Intervention de Pierre-Antoine Molina

Commission d'enquête Frontières européennes et avenir espace Schengen — Réunion du 18 janvier 2017 à 15h10
Audition de Mm. Pierre-Antoine Molina directeur général benoît brocart directeur de l'immigration raphaël sodini directeur de l'asile de la direction générale des étrangers en france au ministère de l'intérieur

Pierre-Antoine Molina, directeur général des étrangers en France :

Au terme de l'examen d'une demande d'asile, soit une protection en qualité de réfugié ou une protection subsidiaire est accordée, soit la personne est déboutée. Celle-ci n'a pas, en principe, de droit au séjour, sauf si elle est malade ou si l'éloignement porterait une atteinte manifeste à son droit à mener une vie familiale normale. En dehors de ces cas, un demandeur d'asile débouté a vocation à quitter le territoire. C'est là un objectif pour les autorités nationales et l'évolution du débat dans les différents pays de l'Union va en ce sens, compte tenu du nombre de personnes déboutées proportionnel aux flux migratoires enregistrés ces dernières années. Ainsi, plusieurs dizaines de milliers de personnes, au terme de l'examen de leur demande d'asile en Allemagne, ont vocation à quitter conjointement ce pays et le territoire de l'Union. J'insiste sur ce point : lorsqu'une décision de retour à la frontière est prise par un État membre, son exécution implique de quitter l'Union. Dans la plupart des cas, le retour est effectué de manière contrainte, faute de la coopération des personnes déboutées, ce qui pose la question de leur privation de liberté sous le contrôle précis du juge. La coopération avec le pays de retour pose aussi problème, puisque la plupart des personnes faisant l'objet de ces mesures de retour ne disposent pas des documents leur permettant d'être réadmises par leur pays d'origine. Il faut donc demander à ceux-ci de les documenter via la délivrance d'un laissez-passer consulaire. Votre rapporteur avait relevé que le taux d'exécution des obligations de quitter le territoire français (OQTF) n'excédait pas 20 %. Cet indicateur me paraît toutefois devoir être considéré avec prudence, en raison de sa sensibilité au nombre de décisions prises par les préfectures et non aux activités opérationnelles des services de lutte contre l'immigration irrégulière. La grande majorité de ces OQTF est ainsi décidée, non à l'issue d'une interpellation, mais à la suite du refus d'une demande de titre de séjour d'une personne qui, conformément à la directive retour, doit faire l'objet d'une mesure de retour. En l'absence de localisation des personnes concernées, il est pratiquement difficile de la mettre en oeuvre. Un autre élément me conduit à relativiser la portée de cet indicateur : une OQTF peut être conduite de manière contrainte, aidée ou spontanée, ce qui n'a pas la même signification.

L'amélioration de l'exécution des OQTF représente un effort constant demandé à la fois au service des préfectures et aux services opérationnels, ce qui implique une meilleure sécurisation juridique des procédures, de façon à éviter que les mesures d'éloignement ne soient annulées ou privées d'effet devant les juridictions. Cette démarche nous a également conduits à améliorer la coopération avec les États tiers de manière à obtenir davantage de laissez-passer consulaires. Cette action est, du reste, relayée au niveau européen, avec des réussites contrastées, comme en témoigne le dernier épisode avec les autorités maliennes. Mais nous ne nous résignons pas.

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