Intervention de Ramon de Miguel

Commission d'enquête Frontières européennes et avenir espace Schengen — Réunion du 11 janvier 2017 à 15h00
Audition de M. Ramon de Miguel ambassadeur d'espagne en france

Ramon de Miguel, ambassadeur d'Espagne en France :

Si certaines associations n'ont pas bien fonctionné, ce n'est pas de la faute du côté européen.

Notre coopération avec les pays de ce côté de l'Atlantique, Maroc, Sénégal, Mali, a été menée de façon bilatérale, bien qu'ils partagent des frontières communes, ainsi que des intérêts communs et malgré les mouvements de populations entre ces pays ; ils préfèrent traiter et agir avec nous de façon bilatérale. Nous avons fourni d'énormes efforts à leur égard. Nous sommes passés en trois ans de 100 et quelques millions à près de 600 millions d'euros en coopération, en plus de la coopération policière et des autres moyens que nous avons mis à leur disposition.

Vous m'avez interrogé sur les moyens de Frontex, que nous soutenons. Évidemment, nous coopérons : chaque fois que les Italiens et les Grecs nous demandent des bateaux de guerre et d'autres moyens, nous les mettons à leur disposition. Mais chaque pays a sa propre politique. Les déploiements des marines italienne ou grecque répondent aux instructions qu'elles reçoivent de leur pays respectif. Notre marine et notre surveillance maritime ne ressemblent point à ce qui se passe en Italie. Dans notre Méditerranée occidentale, on débarque ceux qui sont désemparés, mais immédiatement on les retourne. Il faut une vraie politique communautaire, ce qui n'est pas une question de moyens, mais de décider ce qu'il faut faire, que chacun fasse la même chose et d'avoir la même idée des frontières extérieures.

J'ai mentionné que nous avons augmenté l'aide au développement.

L'Espagne a reçu beaucoup plus d'immigration en provenance d'Amérique latine que de n'importe quelle autre partie du monde. On ne sait guère que l'Espagne est passée de 38 millions d'habitants en 1986 à 44 millions en 2004 : en dix-huit ans, sa population a augmenté de plus de six millions d'habitants. Ce phénomène extraordinaire a coïncidé avec une période de prospérité, laquelle eut un effet d'appel, non seulement dans les pays voisins, méditerranéens et africains, mais surtout en Amérique latine, où tout le monde suit de très près ce qui se passe en Espagne. Les ressortissants de certains de ces pays n'ont pas besoin de visas pour venir chez nous. Nous avons ainsi reçu 700 000 Équatoriens, presque un demi-million de Colombiens...La majorité d'entre eux sont venus, non pas illégalement, mais de façon irrégulière. Or ils n'ont pour la plupart créé aucun problème. D'un point de vue culturel, religieux, ethnique, linguistique, ils se sont non pas même intégrés, mais tout à fait assimilés au système et n'ont provoqué aucune réaction de rejet, d'ailleurs inconnue en Espagne à l'égard de l'immigration.

Notre pays est probablement le seul d'Europe sans ghetto, sans quartier séparé. Des Équatoriens, des Marocains, des Espagnols, des Roumains, vivent ensemble, dans les mêmes blocs. Les immigrants latino-américains sont très à l'aise dans le pays, se portent très bien, et les gens les aiment beaucoup. On les connaît très bien. En Espagne, l'accent colombien ou dominicain est bien connu. La société les a très bien acceptés. Il y a eu un flux très important d'immigrants irréguliers. Beaucoup sont partis après la crise économique, mais ils sont en train de revenir maintenant. Beaucoup ont acquis la nationalité, deux ans de résidence suffisent pour cela, d'où énormément de naturalisations.

Nous ne trouvons rien à redire sur l'immigration, car ils ont considérablement aidé le pays lorsque nous avions besoin de beaucoup de main d'oeuvre. Ils ont fortement contribué à la société espagnole. Le seul problème que nous avons est le même que vous tous : il est vraiment dommage que l'islam ne permette pas au citoyen de religion musulmane de s'intégrer davantage dans notre système. C'est la seule faille. Pour le reste, nous n'avons aucun problème d'ordre public ou social avec les minorités ethniques ou les immigrants en Espagne. Jusqu'à présent, le phénomène migratoire est plus récent en Espagne qu'en France, nous n'avons pas encore de deuxième génération, nous verrons si s'y développent les mêmes phénomènes que ceux que vous connaissez. Nous ne savons pas ce qui se passera dans trente ou quarante ans, mais jusqu'à présent les choses vont bien.

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