Intervention de Bernard Fontaine

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 24 novembre 2016 : 1ère réunion
Foncier dans les outre-mer — Audition en visioconférence avec la réunion

Bernard Fontaine, président de l'Association régionale des maîtres d'ouvrage sociaux (Armos) :

Quittant la problématique du foncier agricole, je vais aborder celle du logement. Je dirige un organisme de logement social, la Société immobilière du département de La Réunion (SIDR). Tous les organismes de logement social sont également aménageurs, c'est consubstantiel à notre métier.

Il n'y a pas de concurrence directe entre le foncier à usage agricole et le foncier à usage du logement - les projets de construction de logement sont situés dans les zones constructibles. À quel endroit le foncier est-il optimal pour des projets de construction ?

La situation foncière répond à différents critères géographiques et topographiques. Dans l'Est de l'île, la situation foncière est détendue car l'offre de logements est au moins égale à la demande. Elle obéit aussi à une approche financière : le foncier est rare donc cher à La Réunion. On constate des évolutions. Le prix moyen d'un logement social était de 110 000 euros il y a cinq ans, dont 15 000 euros de foncier, alors que désormais il est de 170 000 euros, dont 45 000 euros de foncier. Cette inflation des coûts du foncier pose problème.

Oui, il faut construire la ville sur la ville. La recherche de densification urbaine répond à des objectifs clairs. Il est beaucoup plus intéressant, pour optimiser des équipements publics, des transports, des équipements scolaires, de construire les logements à proximité des aménités urbaines : c'est la tendance naturelle de tout bailleur. Mais précisément, en zone urbaine, le foncier est le plus coûteux et inaccessible, car les parcelles sont souvent éparpillées. Des économies d'échelle sont difficiles à obtenir.

Distinguons aussi le foncier brut du foncier aménagé. Le foncier brut n'est pas équipé, il n'est pas connecté aux équipements de voirie, de réseau ou de distribution, à proximité des grandes fonctionnalités urbaines - administrations, écoles... Quelle est la meilleure politique de production de foncier aménagé ? La problématique du foncier est inséparable de celle de l'aménagement et du logement. Une des plus grandes difficultés des bailleurs sociaux est de disposer de foncier aménagé, parce que c'est la façon la plus intelligente et la plus efficace financièrement de produire du logement.

En zone urbaine, à Saint-Denis, Saint-Pierre ou Saint-Paul, le prix du foncier est prohibitif, de 1 000 euros le mètre carré, contre 100 euros le mètre carré dans des zones détendues. Nous aurions intérêt financièrement à construire dans les zones détendues, mais pas commercialement car nos logements resteraient vacants. Il faut surmonter cette contrainte de coût.

Nous avons d'autres contraintes structurelles : les architectes-conseils de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) - ou les architectes des bâtiments de France si le terrain est à proximité d'un bâtiment classé - nous imposent des règles qui renchérissent nos opérations. Les collectivités territoriales nous demandent moins de densité, en raison du rêve réunionnais d'une « case à terre » pour une population essentiellement rurale. De grands ensembles urbains seraient voués à l'échec. En dehors de Saint-Denis, les logements comptent 3 à 4 étages au maximum.

Existent aussi des contraintes réglementaires, comme l'accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, dans une île montagneuse où la topographie renchérit le coût de la construction, avec des terrains en forte pente à terrasser.

On ne peut aborder la question du logement et du foncier sans celle de la politique d'aménagement du territoire, clé pour une politique agricole harmonieuse, et pour une politique de l'habitat et de l'urbanisme la plus efficace possible.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion