Intervention de Jean-Yves Leconte

Commission des affaires européennes — Réunion du 19 mai 2016 à 8h40
Politique étrangère et de défense — Perspectives de la politique de sécurité et de défense commune psdc : proposition de résolution européenne et avis politique de mme gisèle jourda et de m. yves pozzo di borgo

Photo de Jean-Yves LeconteJean-Yves Leconte :

Je remercie nos rapporteurs de leur travail de recherche, dont les conclusions nous sont présentées alors que nous sommes à la croisée des chemins. Jusqu'à présent, la notion d'« Europe de la défense » différait de celle de « défense de l'Europe », laquelle relevait de l'OTAN.

Nous nous sommes rendu compte au cours des dernières années, notamment avec la crise en Ukraine, que la politique européenne de voisinage pouvait avoir des conséquences en termes de sécurité. On a pris conscience, aussi, que des interventions européennes sur des théâtres d'opérations extérieures - en Irak, en Libye, en Europe centrale - pouvaient influer sur la défense de l'Europe. Cela changeait la donne.

Faire usage de l'arme nucléaire, défendre des vies humaines ou engager celles de nos soldats, c'est le dernier étage de la fusée fédéraliste, d'où l'intérêt de cette proposition de résolution, qui permet de faire le point sur ce que l'on peut envisager en matière de sécurité et de défense communes, sans pour autant tout mettre en commun.

J'étais au Mali lorsque le Gouvernement français a décidé d'y intervenir militairement. Il est parfois important de prendre souverainement ce type de décision exclusive, sans en référer aux Vingt-Huit. Mais cette capacité limite nécessairement l'appel à la solidarité.

J'émets des réserves sur la proposition de Thierry Breton relative au financement, qui vise à créer une dette commune pour les investissements passés. Je ne crois pas qu'il faille exclure du champ du pacte de stabilité et de croissance les investissements consacrés à la défense. Une dette reste une dette ! La suite logique serait la désolidarisation, puis la mise en place d'un processus commun de prise de décision. Je ne pense pas que la France y trouve son intérêt. Nous parlons bien là d'un droit de regard sur les choix faits.

Par ailleurs, certains pays travestissent l'usage de leurs investissements militaires. Ceux de la Pologne n'ont ainsi qu'un seul but : le soutien à l'emploi et à l'industrie locale. Suivre cette voie, c'est prendre le risque de voir s'accumuler les dettes, sans pour autant favoriser la défense européenne.

Comme pour l'euro, qui dit « mise en commun » dit aussi « responsabilité commune ». Or, en matière de défense, nous ne pourrons pas aller très loin dans la communautarisation des dépenses. Prendre de telles décisions en commun, ce serait en effet pour nous perdre en efficacité et en spécificité. Autre risque : des pays pourraient utiliser ce dispositif dans un sens non conforme au renforcement de la défense européenne.

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