Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 1er décembre 2016 à 10h30
Financement de la sécurité sociale pour 2017 — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

Marisol Touraine, ministre :

C’est bien ce projet qui est désormais soutenu par la majorité sénatoriale tout entière en vue de l’élection présidentielle de 2017 !

Je ne reviendrai pas en détail sur les mesures contenues dans ce PLFSS, car elles sont désormais connues de tous.

Je tiens à saluer une nouvelle fois la très bonne tenue de nos débats, toujours cordiaux, même si nous ne parvenons pas à nous rejoindre, ainsi que le soutien apporté par le Sénat à quelques-unes des dispositions figurant dans ce texte : je pense notamment à l’extension de la retraite progressive ou à la hausse de la fiscalité sur le tabac à rouler, mesures votées conformes par le Sénat.

Je veux insister une dernière fois sur la cohérence de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.

Tout d’abord, contrairement à ce qu’affirme la majorité sénatoriale, le redressement de nos comptes sociaux est bien réel ! Ce quinquennat marque la fin du caractère inéluctable, incontournable des déficits sociaux : en quatre ans, nous avons ramené le déficit du régime général de 17, 5 milliards d’euros à 3, 7 milliards d’euros en 2016, avec la perspective d’un retour à l’équilibre en 2017, une première depuis 2001.

Surtout, au-delà de la présentation comptable qui peut en être faite, ce résultat est le fruit de réformes résolues, volontaristes et ambitieuses : réforme des retraites, meilleure prise en compte des revenus des familles pour le calcul des prestations familiales, amélioration de la pertinence des actes, maîtrise du coût des médicaments, mise en œuvre du virage ambulatoire, amélioration constante de l’efficacité de la dépense hospitalière. Ce sont là autant de réformes qui nous ont permis de moderniser notre protection sociale pour en garantir la pérennité.

Je regrette votre choix de ne pas reconnaître la réalité de cette dynamique et de résultats dont nous devrions pourtant collectivement nous féliciter. En première lecture, vous aviez toute latitude pour exposer quelles réformes de structures alternatives vous entendez conduire ; vous n’en avez rien fait, et c’est regrettable !

Les réformes mises en œuvre par le Gouvernement nous dispensent d’avoir à nous engager dans la voie des déremboursements. Cependant, faute de propositions structurelles alternatives, vous vous réfugiez dans la perspective de nouveaux déremboursements pour garantir l’avenir de la sécurité sociale.

Or, dans le même temps, le texte que vous avez adopté en première lecture aboutissait purement et simplement à une dégradation du solde du budget de la sécurité sociale à hauteur de 700 millions d’euros. Vous conviendrez que l’on a vu projet plus ambitieux…

La seule ambition que vous avez exprimée consistait à revenir sur une partie des réformes de structure figurant dans le PLFSS, réformes finalement rétablies par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture. Je pense, en particulier, aux mécanismes de régulation du prix des médicaments, que vous aviez choisi de supprimer alors même qu’il s’agit d’un chantier majeur pour la sécurité sociale et notre système de santé. Assurément – nous nous retrouvons sur ce point –, l’innovation suscite de grands espoirs ; pour nos concitoyens, elle représente la promesse qu’ils vivront mieux, qu’ils seront mieux soignés, que certaines maladies aujourd’hui incurables pourront être guéries.

Je tiens à rappeler que la France bénéficie d’un dispositif unique au monde que nous devons préserver, à savoir l’autorisation temporaire d’utilisation : grâce à ce mécanisme, un médicament innovant peut être rapidement mis à disposition des patients, avant même l’octroi d’une autorisation de mise sur le marché.

Pour autant, nous savons combien l’accélération de l’innovation thérapeutique constitue un défi non seulement pour la France et son système de protection sociale, mais aussi pour le monde dans son ensemble. C’est parce que nous devons relever ce défi, dans l’intérêt des patients, que j’ai fait le choix de proposer, au travers de ce PLFSS, de nouvelles manières de prendre en charge ces innovations.

C’est ainsi que sont prévus la mise en place de nouveaux mécanismes de régulation et un financement approprié pour amortir les dépenses d’innovation. Il s’agit d’abord de renforcer la capacité de l’assurance maladie de négocier les prix en sortie d’autorisation temporaire d’utilisation, afin d’assurer des conditions plus équilibrées qu’aujourd’hui, ensuite de créer un fonds de financement des innovations pour lisser les effets des variations de la dynamique des innovations thérapeutiques.

Je me réjouis du rétablissement de ces dispositions par l’Assemblée nationale, parce qu’il serait insoutenable économiquement et insupportable moralement que des traitements innovants soient très coûteux et inaccessibles aux patients.

Pour terminer, je voudrais revenir sur les droits nouveaux inscrits dans ce PLFSS : extension de la retraite progressive, mise en place d’une agence de recouvrement des pensions alimentaires, allégement des cotisations sociales des travailleurs indépendants et amélioration de leur recouvrement, renforcement et transformation de l’accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées grâce à 590 millions d’euros de mesures nouvelles destinées à financer la création de 4 000 places pour les personnes âgées et de 4 100 places pour les personnes handicapées. Je pourrais également citer le renforcement de la protection universelle maladie au bénéfice de ceux qui changent souvent de situation professionnelle, notamment les travailleurs saisonniers, ou encore le plan ambitieux pour améliorer l’accès aux soins dentaires, dont l’objectif est de réduire le coût restant à la charge des patients, au moyen d’une revalorisation de certains soins conservateurs en échange de la maîtrise du coût des prothèses.

Vous avez choisi de supprimer ce plan, prenant ainsi, au fond, simplement un peu d’avance sur la désignation de votre candidat à l’élection présidentielle, dont la porte-parole a récemment déclaré de manière explicite que les soins dentaires, les frais d’optique et les audioprothèses n’avaient pas à être remboursés : un tel choix politique n’est ni le mien ni celui du Gouvernement ; nous verrons ce qu’en diront les Français !

Mesdames, messieurs les sénateurs, le texte que vous vous apprêtez à rejeter consacre la réalité des chiffres et des faits : en quatre ans, nous avons remis à flot la sécurité sociale, ce qui est source de confiance collective. Ce redressement des comptes sociaux, nous ne l’avons pas fait payer aux patients ni aux professionnels de santé ; nous l’avons obtenu grâce à des réformes de fond et à un engagement collectif : c’est dans cette voie que nous entendons poursuivre !

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