Les choses sont bien plus compliquées que cela !
Cette exceptionnelle rapidité d’examen vise à apporter une solution à des collectivités se retrouvant soudainement dans une situation d’urgence financière, résultant de la mise en œuvre de cet article du collectif budgétaire.
Cet article minore l’avantage accordé aux communautés d’agglomération comportant un ancien syndicat d’agglomération nouvelle, ou SAN, pour les modalités de calcul de leur potentiel fiscal.
L’amendement tendant à créer cet article 79 a d’ailleurs été déposé à la dernière minute par Mme la rapporteur générale de la commission des finances de l’Assemblée nationale, puis adopté tardivement en séance de nuit, sans aucun débat, comme l’a rappelé notre collègue Jean Desessard, ce qui devrait suffire à attirer notre attention.
Surtout, par manque de temps, le dépôt de cet amendement n’avait donné lieu à aucune étude d’impact. Là est bien le problème !
Il est en effet apparu par la suite, simulations à l’appui, que certaines agglomérations allaient être très fortement affectées en termes de pertes de recettes.
Il s’agirait donc de revenir au droit prévalant jusqu’alors, dans l’attente de trouver une meilleure solution, permettant d’aligner le régime des collectivités concernées sur le droit commun – je le dis pour notre collègue de l’UDI-UC : j’entends son argumentaire, mais il ne s’agit pas de faire perdurer ce dispositif, il s’agit simplement de trouver une solution transitoire qui ne mette pas ces collectivités en difficulté.
Rappelons que les SAN, créés en 1970, se sont transformés en communautés d’agglomération. À la date du 1er janvier 2016, ils avaient tous disparu.
Cela a été rappelé : c’est bien d’abord la volonté de l’État de constituer à marche forcée des communes nouvelles, avec des nombres de logements sortant de l’ordinaire, qui a placé ces syndicats d’agglomération nouvelle dans une situation budgétaire difficile. Afin de prendre en compte leur niveau élevé d’endettement, il avait donc été décidé, à titre de compensation, de minorer leur potentiel fiscal par l’application d’un coefficient spécifique.
La loi de finances pour 2013 a étendu l’application de ce coefficient au potentiel fiscal agrégé – ce dernier entre en ligne de compte dans les modalités de contribution au FPIC – des ensembles intercommunaux constitués d’une communauté d’agglomération issue de la transformation d’un SAN et de ses communes membres.
Les mouvements en cours de fusion d’EPCI auraient pu cependant faire perdre à ces territoires le bénéfice de cette pondération.
En conséquence, l’article 157 de la loi de finances pour 2016 prévoyait que cette pondération bénéficie également aux communautés d’agglomération issues de la fusion d’EPCI dont l’un au moins était un SAN s’étant transformé en communauté d’agglomération avant le 1er janvier 2015.
L’article 79 de la loi de finances rectificative pour 2016 a remis en cause ce dispositif de manière précipitée, en minorant l’avantage accordé à ces communautés d’agglomération.
La pondération est appliquée au potentiel fiscal, mais limitée à la seule base de CFE.
Selon Mme la rapporteur générale de la commission des finances de l’Assemblée nationale, qui est à l’origine de cette nouvelle disposition, il s’agissait de corriger une erreur commise. Tel n’est manifestement pas le cas !
La pondération du potentiel fiscal des communautés d’agglomération comportant un ancien SAN a toujours porté sur l’ensemble du potentiel fiscal, et non sur les seules bases de CFE.
De nombreux élus se sont inquiétés des conséquences de cette disposition. On les comprend ! Les chiffres ont été donnés : la perte de ressources serait de 14, 2 millions d’euros, à l’horizon 2020, pour la communauté d’agglomération Grand Paris Sud, dont 5, 9 millions dès 2017, de 12, 1 millions d’euros dès 2017 pour la communauté d’agglomération de Saint-Quentin-en-Yvelines, soit une perte de recettes de 10 % d’une année sur l’autre, ce qui est évidemment insupportable, de 9, 2 millions d’euros, à l’horizon 2020, pour Cergy-Pontoise, dont 4, 3 millions dès 2017, et de 8, 9 millions d’euros, toujours à l’horizon 2020, pour Paris-Vallée de la Marne, dont 3, 8 millions dès 2017.
La présente proposition de loi vise donc à éviter ces pertes de recettes considérables et brutales, par un retour à la situation antérieure, dans l’attente d’un nouveau dispositif, que nous serons bien obligés d’adopter, avec une sortie en sifflet, ce qui est généralement ce que nous faisons dans ce genre de cas.
Le groupe Les Républicains, dans sa très grande majorité, votera donc en faveur de cette proposition de loi, qui nous semble de nature à corriger un dispositif élaboré dans la précipitation et sur la base de simulations fournies par des cabinets extérieurs, ce qui est anormal. De ce point de vue, il serait nécessaire que le Parlement se dote, un jour, de moyens propres de simulations. La commission des finances avait il y a bien longtemps engagé ce chantier ; nous n’y sommes toujours pas, et c’est tout à fait regrettable, comme nous pouvons de nouveau le constater – si un tel projet avait abouti, notre rapporteur général aurait peut-être pu constater qu’une telle mesure n’était pas soutenable.
Je conclus en saluant le travail de notre rapporteur, qui a bien posé le problème tout en exprimant ce qu’il serait excessif de qualifier de réticences, puisqu’il nous propose d’adopter conforme cette proposition de loi.