Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, estimant, à juste titre, que le développement de l’enseignement supérieur est un élément déterminant pour l’avenir de l’Union européenne et de ses États membres, le texte que nous examinons milite pour que les dépenses publiques afférentes ne soient pas prises en compte dans l’estimation par la Commission européenne du déficit public.
Les signataires de la proposition considèrent qu’une telle disposition devrait permettre à l’Union européenne de parvenir à l’objectif de 2 % de dépenses publiques en faveur de l’enseignement supérieur.
C’est un objectif de l’Union européenne plusieurs fois rappelé dans le cadre du processus de Bologne en 1999, de la stratégie de Lisbonne en 2000 et de la stratégie Europe 2020. C’est devenu un objectif des États membres, ce que la France a prouvé avec les travaux du comité STRANES, validés par le Gouvernement en 2015. J’ai salué le rapport lors de sa présentation devant la commission de la culture.
L’enseignement supérieur dans l’Union européenne compte 20 millions d’étudiants, dans environ 4 000 établissements, et emploie 1, 5 million de personnes. Les besoins de financement sont élevés, en raison d’une forte augmentation du nombre d’étudiants au sein des pays de l’OCDE. Selon les estimations, ce nombre devrait doubler en 2030.
L’action de l’Union européenne reste cependant limitée, l’éducation n’étant en effet qu’une de ses compétences d’appui. Elle s’est cependant traduite par de grands programmes d’appui, le plus connu étant Erasmus, qui fête ses trente ans. Pour la période 2014-2020, Erasmus + qui regroupe l’ensemble des anciens programmes de l’Union européenne en faveur de l’éducation, de la formation et de la jeunesse, est ainsi doté d’un budget de 14, 7 milliards d’euros, soit un montant en augmentation de 40 %, ce dont nous pouvons nous réjouir.
La dépense publique en matière d’enseignement supérieur dans l’Union européenne plafonne à 1, 6 % du PIB. Il est donc urgent de faire évoluer les modalités de financement de l’enseignement supérieur.
C’est la raison pour laquelle Patricia Schillinger et moi-même, corapporteurs de la proposition de résolution devant la commission des affaires européennes, avons souhaité ajouter la phrase suivante dans notre rapport : « En effet, même si la compétence éducation n’est pas une compétence principale de l’Union, compléter le cadre stratégique éducation et formation existant reste possible et même souhaitable. »
Je reste convaincue que les problématiques de l’enseignement supérieur méritent une analyse approfondie et une réflexion complémentaire.
Le rapport à mi-parcours d’Erasmus + devrait être présenté au début de l’année 2017 et pourrait donner lieu à un rapport parlementaire visant à définir une position prospective sur les enjeux, la commission des affaires européennes s’y étant engagée.
Les dépenses publiques en faveur de l’enseignement supérieur peuvent relever de deux logiques. Il s’agit en tout état de cause d’investissements et elles peuvent participer de la mise en œuvre de réformes structurelles. Aux termes de sa communication du 13 janvier 2015, la Commission européenne considère qu’un État peut déroger, dans une certaine mesure, à ses objectifs budgétaires dès lors que les dépenses constatées concourent à des investissements ou à des réformes structurelles.
Depuis la communication du 13 janvier 2015, la Commission européenne a décidé de prendre en compte de nouveaux facteurs pouvant permettre aux États de s’affranchir relativement des objectifs du pacte de stabilité et de croissance. Je pense à l’accueil des réfugiés. Les dépenses destinées à faire face à la crise des migrants ne devraient ainsi pas être intégrées à l’évaluation des soldes budgétaires pour les années 2015 et 2016 dans le cadre de la procédure du semestre européen.
Le président de la Commission européenne a estimé, de son côté, le 18 novembre 2015 que « les dépenses de sécurité de la France devraient être exclues des calculs entrant dans le champ des règles de l’Union européenne sur les déficits ». Plus récemment, la Commission européenne a pris en compte les dépenses liées aux tremblements de terre qui ont fragilisé l’Italie en octobre et en août derniers.
La multiplication de ces dérogations ne suscite pas l’adhésion unanime du Conseil.
Des interrogations subsistent également quant à la façon d’évaluer les réformes structurelles ou sur les limites à apporter à l’application répétée des clauses de flexibilité.
L’application de la clause d’investissement est plus encadrée : les gouvernements doivent désormais soumettre des informations détaillées sur les projets d’investissements au service de réformes structurelles.
Il apparaît dans ce contexte assez délicat de proposer une nouvelle dérogation. Il convient, en outre, de relever que plusieurs observateurs jugent que les clauses sont déjà, en l’état, trop nombreuses, inefficaces et opaques. Nos collègues Fabienne Keller et François Marc avaient déjà noté cet état de fait dans leur rapport sur la phase I de l’approfondissement de la gouvernance de l’Union économique et monétaire présenté début novembre.
La proposition de résolution européenne jointe au rapport que nous avons alors adoptée à l’unanimité relève la multiplication, depuis 2015, des clauses de flexibilité au pacte de stabilité et de croissance, cette multiplication contribuant indirectement à renforcer l’opacité autour de ce dispositif sans pour autant que ces clauses apparaissent toujours efficaces. Le texte appelait, de fait, à une clarification politique dans ce domaine.
Le débat qui nous occupe apparaît toutefois légitime et je rejoins Mme Gonthier-Maurin : il s’agit d’un investissement nécessaire à l’avenir.
Néanmoins, il importe de revenir sur certaines questions et de procéder à un examen plus approfondi sur les dépenses de l’enseignement supérieur. Il faut rechercher de nouveaux moyens pour financer cet enseignement. Certains établissements font déjà appel, avec succès, à des financements privés. Il conviendrait de mener une réflexion en ce sens et de réfléchir, notamment, à une participation des entreprises dans une perspective de formation et d’employabilité.
Pour conclure, compte tenu des réserves qui ont été émises tant par la commission des affaires européennes que par la commission de la culture, le groupe Les Républicains n’adoptera pas cette proposition de résolution européenne.