalisation et les paiements sont effectués au fur et à mesure de leur avancement. Cela vaut également pour les actions de financement qui, jusqu'en 2014, dépendaient du Comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC), et qui relèvent désormais directement du FISAC.
D'autre part, le FISAC repose aujourd'hui sur des appels à projets structurés autour d'axes prioritaires ; des priorités thématiques et des zones géographiques privilégiées sont définies chaque année dans l'appel d'offres. C'est une bonne chose, car cela permet de mieux cibler les aides.
En 2015, les actions devaient cibler les derniers commerces et les commerces multiservices en zones rurales, les stations-services qui assurent le maillage du territoire, ou encore l'accessibilité des commerces. Les zones géographiques privilégiées étaient les communes classées en zone de revitalisation rurale et les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Au total, l'administration a été saisie de 324 demandes de soutien au titre du FISAC, représentant une demande d'aide globale de 36 millions. Sur ce total, 105 opérations individuelles en milieu rural ont reçu des subventions, à hauteur de 2,9 millions. Il restera donc 12 millions pour financer au titre de 2016 une partie des 219 dossiers d'opérations collectives résultant de l'appel à projets de 2015. C'est dire le décalage entre l'attente du terrain et les possibilités financières du FISAC : la sélection sera drastique.
Pour les appels à projets de 2016, les priorités de 2015 ont été maintenues et complétées, s'agissant des opérations collectives, par des priorités thématiques telles que la modernisation, la diversification, l'accessibilité et la sécurisation des entreprises de proximité existantes, ainsi que la création et la modernisation des halles, marchés couverts et marchés de plein air. En outre, aux deux zones géographiques déjà ciblées ont été ajoutées les centralités commerciales dégradées connaissant un fort taux de vacance. Cette nouvelle priorité est selon moi très pertinente, car je suis convaincue que le FISAC peut être une arme très efficace pour la revitalisation des centres-villes, qui n'ont cessé de perdre leur attractivité commerciale. La situation de vacance commerciale dans nombre de villes moyennes est préoccupante : à Béziers, Châtellerault, Forbach ou Annonay, la vacance dépasse les 20 %.
Il n'en reste pas moins que, avec une dotation en crédits de paiement de 10 millions pour 2017, ce qui représente une diminution de 87,7 % en dix ans et de 23,6 % en un an, la dimension structurante du FISAC reste extrêmement faible. Il serait donc important de renforcer sa dotation, a fortiori si les premières appréciations favorables venaient à se confirmer.
J'en viens à la coordination des actions d'accompagnement des entreprises et, dans cette perspective, à la nouvelle Agence France entrepreneur (AFE). Les réseaux d'accompagnement des entreprises sont particulièrement nombreux. Il s'agit, d'abord, des réseaux consulaires, les chambres de commerce et d'industrie (CCI) et les chambres de métiers et de l'artisanat (CMA), qui offrent une large palette d'actions à leurs membres. L'offre d'accompagnement peut néanmoins s'avérer redondante, notamment en cas de double affiliation, ce qui est le cas pour près de 70 % des artisans. Par ailleurs, les ressources budgétaires disponibles diminuent ; ainsi, le montant de la taxe pour frais de chambre des CCI est réduit, à nouveau, de 60 millions par le présent projet de loi de finances.
Il y a, ensuite, les réseaux associatifs soutenus par l'État ou les collectivités territoriales. On compte ainsi cinq grands réseaux nationaux avec implantations régionales : Initiative France, France active, Réseau entreprendre, le réseau BGE, ainsi que l'association pour le droit à l'initiative économique (ADIE).
De nouveaux acteurs développent également un accompagnement. Ainsi, Bpifrance propose depuis deux ans une offre d'accompagnement aux entreprises qu'elle finance en fonds propres ou qu'elle garantit, offre qui porte notamment sur les start-ups ou sur la croissance des TPE et des ETI.
Il faut mentionner, enfin, le réseau d'accompagnement à l'international, qui fait intervenir notamment Business France, les chambres de commerce françaises à l'étranger ainsi que d'autres acteurs.
Le paysage de l'accompagnement des entreprises s'avère donc particulièrement riche ; les entreprises peuvent en principe y trouver un appui dans leurs démarches quotidiennes et dans leurs stratégies de croissance.
Nous devons néanmoins être vigilants sur deux points. D'une part, les entreprises doivent être pleinement conscientes des services qu'elles peuvent trouver dans les différents réseaux d'accompagnement. Or elles n'en sont pas toujours suffisamment informées. D'autre part, cette abondance d'actions ne doit pas conduire à des stratégies concurrentes entre les acteurs. Elle doit au contraire assurer des complémentarités. Sur ce point, la convention de partenariat conclue entre Business France et CCI France a valeur d'exemple. Cette démarche reste pourtant insuffisamment développée sur le territoire national.
À cet égard, les missions de coordination des acteurs de l'accompagnement d'entreprise qui viennent d'être confiées à l'AFE revêtent un grand intérêt. Cependant, la question est de savoir si cette nouvelle structure sera bien à la hauteur de ses nouvelles missions. Elle doit, d'abord, animer et incarner la stratégie nationale de soutien à l'entreprenariat. Il s'agit, pour l'AFE, de renforcer la visibilité et de consolider le pilotage des financements vers les grands réseaux d'appui aux entreprises, en animant par ailleurs l'écosystème public et privé de l'entreprenariat. Il lui faut, ensuite, devenir la référence nationale en matière d'information et d'orientation numériques des entrepreneurs. À cette fin, l'AFE devra moderniser le site internet développé par l'Agence pour la création d'entreprises, l'APCE, et s'efforcer de faire connaître les plateformes de formation à l'entreprenariat. Enfin, l'AFE devra nouer des partenariats stratégiques avec les grands acteurs territoriaux et impulser des actions innovantes sur les territoires.
La création de cette agence a été annoncée en octobre 2015. Or il a fallu attendre avril 2016 pour que le Gouvernement lui donne sa feuille de route et elle vient seulement d'approuver ses statuts. Tout reste donc à faire pour cette agence. Il faudra être vigilant sur son action, afin qu'elle ne soit pas une coquille vide ou une APCE simplement rebaptisée. Cette création n'aura sinon été qu'un effet d'annonce, alors qu'une réelle instance de concertation, de dialogue et de coordination est absolument nécessaire pour clarifier et rendre encore plus efficace l'offre d'appui aux entreprises actuellement disponible.