La DGITM a pour première mission d'écrire les articles de loi, les règlements, décrets et arrêtés qui régissent les transports terrestres, maritimes, fluviaux, ferroviaires et routiers. En plus de cette compétence de cadrage, la DGITM anime des centres d'études et siège à leur conseil d'administration. Nous travaillons en concertation avec l'Institut français des sciences et technologies des transports de l'aménagement et des réseaux (IFSTTAR) et le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (CEREMA) pour constituer des guides et des méthodes. Enfin, nous collaborons avec des établissements scientifiques comme le Muséum national d'histoire naturelle (MNHN).
Nous sommes concédant de grandes infrastructures, lorsqu'elles sont réalisées par des tiers, concessionnaires ferroviaires ou autoroutiers, par exemple. Nous sommes maître d'ouvrage pour les opérations sur le réseau routier national. Et nous sommes opérateur du réseau routier national par l'intermédiaire des directions interdépartementales des routes (DIR), structures déconcentrées du ministère qui exploitent le réseau routier national non concédé.
Les grandes infrastructures décidées et engagées dans notre pays sont intégrées dans un schéma national d'infrastructures des transports, élaboré en application de la loi Grenelle de l'environnement entre 2009 et 2011. Ce schéma a fait l'objet d'une évaluation environnementale, conformément au code de l'environnement, et un avis de l'Autorité environnementale a été rendu le 22 septembre 2010. Très exhaustif, il prévoit sur le long terme des projets qui se chiffrent à plus de 250 milliards d'euros d'investissement. En début de législature, la commission Mobilité 21, présidée par le député Philippe Duron, a engagé une sélection des projets et prévu un phasage de leur réalisation. La hiérarchisation s'est opérée selon trois échéances et quatre critères, dont le critère de performance écologique qui prend en compte l'empreinte environnementale, la contribution à la transition énergétique, les effets sur les émissions de gaz à effet de serre et le développement des transports collectifs, en application des lois visant à réduire le trafic routier.
Pour les travaux de modernisation des réseaux, chaque contrat de plan État-région fait également l'objet d'une évaluation environnementale soumise à l'avis de l'Autorité environnementale. Cette évaluation s'appuie sur un référentiel national d'éco-conditionnalité. La prise en compte de l'environnement s'intègre ainsi dans l'ensemble du processus, depuis la phase d'identification des infrastructures jusqu'à leur sélection et leur phasage dans le temps. Au fil de ces étapes, la concertation facilite l'acceptabilité globale du projet et son insertion dans l'environnement. Le processus, itératif, s'appuie sur le choix du meilleur tracé pour définir et hiérarchiser les enjeux tout en évaluant de plus en plus précisément les impacts. Une définition précise des mesures de compensation à mettre en oeuvre serait contre-productive et impossible à tenir, si elle intervenait trop en amont.
Les maîtres d'ouvrage regrettent qu'il n'existe pas de méthode d'évaluation objective des impacts et des compensations, fonctionnant sur des ratios d'équivalence écologique et laissant la place à la différenciation locale, au cas par cas ou selon les espèces. La méthode de ratios utilisée aujourd'hui n'est pas assez fine et n'est pas non plus suffisamment documentée espèce par espèce. Cette méthode d'évaluation surfacique des compensations a parfois des conséquences dommageables : elle provoque notamment des tensions foncières dans certaines zones à forte qualité agricole ou dans certaines zones périurbaines. Lorsque les ratios sont de un pour quatre, d'autres usages du sol prévalent, ce qui peut aboutir à une impossibilité matérielle de mobiliser les surfaces nécessaires.
La DGITM a engagé plusieurs études, en partenariat avec le Cerema, le Muséum, mais aussi d'autres organismes comme la DGALN. Elle a publié un guide, des rapports, des notes d'information incitant les maîtres d'ouvrage à prendre en compte les obligations environnementales et à favoriser des méthodologies homogènes au sein des services instructeurs.
Une autre difficulté vient de ce que pour garantir la maîtrise foncière des terrains nécessaires à la compensation, nous devons faire des choix sans connaître à l'avance les décisions politiques qui détermineront les infrastructures à réaliser demain. L'incertitude prévaut, dans la mesure où nous ne connaissons pas le lieu où la compensation devra s'appliquer. Il faudrait faire évoluer les outils mis à disposition des maîtres d'ouvrage, en osant aller jusqu'à l'affichage de la possibilité de recourir à l'expropriation, car parfois, les concurrences d'usage du sol empêchent de mobiliser les terrains nécessaires. Le sujet est compliqué : on ne peut pas avoir recours à l'expropriation sans une déclaration d'utilité publique (DUP). Or les terrains nécessaires à la compensation ne sont pas toujours inclus dans cette déclaration. D'autant que les terrains les plus pertinents pour la reconstruction de la biodiversité ne sont pas toujours dans la contiguïté de l'infrastructure ou de son fuseau.
La DGITM est favorable aux politiques de protection de l'environnement. Il y va de l'application des lois, de la réalisation de projets conformes aux politiques mises en oeuvre dans notre pays, et de l'acceptabilité de ces projets, trop souvent bloqués en fin de parcours. Il est indispensable de réaliser un travail en amont.
Nous sommes également favorables au développement d'une offre de compensation qui permettrait aux maîtres d'ouvrage de remplir leurs obligations de manière plus satisfaisante sur le plan environnemental. Cette offre devrait se caractériser par une plus grande souplesse pour ce qui est des critères de proximité entre le site impacté par l'infrastructure et la localisation des mesures de compensation.
Les obligations en matière environnementale sont largement décrites pour chaque projet, tant par la DUP et son annexe ERC que par les articles L. 122-1 et L. 122-14 du code de l'environnement. Pour les projets les plus importants, ces obligations figurent dans le dossier des engagements de l'État.
De nombreux projets d'infrastructures sont réalisés dans le cadre de contrats délégués, confiés à des concessionnaires ou à des partenaires privés. La responsabilité d'obtenir les autorisations administratives utiles pour réaliser le projet, qu'il s'agisse de celles à produire au titre de la loi sur l'eau ou des dérogations sur les espèces protégées, est portée par le maître d'ouvrage privé ou le concessionnaire. Ce maître d'ouvrage est alors soumis aux obligations de l'annexe ERC de la DUP, à celles qui figurent dans le dossier des engagements de l'État, ainsi qu'aux dispositions du contrat de partenariat qui prévoient des pénalités en cas de non-respect de ces obligations. Le contrôle exercé par la personne publique délégante n'a en revanche pas vocation à se substituer à la police de l'environnement qui a en charge le contrôle du respect des obligations environnementales du maître d'ouvrage privé ou délégué.
En ce qui concerne les dépendances vertes du réseau routier national non concédé dont les DIR assurent l'exploitation et la gestion, l'administration a fixé un plan d'action en faveur des insectes pollinisateurs. Elle travaille également à la diminution drastique de l'utilisation des produits phytosanitaires, avec pour objectif le zéro phyto, la lutte contre les espèces exotiques envahissantes, ainsi que le traitement de l'eau. Cette politique s'inscrit dans une démarche globale de préservation de la biodiversité sur les infrastructures de transport existantes gérées par l'État.
La restauration des continuités écologiques sur les infrastructures construites avant 2009 a donné lieu à de nombreuses études dans le but d'améliorer la connaissance et de définir des actions prioritaires d'intervention sur ces réseaux existants. Ces approches mettent en évidence la nécessité de réfléchir à la stratégie de financement de la requalification environnementale du réseau routier national à moyen terme. Cela vaut aussi pour les autoroutes concédées dont certaines ne sont pas aux normes actuelles. La DGITM a signé tout récemment une convention avec la DGALN pour permettre le cofinancement par les agences de l'eau d'opérations de restauration des continuités écologiques des cours d'eau, dits de liste 2, qui constituent une obligation légale. Un soutien similaire serait nécessaire pour des opérations de rétablissement de la trame verte et bleue sur le réseau, qui iraient au-delà des exigences réglementaires compte tenu des contraintes budgétaires qui pèsent sur le réseau.
Parmi les guides et les documents que la DGITM a établis, je citerai une note d'information sur le retour d'expérience sur les mesures compensatoires, réalisée en 2014 ; un guide didactique sur l'impact des projets d'infrastructures linéaires, publié en 2016 ; une note d'information sur le retour d'expérience sur les mesures compensatoires en zone humide, en cours de réalisation. Avec la direction de l'eau et de la biodiversité, nous avons rédigé une note de cadrage méthodologique visant à favoriser la planification des opérations de dragage et de gestion des sédiments associés sur l'ensemble du littoral. Dans la continuité du guide Espèces protégées, aménagement et infrastructures publié en septembre 2012, nous avons élaboré une étude de sécurisation juridique des projets sur les volets eau et espèces protégées, avec l'aide du CGDD et de la DGALN. Cette étude sera disponible très prochainement. Enfin, nous avons passé une convention avec le Muséum national d'histoire naturelle pour financer des travaux de recherche et développement afin de faciliter la prédiction des espèces présentes dans un secteur géographique et d'élaborer une base de données générale, comme le recommande la loi sur la biodiversité. Nous participons à de nombreuses journées d'étude, réalisons des fiches, développons des protocoles dans des domaines techniques qui nécessitent un soutien méthodologique pour les maîtres d'ouvrage.