Intervention de Vincent Capo-Canellas

Réunion du 19 décembre 2016 à 16h00
Loi de finances pour 2017 — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

Photo de Vincent Capo-CanellasVincent Capo-Canellas :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, madame la présidente de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, lors de la première lecture du projet de loi de finances pour 2017, j’avais défendu l’idée que ce projet de budget était déjà largement virtuel. Sur la base des analyses du Haut Conseil des finances publiques, j’estimais en effet, monsieur le secrétaire d'État, que l’atteinte de vos objectifs affichés en matière de réduction des dépenses était improbable, et qu’en matière de déficit public, elle était incertaine.

En trois semaines, ce projet de loi de finances est passé de virtuel à très difficilement soutenable. En effet, vous ne pouvez l’ignorer, deux instituts des plus sérieux ont révisé les prévisions de croissance pour 2016 et 2017. Selon l’INSEE, la croissance pour 2016 ne sera plus que de 1, 2 %, confirmant ainsi le ralentissement de l’économie française cette année. Et selon les prévisions que la Banque de France vient de publier, la croissance de l’économie française ne dépassera pas les 1, 3 % en 2017.

Ce ralentissement de l’économie française se confirme malheureusement avec la fin de la « conjoncture astrale d’alignement des planètes », dont vous n’avez pas su profiter comme vous auriez dû. En effet, les risques d’une remontée des taux d’intérêt, la hausse du prix du pétrole et un taux de change moins favorable pèseront lourdement sur notre économie et nos finances publiques, d’autant que nos comptes publics n’ont pas été suffisamment assainis durant la mandature actuelle.

Ces chiffres viennent confirmer, s’il le fallait, les analyses de la commission des finances du Sénat et de notre rapporteur général sur les prévisions plus qu’optimistes du Gouvernement, et donc sur la surestimation des recettes l’année prochaine. Ils contredisent les propos, assénés encore une fois avec force et talent dans cet hémicycle tout à l’heure par monsieur le secrétaire d'État – c’est son métier de le faire –, sur la sincérité de ce projet de budget construit avec une prévision de croissance de 1, 5 %.

Forts de ces chiffres, nous pouvons l’affirmer sans crainte d’être contredits : la prévision de croissance sur laquelle est assise la construction de ce projet de loi de finances pour 2017 nous semble plus qu’improbable, et l’atteinte d’un déficit à 2, 7 %, tel qu’il a été annoncé par le Gouvernement, n’est plus seulement incertaine ; elle devient impossible. Il est désormais établi que, sauf miracle, le déficit public ne repassera pas sous les 3 % du PIB en fin de mandat, alors qu’il devait y parvenir dès 2013, et que, contrairement à la promesse présidentielle qui avait été faite, les comptes publics ne seront pas revenus à l’équilibre en 2017.

Il est désormais quasiment acquis que le déficit public dépassera largement les 3 % l’année prochaine et qu’il sera certainement plus proche des 3, 5 %, validant ainsi les calculs de notre rapporteur général, sur la base d’un budget truffé de surestimations de recettes, de sous-estimations de dépenses et de la surestimation de certaines économies, qui nous paraissent irréalistes, conduisant ainsi à environ 12 milliards d’euros de manque à gagner pour le budget de l’État en 2017.

L’insincérité de ce budget ou, à tout le moins, celle des prévisions sur lesquelles il est construit, n’est désormais plus à démontrer. Nous l’avions dit lors de la première lecture, cette construction budgétaire nous paraît faussée et fortement marquée par les échéances électorales. Notre rapporteur général a dénoncé, à raison, un « budget de campagne ».

Cela explique que ce projet de loi de finances se caractérise par l’absence d’économies significatives et le relâchement du Gouvernement dans les efforts de maîtrise des dépenses, alors que notre ratio de dépenses publiques est parmi les plus élevés au monde.

Pour l’année prochaine, le Gouvernement constate certes des baisses de dépenses, mais nous estimons qu’il n’en est guère responsable, pas plus que de la diminution de la charge de la dette ou des prélèvements sur recettes au profit de l’Union européenne. Au contraire, on cherche en vain les baisses de dépenses et le fameux plan d’économies de 50 milliards d’euros qui avait été promis.

On additionne les cadeaux fiscaux distribués à diverses catégories de Français. C’est ainsi que s’explique notamment la hausse des dépenses de l’État, due principalement à celle de la masse salariale, liée aux créations de postes de fonctionnaires, aux mesures catégorielles et à l’augmentation du point d’indice.

Par ailleurs, toujours en matière de cadeaux fiscaux, ce projet de loi de finances présente une nouvelle baisse de l’impôt sur le revenu pour une partie des Français, afin de faire oublier, si possible, le matraquage fiscal du début de mandat. Cela ne suffira pas à leur faire oublier l’augmentation de la pression fiscale qu’ils ont subie tout le long du quinquennat, de l’ordre de 31 milliards d’euros entre 2012 et 2016 – un véritable choc fiscal pour les ménages !

Comme le confirme la commission des finances du Sénat, il n’y aura pas eu de baisse des prélèvements obligatoires sur le mandat, ceux-ci se situant – faut-il le rappeler ? –, à un niveau record.

Au contraire, notre système fiscal se sera encore complexifié à coups de réformes sectorielles et contradictoires, concentrant encore plus l’impôt sur les classes moyennes. Et je n’évoque pas ici la réforme du prélèvement à la source, véritable usine à gaz, que notre rapporteur général a déjà longuement disséquée en séance publique et en commission.

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