Nos amendements posent le principe d'une majoration des heures complémentaires effectuées par les salariés à temps partiel au taux qui est appliqué aux heures supplémentaires.
Ces amendements s'inscrivent dans notre série de propositions visant toutes à mettre en débat la question du temps partiel, qui structure et caractérise l'emploi des femmes aujourd'hui, question pourtant paradoxalement absente du projet de loi, comme nous n'avons cessé de le dénoncer tout au long de cette discussion et en première lecture.
Aujourd'hui, on assiste malheureusement au développement de la pauvreté dans les catégories sociales auparavant préservées, c'est-à-dire celles des travailleurs. Ainsi, 16 % des ménages vivent en dessous du seuil de pauvreté.
On peut également lire dans la revue Économie et statistique de décembre 2005, publiée par l'INSEE, une enquête intitulée « Pauvreté relative et conditions de vie en France » d'où il ressort que « 36 % des ménages - donc plus d'un ménage sur trois ! - se sentent en difficulté pécuniaire, ayant le sentiment que leur revenu est inférieur au revenu qui leur semble nécessaire pour faire face aux exigences de la vie courante. ».
Par ailleurs, ce sont les familles monoparentales qui sont les ménages les plus directement touchés par la pauvreté, c'est-à-dire les femmes seules avec enfants.
Aujourd'hui, 3, 5 millions de femmes sont des salariées pauvres, c'est-à-dire qu'elles vivent avec moins de 610 euros par mois, alors même qu'elles travaillent.
C'est pourquoi notre amendement vise à répondre à deux urgences.
La première urgence est d'abord de rétablir dans notre pays le lien entre emploi et niveau de vie. Il est inacceptable que, dans un pays prétendument riche, une part croissante de la population ne puisse pas vivre des revenus de son travail.
Les femmes travaillant à temps partiel voient souvent leurs heures modulées en fonction des aléas de vente ou de production de leur entreprise. Cela est ainsi devenu la règle dans la grande distribution ou la restauration. La désorganisation de leur vie personnelle et familiale induite par de telles pratiques n'est pas un dû et mérite compensation.
Dans ces conditions, la majoration des heures complémentaires - elle existe déjà s'agissant des heures supplémentaires - permettrait de réduire l'instabilité du statut des femmes salariées, ainsi que la faiblesse de leurs revenus.
J'en viens à présent à ce qui constitue selon nous, sénateurs du groupe CRC, la seconde urgence, à savoir répondre à la politique de fragilisation et d'effritement du salariat orchestrée par le Gouvernement.
Il est en effet urgent de rétablir un statut de l'emploi garantissant stabilité et niveau de vie. Il faut cesser d'inciter les entreprises à considérer les travailleurs comme une simple variable d'ajustement, voire comme une charge.
Si les entreprises utilisent largement le temps partiel et, d'une manière plus générale, les emplois précaires, c'est bien que la législation française crée des situations attractives pour les employeurs qui souhaitent y recourir.
En outre, depuis 2002, chacun des textes proposés par le Gouvernement s'est attaché à libéraliser le marché du travail, ce qui s'est traduit pour les travailleurs par un émiettement de leurs droits, une instabilité professionnelle croissante et l'augmentation du chômage.
Le coût induit par une majoration des heures complémentaires conduirait donc les entreprises à repenser la gestion de leur main-d'oeuvre et pourrait les inciter à envisager la requalification de certains emplois en emplois à temps plein, plutôt que de recourir systématiquement aux heures complémentaires.
Une telle requalification répondrait ainsi à une forte demande des salariés à temps partiel. Nous savons en effet que la très grande majorité d'entre eux - et surtout d'entre elles, puisqu'il s'agit de femmes dans 80 % des cas - travaillent moins qu'ils ne le souhaiteraient.
Du fait de l'interdépendance des questions d'égalité salariale et des normes d'emplois proposés aux femmes, je vous encourage donc à considérer favorablement ces amendements.