Intervention de André Gattolin

Réunion du 19 décembre 2016 à 16h00
Loi de finances pour 2017 — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Tout cela fait penser à l’ultime effort du sprinter qui jette son torse en avant lors du franchissement de la ligne d’arrivée, histoire de grappiller quelques centièmes de seconde, sans se soucier de son équilibre, puisque sa course est terminée !

Toujours est-il que cette nouvelle et opportune mesure, qui s’inscrit bien plus dans le registre du dérisoire que du pathétique, ne doit pas occulter l’essentiel : contrairement à ce que la majorité sénatoriale s’efforce de faire accroire, ce gouvernement a amélioré les comptes publics. Le fait est incontestable : souvenons-nous que le déficit du dernier budget exécuté par le gouvernement de François Fillon, celui de 2011, s’élevait à 5, 2 % du PIB ! Pour 2016, il est « réaliste », selon le Haut Conseil des finances publiques, de considérer que le déficit s’établira à 3, 3 %. Chers collègues de la majorité sénatoriale, que voulez-vous de plus ?

Certes, pour 2017, il y a un doute ; mais c’était une raison supplémentaire de débattre du budget !

Au reste, chers collègues du groupe Les Républicains, c’est plutôt vous, à ce qu’on peut lire dans la presse, qui avez quelque chose à prouver en matière de finances publiques…

D’abord, parce que vos chiffres sur la réduction promise du nombre de fonctionnaires paraissent assez irréalistes, sauf à vouloir casser le statut de la fonction publique, mais alors il faudrait l’annoncer.

Ensuite, parce que, sur la sécurité sociale, constatant que même votre électorat a besoin de se soigner, votre candidat, qui affichait encore sa radicalité lors de la primaire du mois dernier, est déjà en train de rétropédaler.

Enfin, parce que, en matière de comptes publics, comment peut-on comprendre, avec un déficit certifié à 3, 5 % en 2015, que vous prévoyiez une dégradation à 4, 5 % en 2018 ? N’est-ce pas là la forme la plus aiguë de l’électoralisme : celle qui consiste à promettre ce que l’on sait pertinemment ne pas pouvoir tenir ? En période de crise profonde de notre modèle de développement, laisser penser que la croissance et le plein emploi pourront durablement revenir est bien davantage qu’un leurre : c’est une incitation au pire du populisme !

Depuis quatre ans, je conserve chez moi, près de mon téléviseur – en prévision des plages de publicité qui persistent sur nos chaînes publiques… –, un petit opuscule intitulé, fort poétiquement : « Le changement c’est maintenant ; Mes 60 engagements pour la France ». Je viens juste d’y ajouter une autre lecture : « Pour vous ; Fillon 2017 ». Aussi vif que soit le contraste de leurs titres, l’un très bavard, l’autre particulièrement elliptique, ces deux documents ont en commun d’être très instructifs.

Ainsi, les prévisions de croissance pour le quinquennat à venir – celui que vient de s’écouler et celui qui est devant nous – sont, à cinq ans d’écart, quasiment similaires : un pourcentage en hausse régulière, qui se stabilise, comme par miracle, au-dessus de 2 % les deux dernières années. Preuve que, même démenti par les faits, le retour d’une croissance durable reste la référence incontestée de la vieille pensée productiviste, qu’elle soit de droite ou de gauche. Au fond, c’est peut-être cela, la vraie foi…

En conclusion, mes chers collègues, nous ne vous donnerons pas notre avis sur ce projet de loi de finances, puisque, visiblement, cela n’intéresse pas le Sénat. Toujours est-il que nous voterons contre, résolument contre, le refus de débattre signifié par la motion tendant à opposer la question préalable !

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