Je tiens avant toute chose à vous remercier, monsieur le ministre, d’avoir porté ce projet de loi devant le Parlement après une période de concertation que vous avez voulue. Ce texte était attendu, la précédente loi sur la montagne datant de 1985. En trente ans, le monde a changé.
La France s’est urbanisée. Elle compte 10 millions d’habitants de plus, alors que certains territoires de moyenne montagne ont continué de se dépeupler et sont aujourd’hui en décrochage.
La mondialisation des marchés a fragilisé l’agriculture de montagne, et les services publics ne sont plus toujours au rendez-vous.
La fragilisation de nos ressources naturelles a fait apparaître des enjeux environnementaux majeurs sur lesquels la montagne a un rôle essentiel à jouer.
Autre mutation : l’arrivée du numérique a amorcé une transformation en profondeur de notre société.
Alors, oui, un acte II de la loi Montagne était nécessaire pour adapter le cadre législatif aux enjeux du XXIe siècle. Il s’agit d’un rendez-vous crucial. Toutefois, monsieur le ministre, ce rendez-vous ne sera réussi que si nous avons le courage d’inscrire dans le marbre de la loi les avancées concrètes, précises, dont la montagne a besoin. §Or, sur plusieurs sujets essentiels, le texte ne répond que très partiellement aux enjeux. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé une série d’amendements frappés au coin du bon sens et inspirés par la réalité du terrain telle que la vivent au quotidien les élus de la montagne, afin de faire progresser encore ce projet de loi. Je retiendrai quatre exemples.
Premier exemple : l’agriculture.
L’agriculture d’altitude supporte des coûts de production qui ne sont plus compatibles avec les contraintes de la compétitivité mondiale. Il est donc urgent de réorienter notre modèle agricole de moyenne montagne. Il faut mieux soutenir les productions de qualité attachées aux terroirs, jouer la différentiation pour gagner en valeur ajoutée. C’est le seul modèle d’avenir pour l’agriculture de montagne.
Nous proposerons également plusieurs amendements visant à favoriser une plus grande reconnaissance du rôle majeur de la forêt en montagne, tant par les emplois créés dans cette filière que par les équilibres écologiques auxquels elle participe.
Deuxième exemple : la téléphonie mobile et l’accès au très haut débit.
Aucune raison technique, aucune raison financière ne peut justifier que l’on exclue des centaines de milliers de nos concitoyens de l’accès à ces services essentiels au développement économique, à la sécurité, à la vie quotidienne ni que nous abandonnions, in fine, une partie du territoire national à la désertification. S’il est un domaine dans lequel il ne faut rien céder, dans lequel il faut savoir faire preuve de volontarisme politique et de fermeté envers les opérateurs, c’est bien celui de la couverture numérique et de la téléphonie mobile. Nous défendrons des amendements concrets pour atteindre cet objectif, notamment pour modifier les critères des zones blanches, qui ne correspondent pas du tout aux besoins du terrain.
Troisième exemple : l’accès à des services publics de proximité et de qualité.
Altitude, routes enneigées, habitat dispersé, faible densité de population, l’accès aux services en montagne ne peut en aucun cas se mesurer en kilomètres ou, pire encore en seuils de rentabilité, ni se comparer à des ratios nationaux. Des critères adaptés doivent permettre d’offrir à ces territoires des services de proximité et de qualité dans des domaines aussi prioritaires que l’éducation et la santé, par exemple. L’État doit être le garant de cette égalité d’accès aux services essentiels. Là aussi, nous ferons des propositions concrètes.
Quatrième exemple : les moyens accordés aux territoires de montagne.
Dans ce domaine aussi nous voulons renforcer votre projet de loi pour mieux tenir compte des surcoûts supportés par les collectivités de montagne pour l’organisation des services, l’entretien de la voirie, la construction, le fonctionnement des bâtiments publics… Je pourrais encore citer bien d’autres exemples. La DGF, tout comme d’autres dotations de l’État, doit mieux prendre en compte ces contraintes. En outre, cela a été dit, une adaptation des normes à la réalité de la montagne est absolument nécessaire. Nous proposerons plusieurs amendements en ce sens.
Monsieur le ministre, considérez positivement nos amendements, afin que, à l’image du regard que nous portons aujourd’hui sur la loi fondatrice de 1985, nos successeurs, dans trente ans, citent en exemple la loi de 2016, parce qu’elle aura contribué à inscrire la montagne française dans la société du XXIe siècle.