Le 13 avril dernier, une délégation de la commission des affaires sociales du Sénat s’est rendue à La Réunion pour rencontrer différents acteurs du domaine de la santé et du social.
Ma collègue Laurence Cohen, qui faisait partie de cette délégation, a pu constater les difficultés d’accès aux soins existant sur l’île de la Réunion, en particulier concernant l’offre de soins en matière psychiatrique, dont la situation est particulièrement problématique, et ce en dépit de l’engagement et de l’enthousiasme des équipes rencontrées à l’établissement public de santé mentale de La Réunion, l’EPSMR.
Trois séries de difficultés se cumulent en effet.
En premier lieu, les secteurs définis pour la psychiatrie publique apparaissent surdimensionnés, couvrant une population plus de deux fois plus importante qu’en métropole.
En deuxième lieu, l’offre publique est largement inférieure aux besoins, avec un taux d’équipement en hospitalisation complète inférieur de moitié à la moyenne hexagonale, alors même que celle-ci est déjà insuffisante, comme vous le savez, madame la ministre, mes chers collègues. Dans le sud de l’île, le ratio entre l’offre locale et l’offre hexagonale atteint même un rapport de un à six, et le taux d’occupation en hospitalisation à temps plein au CHU Sud Réunion est de 100 %.
En troisième et dernier lieu, l’offre privée est très limitée, et ne suffit pas à répondre aux insuffisances de prise en charge dans le secteur public. En tout état de cause, l’accès aux spécialistes libéraux peut poser problème pour une population globalement plus démunie qu’en métropole : je vous rappelle que le taux de chômage réunionnais avoisine les 27 %, et qu’un Réunionnais sur trois est bénéficiaire de la CMU-C.
Cette situation soulève divers problèmes, en termes à la fois d’égalité dans l’accès aux soins, notamment au sud de l’île, et de qualité des prises en charge, avec une difficulté à assurer le suivi des patients. Il nous a été indiqué que, en cas de saturation des capacités, aucune autre solution n’existait hormis celle de l’externement arbitraire !
On constate par ailleurs un recours aux soins psychiatriques inférieur de près de 30 % à celui qui est observé en métropole. Les équipes médicales du CHU nous ont en outre fait part de leur difficulté à engager la démarche qui devrait être celle d’un établissement de pointe, en raison des insuffisances de l’offre de base : il est ainsi très difficile de dégager suffisamment de disponibilité médicale pour l’investissement qui serait nécessaire dans la recherche, l’innovation et l’enseignement. L’absence de moyens, qui vient s’ajouter à celle qui existe dans le secteur médico-social, rend également particulièrement ardu l’engagement d’une démarche de filière avec l’ensemble des acteurs.
Enfin, l’EPSMR, qui constitue le principal acteur de la psychiatrie sur le territoire réunionnais, fait face à des difficultés financières qui ne pourront pas se résorber au cours des prochaines années.
Je ne peux que regretter l’absence dans le présent projet de loi de la santé mentale, qui constitue pourtant l’un des axes prioritaires de la déclinaison ultramarine de la stratégie nationale de santé.