Le 12 mars 1946, devant l’Assemblée nationale constituante, Aimé Césaire déclarait : « L’intégration réclamée ne constituerait une improvisation. Ce serait l’aboutissement normal d’un processus historique et la conclusion logique d’une doctrine. »
La loi de départementalisation a constitué une étape fondamentale sur le long chemin de l’égalité. L’article 73 de la Constitution de 1946 posa le principe de l’identité de régime entre les départements d’outre-mer et les départements métropolitains. Dans les faits, il a fallu obtenir au cas par cas et non sans difficultés l’application d’un certain nombre de mesures d’égalisation.
Sept décennies plus tard, le bilan est insatisfaisant, les outre-mer accusant de sérieux différentiels si l’on se réfère aux indicateurs de développement humain.
Ainsi, en 2012, le PIB par habitant représentait en moyenne 62 % de celui de l’Hexagone. Selon l’enquête Emploi 2013, le taux de chômage des jeunes se situe entre 37, 4 % à Mayotte, 60, 6 % à La Réunion et 68, 2 % en Martinique, alors qu’il est jugé alarmant à 24, 6 % dans l’Hexagone. En 2013, 46 % des foyers allocataires ultramarins dépendaient complètement des prestations versées par les caisses d’allocations familiales pour vivre, contre 19 % en métropole. Le taux de pauvreté est entre trois et quatre fois plus élevé outre-mer que dans l’Hexagone. Le déficit de logements et l’importance de l’habitat insalubre, l’illettrisme touchent proportionnellement deux fois plus de personnes que dans l’Hexagone – 14 % contre 7%.
Ces éléments légitiment l’ambition du Président de la République et du Gouvernement, conscients que l’égalité réelle reste encore à construire. Je me félicite donc de l’examen de ce projet de loi, qui traduit la détermination du Gouvernement d’atteindre, sur une génération, une égalité des chances pour les Ultramarins et d’apporter des réponses aux enjeux auxquels l’outre-mer demeure confrontée, en dépit des avancées enregistrées.
Tout autant que l’égalité sociale, l’égalité réelle au plan économique s’impose. Il convient de réussir ce challenge. C’est à ce prix que l’outre-mer pourra accéder à des modèles propres de développement entraînant des formes de croissance créatrices d’emplois et, par là, de sérénité sociétale.
La mise en place des plans de convergence coconstruits, relayés par des contrats de convergence, à la dimension opérationnelle, devrait autoriser des avancées déterminantes sur la voie d’un développement durable autonome. Ces mécanismes devront fédérer les instruments de planification déjà existants : contrats de plan État-régions, programmes opérationnels européens…
La réussite de cette démarche ambitieuse nous permettra d’exaucer le vœu d’Aimé Césaire d’établir une « fraternité agissante aux termes de laquelle il y aura une France plus que jamais unie et diverse, multiple et harmonieuse, dont il est permis d’attendre les plus hautes révélations ».