Intervention de Jacqueline Alquier

Réunion du 31 janvier 2006 à 16h00
Parcs nationaux et parcs naturels marins — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Jacqueline AlquierJacqueline Alquier :

En effet, ce n'est pas un délai de quelques semaines qui changera l'avenir de la préservation de la nature dans notre pays !

Par ailleurs, recourir à la procédure d'urgence, pour ce texte comme pour d'autres, c'est nier l'apport du travail parlementaire qui, aux termes de la Constitution, se déroule normalement au travers de deux lectures dans chaque assemblée.

Il faut trouver la bonne manière de concilier les exigences d'une politique nationale ambitieuse de conservation de la nature et la prise en compte des aspirations des collectivités locales et des populations. Qui mieux que la représentation nationale peut tenter cette conciliation entre des intérêts parfois divergents ?

De plus, comme le rappellent encore les auteurs du dernier rapport du Sénat, la déclaration d'urgence n'a le plus souvent aucune incidence sur le délai de parution des décrets d'application. En ce cas, à quoi bon y recourir ?

Madame la ministre, nous voulons bien parler d'urgence, car il en existe. L'adoption de la loi sur l'eau en est une. Dois-je rappeler quel sort le Gouvernement lui réserve ? Le projet de votre prédécesseur a été déposé sur le bureau du Sénat le 10 mars 2005, examiné dans la foulée et transmis à l'Assemblée nationale, qui, presque un an plus tard, ne l'a toujours pas examiné.

S'agissant du patrimoine naturel, la véritable urgence est la définition d'une politique ambitieuse dans ce domaine, et il est vrai que les parcs nationaux y ont pleinement leur place.

Cette politique est d'autant plus nécessaire que les risques qui pèsent sur le patrimoine naturel s'accroissent. En effet, les analyses menées sur la biodiversité sont alarmantes. Ainsi, pour la seule France métropolitaine, quatre cent quatre-vingt-six espèces ou sous-espèces végétales sont en sursis, 19 % des vertébrés ont disparu ou sont gravement menacés, 50 % des zones humides ont été détruites dans les dernières décennies. Or la première cause de cette perte de biodiversité est la destruction ou la modification des habitats naturels.

La perte de la biodiversité est un des enjeux majeurs du siècle à venir. L'Europe a pris l'engagement de la stopper à l'horizon de 2010, mais ce n'est pas avec la publication de la stratégie nationale pour la biodiversité et ses plans d'action sans mesures concrètes que nous répondrons à cette nécessité !

Votre prédécesseur, madame la ministre, avait promis un texte fondant une nouvelle politique du patrimoine naturel en faveur de la biodiversité. Où en est-il ?

Certes, la politique des parcs nationaux apporte sa pierre à l'édifice, mais comment assurer concrètement une telle construction alors que le ministère de l'écologie fait face à un manque de moyens criant ?

Madame la ministre, vous avez pu sauver in extremis la part de votre budget pour 2006 consacrée à la gestion des milieux et à la biodiversité, mais ce budget, malgré vos promesses, est en régression par rapport à celui de 2005. Qu'en sera-t-il en 2007 ?

Comment, dès lors, maintenir le même niveau d'exigence pour les parcs actuels ? Comment prétendre créer de nouveaux parcs nationaux ? Qui payera ?

Aux termes de la stratégie nationale pour la biodiversité, « la gestion et la valorisation de ce patrimoine - naturel et paysager - doivent davantage être portées par les acteurs locaux ».

Madame la ministre, le gouvernement auquel vous appartenez reproche aux collectivités locales, notamment aux régions, d'augmenter les prélèvements, alors qu'elles ne disposent d'aucun moyen pour financer la politique de préservation de la nature que vous appelez de vos voeux.

Ainsi les régions apportent une contribution de plus en plus importante aux parcs naturels régionaux, car vous gelez les crédits qui leur étaient attribués. Elles aident les conservatoires régionaux d'espaces naturels, organismes associatifs qui, sur le terrain, protègent et gèrent plus de 74 000 hectares. Elles participent au financement des actions de gestion des sites Natura 2000. Et je ne parlerai pas de la région Midi-Pyrénées, qui concourt à la mise en valeur de la zone périphérique du parc national des Pyrénées.

Les régions sont également devenues compétentes pour créer des réserves naturelles régionales, ce qui va générer de nouvelles dépenses.

Pour l'ensemble de cette politique, aucune ressource n'a été affectée aux régions. On peut alors craindre le pire pour les vaches à lait de la politique publique que constituent aujourd'hui, pour le gouvernement auquel vous appartenez, les collectivités territoriales.

Madame la ministre, nous ne pouvons continuer à prononcer de belles phrases dans cet hémicycle et faire ensuite peser la mise en oeuvre effective de cette politique sur les collectivités locales. Quand aurons-nous un débat sur le financement de la politique de préservation de l'environnement, sur la nécessité d'une fiscalité écologique et sur le niveau de cette dernière ?

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