Intervention de Hervé Poher

Réunion du 10 janvier 2017 à 21h30
Où va l'état territorial ? le point de vue des collectivités — Débat organisé à la demande de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation

Photo de Hervé PoherHervé Poher :

Tout cela pour dire que les relations entre l’État et les élus locaux sont bien souvent complexes.

C’est d’ailleurs bien normal, car l’État a pris un malin plaisir à complexifier les choses en cherchant à mettre dans un même creuset la décentralisation, la déconcentration, la RGPP, l’obsession stérilisante des économies budgétaires et l’inconfort permanent des réformes territoriales. Tout cela mélangé, on perd un peu de lisibilité. Or les élus, en particulier territoriaux, ont horreur de ne pas y voir clair !

Pour autant, rassurez-vous, monsieur le ministre, je ne tomberai pas dans la critique facile, car les relations entre les collectivités territoriales et l’État sont bien plus nuancées et bien plus complémentaires qu’il n’y paraît.

Parmi les « us et coutumes du peuple des élus locaux », on observe trop souvent une mauvaise habitude consistant à taper sur l’État. C’est bien pratique : « C’est la faute de l’État, de la loi, ce n’est pas moi ! ». Nous avons tous usé et abusé de cette façon de faire. Cela étant, ce comportement est normal : nous, les élus, passons régulièrement à la toise électorale. Alors, quand les choses vont bien, on en tire les bénéfices. En revanche, quand l’ambiance est orageuse, on cherche un vilain responsable. De ce point de vue, l’État est quand même un coupable bien pratique.

Heureusement, nous avons bien souvent en face de nous des préfets et des sous-préfets qui ont le sens du devoir et le sens de l’État, mâtiné d’un peu de diplomatie, ce qui ne gâche rien. Bref, nous avons affaire à un corps préfectoral de haut niveau.

Avant de décider s’il faut féliciter ou critiquer l’État, l’important est de savoir ce que l’on attend de lui dans un pays décentralisé, dans un pays où les collectivités territoriales ont de plus en plus de compétences au fil des réformes, dans un pays où le cerveau est bien souvent « anar », mais où le cœur reste étrangement jacobin.

Le rôle de l’État dans sa composante déconcentrée est triple : il doit être commandeur, conseiller et complice. Commandeur, parce que c’est lui le gardien de la loi. Conseiller, parce que nul n’est plus à même que l’État de faciliter l’application de la loi. Complice, enfin, car, l’alliance entre les représentants de l’État et ceux des collectivités locales permet bien souvent de trouver une intelligence pratique ou une pratique intelligente de cette loi.

Cependant, cet exercice si difficile atteint quand même ses limites lorsque l’obsession budgétaire conduit à des sous-effectifs très handicapants pour l’image et l’efficacité de l’État. J’ai cru lire dans un texte traitant de la diminution des effectifs que l’on remplaçait « la quantité par la qualité ». Je veux bien le croire, mais tout être humain, même doté de beaucoup de qualités, a tout de même ses limites. Alors, réduire les effectifs pour telle ou telle raison, soit ! Mais entre le soi-disant trop-plein et la disette, il y a un juste milieu !

Autre remarque : il est également possible d’avoir recours à des transferts de compétences pour alléger la charge de l’État. Seulement, cela doit se faire à condition, bien entendu, de réaliser en parallèle un transfert de moyens, en particulier financiers. Et que l’on ne vienne pas nous reprocher ensuite que les collectivités territoriales ont trop embauché ! Je ne connais aucune collectivité locale qui embauche pour le plaisir de dépenser de l’argent !

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