Intervention de Hervé Maurey

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 11 janvier 2017 à 9h35
Déplacement de la commission en californie — Communication

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey, président :

Ce déplacement était l'un des deux principaux déplacements de l'année 2016 pour notre commission, après celui du mois de juin en Arctique. Il s'est déroulé du 28 août au 2 septembre dernier et notre délégation comprenait cinq sénateurs, Nicole Bonnefoy, Louis-Jean de Nicolaÿ, Michel Raison, Jean-Yves Roux ainsi que moi-même.

Pourquoi la Californie ? Tout simplement parce que cet État, tiré par une industrie de la tech en pleine croissance et dont le PIB dépasse désormais celui de la France, s'inscrit depuis longtemps dans une tradition environnementaliste. La Californie se veut en effet un exemple pour les autres États américains. Sous l'impulsion du gouverneur Brown, elle a pris un grand nombre d'initiatives et créé diverses coalitions nationales et internationales pour démultiplier son action en faveur du développement durable.

Nous l'avions d'ailleurs constaté à l'occasion de la COP 21, la Californie était venue en force, pour soutenir les négociations. Lors des journées de l'Union interparlementaire des 5 et 6 décembre 2015, qui avaient eu lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat, deux interventions avaient été particulièrement remarquées, celle d'Arnold Schwarzenegger, ancien gouverneur de Californie (2003-2011) et président fondateur de R20 Regions for Climate Action, et celle de Kevin de León, président du Sénat de Californie.

En parallèle, la Californie a été à l'origine, avec le Bade-Wurtemberg, d'un mouvement d'engagements au niveau territorial signé par plusieurs régions françaises, comme l'Alsace, l'Aquitaine ou les Pays de la Loire.

Si la Californie se veut un État pionnier en matière de lutte contre le réchauffement climatique, la protection de l'environnement et le développement durable, c'est parce que ces préoccupations sont une question de survie. La forte croissance économique et démographique entraîne une exploitation intensive des ressources et du milieu naturel, qui n'est pas soutenable à terme. Dans beaucoup de domaines, les conséquences s'en font déjà sentir sur le quotidien des habitants. Nous avons essayé de comprendre comment l'État de Californie modifie progressivement son modèle de développement pour répondre à ces défis, auxquels nous serons tous confrontés tôt ou tard.

Nous avons donc démarré notre visite par une série de rencontres avec les autorités politiques de l'État de Californie et de San Francisco, afin de mesurer l'implication des autorités publiques sur ces sujets. Nous avons d'ailleurs été agréablement surpris de voir à quel point la France était perçue comme une référence dans ces domaines, notamment avec les lois de transition énergétique et de reconquête de la biodiversité, qui sont étudiées par nos partenaires étrangers, et qui y trouvent de l'inspiration.

À Sacramento, nous avons rencontré le président du Sénat, Kevin de León, qui s'est dit très impressionné par la qualité de l'organisation et l'accueil qui lui avait été réservé lors de la COP 21. Il souhaite de nouveau se rendre à Paris en 2017, et j'espère que nous pourrons ainsi tisser des liens solides avec le Sénat de Californie. Nous avons échangé sur plusieurs initiatives californiennes en matière de lutte contre le réchauffement climatique ainsi que sur les suites à donner à la signature de l'accord de Paris.

Nous avons ensuite examiné ces initiatives en détail à l'occasion de plusieurs échanges avec les agences de l'État de Californie chargées des questions environnementales et d'énergie : l'agence de l'eau, l'agence pour la protection de l'environnement, qui est l'équivalent du ministère de l'environnement californien, et l'agence en charge de l'énergie.

Nos interlocuteurs ont souligné que la Californie était déjà confrontée à certains effets très visibles du réchauffement climatique : hausse des températures, sécheresse prolongée, irrégularité des précipitations. Nous avons longuement abordé la « crise de la sécheresse » qui sévit depuis cinq ans, même s'il a plu cet hiver pour la première fois. Les cours d'eau et lacs ont atteint des niveaux préoccupants et la crainte d'une pénurie d'eau est amplifiée par le pompage excessif généralisé des sols poreux, à des fins agricoles notamment. Les forêts sont plus vulnérables que jamais aux incendies. Les terrains s'affaissent avec des conséquences préoccupantes pour les infrastructures comme les ponts, les routes, les aqueducs, les puits et les digues. Dans certaines villes, les habitants doivent apprendre à vivre sans eau potable. Le dessèchement a d'ores et déjà coûté 17 000 emplois et plus de 2 milliards de dollars à l'économie californienne.

En janvier 2014, le Gouverneur Jerry Brown a décrété l'état d'urgence et lancé un plan d'action quinquennal, le California Water Action Plan, qui comprend un volet financier, des mesures de réduction de 25 % de la consommation d'eau, et la construction de nouvelles infrastructures. Les mesures de restriction touchent directement la population : réduction ou interdiction d'arroser les pelouses, hausse du prix de l'eau, nouvelles normes concernant le débit des robinets et des toilettes. Les législateurs travaillent également à l'élaboration d'une réglementation sur le pompage de l'eau. Sur ce point, les autorités envient nos schémas directeurs d'aménagement et de gestion de l'eau : en Californie, les droits anciens hérités de la ruée vers l'or dessinent une carte de l'eau extrêmement morcelée et complexe, qui rend juridiquement difficile toute gestion centralisée au niveau de l'État. À cela s'ajoute la nécessité pour l'État californien d'arbitrer entre les différents utilisateurs - particuliers, agriculteurs et industriels -, en tenant notamment compte du dynamisme du secteur agricole, qui pèse environ 54 milliards de dollars.

En ce qui concerne les aspects énergétiques, la Californie a fait le choix d'une sortie du nucléaire.

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