Intervention de Alain Anziani

Réunion du 1er février 2017 à 14h30
Obligations comptables des partis politiques — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Alain AnzianiAlain Anziani, auteur de la proposition de loi :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État chargée des collectivités territoriales, mes chers collègues, l’origine de cette proposition de loi est simple, mais fracassante : il s’agit d’un emprunt russe contracté par le Front national. L’existence de cet emprunt, qui avait été révélée par la presse, a d’abord été contestée par le parti, puis reconnue par lui. Il a d’ailleurs eu tort de nier sa réalité puisqu’un tel emprunt n’est pas illégal en soi. Il pose cependant la question de la transparence des différents emprunts pouvant être souscrits par des candidats à une élection ou des partis politiques.

Lors de l’examen du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, présenté par Michel Sapin, notre collègue député Romain Colas avait déposé un amendement visant à améliorer la transparence des emprunts. Cet amendement avait été adopté à l’Assemblée nationale. Il avait néanmoins reçu un accueil moins favorable au Sénat, qui avait estimé qu’il s’agissait d’un cavalier législatif.

Le Conseil constitutionnel a effectivement considéré que ce dispositif n’avait pas de lien avec l’objet du projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique et qu’il était donc contraire à l’article 45 de la Constitution. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé la présente proposition de loi, qui reprend substantiellement les dispositions adoptées dans le cadre de la loi Sapin II.

L’article 1er vise le candidat et le candidat tête de liste à une élection. L’article 2 vise les partis ou groupements politiques. Dans tous les cas, l’obligation est la même : publier toutes les informations relatives aux emprunts contractés, notamment l’identité et la nationalité du prêteur ainsi que les différentes modalités de l’emprunt.

Il ne s’agit pas là d’une révolution puisque, vous le savez, les partis politiques doivent chaque année transmettre leurs comptes à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, y compris les informations relatives aux emprunts souscrits, mais, pour ces dernières, il n’existe pas d’obligation de publication. La Commission nationale des comptes de campagne souhaite que lui soient transmises annuellement, sous forme d’une annexe à ces comptes, les informations nécessaires à cette publication. C’est ce que nous proposons aujourd’hui.

Le rapporteur de la commission des lois, Alain Vasselle, s’est longuement interrogé, ce dont je le remercie, sur la conformité d’une telle obligation à l’article 4 de la Constitution, qui garantit le libre exercice de leur activité aux partis politiques. Cette question avait déjà été soulevée à l’Assemblée nationale, notamment par Sandrine Mazetier, et au Sénat.

Après maintes réflexions et analyses, il est apparu que le fait de rendre obligatoire la publication des informations transmises à la Commission nationale des comptes de campagne n’entravait pas le fonctionnement des partis politiques. Il y a donc un consensus, de la part des plus hautes autorités qui ont été consultées, pour admettre la constitutionnalité de cette mesure.

La question s’est également posée de savoir si l’obligation, prévue à l’article 2, de rendre publics les flux financiers entre les partis politiques était ou non conforme à la Constitution. Le rapporteur de la commission des lois a considéré que ce point pouvait soulever un véritable problème de constitutionnalité. Je préfère m’en remettre à son avis pour éviter de fragiliser le texte. Je ne m’opposerai donc pas à l’amendement qui a été déposé par François Pillet sur ce point.

Notre collègue Jean-Pierre Grand a également déposé des amendements, dont plusieurs, inspirés par les travaux de la Commission nationale des comptes de campagne, sont très intéressants. Ils sont de nature à enrichir très utilement la proposition de loi que je vous invite à adopter.

La présente proposition de loi ne concerne pas l’élection présidentielle, dont les modalités ne peuvent être modifiées que par un projet ou une proposition de loi organique. Ce sera sans doute la prochaine étape de cette discussion, dont j’espère qu’elle ira à son terme à l’Assemblée nationale. En tout cas, je remercie le Gouvernement d’avoir engagé la procédure accélérée pour l’examen de ce texte. Je crois savoir que nos collègues députés l’adopteront avant la fin de la session.

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