La situation foncière en Corse est embarrassante et exige d'être assainie. C'est pourquoi il convient de légiférer et de déroger temporairement aux règles applicables sur le reste du territoire, en limitant évidemment les effets de cette dérogation aux situations foncières qui le justifient.
Nous devons avoir pour seul objectif de reconstituer une connaissance et une assise juridique solide de la situation foncière dans ces deux beaux départements. La durée du régime temporaire doit être la plus réduite possible, mais il faudra vraisemblablement compter plusieurs décennies.
Appuyons-nous sur les procédures qui sont déjà en vigueur dans notre droit civil. C'est ce à quoi s'attache la proposition de loi, notamment dans sa version amendée par notre rapporteur.
Peut-on ou doit-on cantonner ces dispositions particulières et temporaires à la Corse ? Pour ma part, j'ai de grands doutes, car cette question touche aux principes élémentaires d'égalité et d'unité du droit français. La seule raison pour laquelle on pourrait déroger à ces principes tient à l'existence d'une situation foncière spécifique qui justifierait de ne traiter que le cas de la Corse.
Mes doutes portaient jusqu'à présent sur la véritable intention des auteurs. Le désordre foncier qu'ils invoquaient pour l'ensemble du territoire, servait-il de prétexte pour intervenir en Corse ? Ou, au contraire, ce désordre correspondait-il à la réalité dans d'autres zones du territoire ? S'il existe réellement un problème de biens sans maître ou sans propriétaire connu, même à un moindre degré que celui qui a été évoqué, le seul argument que l'on puisse imaginer pour contourner le principe d'égalité tombe.
En l'état actuel de nos travaux, j'incline à penser qu'il faudrait des dispositions applicables sur l'ensemble du territoire national. Cela étant, j'ai bien conscience que l'étendue de la dérogation mériterait alors une vigilance particulière de notre part. Par conséquent, je suis d'avis d'adopter une position prudente et d'aller dans le sens de notre rapporteur.