Les aménageurs communiquent beaucoup plus sur la compensation, à l'aide de belles brochures, que sur l'évitement. Une comptabilisation des hectares évités aurait un effet incitatif. De plus, la communication des aménageurs ignore souvent les actions de compensation engagées par les agriculteurs eux-mêmes.
Le centre commercial Atoll Angers a enseveli un hectare de zone humide. L'aménageur proposait une compensation à hauteur de seize hectares ; mais, après des échanges avec la chambre d'agriculture et les associations de défense de l'environnement, il a été jugé préférable de mettre en place quatre hectares de zone humide dans de meilleures conditions. Le résultat a satisfait toutes les parties prenantes.
La loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture a introduit le concept de compensation collective agricole. L'indemnisation ne suffit pas toujours pour des opérations susceptibles de déstructurer l'économie agricole. Ainsi, 25 hectares en moins d'emprise foncière pour la coopération ou le négoce se traduisent par une baisse de chiffre d'affaires et des surcoûts logistiques. La compensation collective agricole oblige l'aménageur à compenser aussi cela. Ainsi, un rééquilibrage entre compensation de la biodiversité et compensation du potentiel de production peut être envisagé, permettant des études d'impact plus globales et fidèles à la réalité.
Pour être efficace, la compensation doit s'inscrire dans la durée. Pour cela, elle doit être rémunératrice. Les agriculteurs ne sont pas habitués à une indemnisation à juste valeur... Dans le cadre du contrat d'agriculture durable (CAD), successeur du contrat territorial d'exploitation (CTE), les surcoûts liés aux mesures agro-environnementales sont calculés et l'indemnisation est fixée à un niveau attractif pour l'agriculteur. Il convient d'associer les acteurs agricoles et les experts qui les représentent très en amont, dès la phase du calcul de l'indemnisation.
Les mesures de protection pour le grand hamster d'Alsace ont conduit les agriculteurs à convertir des hectares de maïs en hectares de blé ou de prairie. Le coût de ces conversions est facile à calculer. L'agriculteur qui l'accepte sera plus enclin à l'inscrire dans la durée si la compensation financière est à la hauteur. C'est donc avant tout une question de moyens mobilisés.
Comme pour les circuits courts, on veut à la fois l'apport écologique et un prix au rabais. Or la biodiversité a un prix - et celui qui doit le payer est le demandeur de biodiversité. Les espaces que l'on veut protéger ont une valeur ; il est d'autant plus opportun de le rappeler que le chiffre d'affaires agricole a baissé de cinq milliards d'euros l'année dernière.