Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais me saisir de cette ultime discussion pour revenir sur une question qui occupe nos travaux depuis quelques semaines maintenant – depuis quelques mois, serais-je tenté de dire, si l’on tient compte des discussions sur la loi Sapin II – et qui a parfois suscité quelques incompréhensions, si ce n’est des passes d’armes inhabituelles au sein de cette assemblée. Cette question est celle de l’instauration d’un droit de résiliation annuel du contrat d’assurance emprunteur, que la commission mixte paritaire a entérinée le 17 janvier dernier.
Je souhaite naturellement saluer l’adoption de cette mesure majeure pour les droits des consommateurs. Donner aux hommes et aux femmes qui portent à un moment dans leur vie un projet immobilier – le projet d’une vie pour beaucoup, d’ailleurs – la possibilité de renégocier annuellement leur contrat d’assurance emprunteur et d’en changer en toute liberté, en fonction de leurs besoins, constitue bien une avancée considérable. L’avancée est également considérable pour les personnes placées, de par les aléas de la vie, en situation de risque de santé aggravé, dans la mesure où l’assurance emprunteur est souvent une condition d’obtention des prêts.
Je voudrais également revenir sur les étapes qui ont abouti à cette adoption et les questions auxquelles il nous a fallu répondre, certaines restant, pour l’heure, en suspens. Ces étapes, certains auraient voulu les raccourcir, tandis que d’autres ont pu accuser le Sénat d’immobilisme. Je pense, pour ma part, que ce temps de réflexion était nécessaire et qu’il a démontré, une fois de plus, la sagesse et le sérieux de la Haute Assemblée.
Je tiens tout particulièrement à saluer le sérieux de mes collègues qui, dans le cadre de la loi Sapin II, ont défendu une position consistant à dire que la mesure devait être étudiée correctement et ne pouvait être adoptée, comme cela, à l’occasion de l’examen d’un tel projet de loi. Celui-ci, je le rappelle, avait soulevé plusieurs questions, notamment celle des effets potentiels d’un renforcement de la segmentation du marché sur les emprunteurs et d’une déliaison totale entre l’organisme fournissant l’assurance emprunteur et le dispensateur de crédit immobilier – interrogation émanant, entre autres structures, du Collectif interassociatif sur la santé.
Pour l’heure, nous ne disposons toujours pas d’étude d’impact précise sur le sujet, ce document, conformément aux engagements pris en 2014, étant attendu au printemps, au mois de mars. C’est un motif de préoccupation, auquel nous devrons être attentifs au cours des prochains mois ; j’y reviendrai.
Autre question naturellement soulevée, celle de la gestion du stock des contrats en cours et de la protection des personnes vulnérables, en particulier dans le cadre de la mise en œuvre du droit à l’oubli.
Sous l’angle de la procédure parlementaire, nous nous sommes heurtés à deux interrogations : est-il opportun de légiférer après la loi de 2014 relative à la consommation, sans connaissance de l’étude d’impact de cette dernière, et quelle procédure parlementaire suivre au regard de la règle de l’entonnoir ? Nous nous étions néanmoins tous accordés à dire que le paysage actuel du marché de l’assurance emprunteur pouvait légitimement susciter des questionnements et que des marges de compétitivité restaient à trouver.
La question est revenue ensuite au Sénat au mois de décembre, dans le cadre de l’examen du présent projet de loi, qui, au demeurant, et contrairement à la loi Sapin II, constituait un véhicule législatif approprié. La commission des affaires économiques a alors pris le temps d’examiner sereinement cette disposition et de réfléchir à la possibilité d’en étendre l’application au stock de contrats.
À l’issue de cette réflexion, nous avons décidé de ne pas prendre de risque. Il s’agissait pour nous, non pas de renvoyer le traitement de cette question à jamais, mais d’y travailler sérieusement avec la mise en place d’un groupe de travail dédié au problème du stock, qui aurait dû rendre ses conclusions au printemps, à l’aune de l’étude d’impact délivrée par le Gouvernement en mars 2017. J’avais alors salué cette décision.
Les discussions en amont de la commission mixte paritaire, puis le moment de concertation avec les députés ont rendu caduque la mise en œuvre de ce groupe de travail.
La commission mixte paritaire a entériné les travaux du Sénat prévoyant la mise en place, pour les offres de prêts émises à compter de la publication de la loi, d’un droit de substitution annuel du contrat d’assurance emprunteur et une application du dispositif aux contrats en cours d’exécution à partir du 1er janvier 2018. Une fois encore, mes chers collègues, la sagesse du Sénat a permis de trouver une voie de compromis.