Intervention de André Gattolin

Commission des affaires européennes — Réunion du 3 décembre 2015 à 8h35
Institutions européennes — Union européenne et royaume-uni : communication de mme fabienne keller

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Attention à ne pas appliquer nos tropismes nationaux ou européens au Royaume-Uni, dont la culture est complexe. Il y a vingt ans, j'ai négocié avec des Britanniques, au nom du groupe pour lequel je travaillais, le rachat d'une filiale de Maxwell. Lorsque la proposition financière a été formulée, la présidente a dit : « You are insulting us ! » ; et elle a quitté la salle. Après quatre mois de discussion, le prix d'achat final était de 2 % supérieur à celui initialement proposé...

Hier, le ministre ne voulait pas qu'on vote la taxe Google en raison des négociations en cours à l'OCDE ; mais Roger Karoutchi, qui fut notre représentant à l'OCDE, disait que l'organisation commençait par s'intéresser aux droits nationaux... C'est un bon argument pour négocier. Nous négocions comme des Bisounours ! Cessons de paniquer !

Il y a des choses à dire sur l'immigration, le succès économique des Britanniques, leur taux de chômage. Au Royaume-Uni, au moins quatre statuts d'appartenance à la citoyenneté coexistent : on peut être de nationalité britannique sans être citoyen, comme les anciens habitants de Hong-Kong, citoyen du Commonwealth, citoyen européen et britannique... Les pays d'origine des migrants ont souvent un lien avec le Royaume-Uni, comme les anciens pays du Commonwealth.

Le taux de chômage officiel britannique est proche du taux américain, 5,5 %. Formidable ! Mais en compilant les données d'Eurostat, on s'aperçoit qu'il y a au Royaume-Uni 4 millions de personnes en invalidité de travail... Elles résident généralement dans des zones économiquement dévastées, dont elles sont le Lumpenproletariat ; elles ne trouvent pas de travail, n'acceptent pas celui hors contrat proposé aux migrants, et se promènent en voiturette électrique tout en marchant correctement. Si on les additionne aux chômeurs, on trouve un taux de chômage comparable au taux français et supérieur à la moyenne européenne. Avec Eurostat, les comparaisons pays par pays sont délicates et les apparences trompeuses...

Il existe des accords réels, visibles et officieux avec les États-Unis, notamment sur le statut des sociétés britanniques en Amérique. Les Britanniques ont un pied d'un côté, un pied de l'autre. Cela explique aussi pourquoi depuis trente ans, la croissance britannique est la plus corrélée avec la croissance américaine. La situation britannique mérite analyse. Même si nous aimons beaucoup la Grande-Bretagne, son mode de fonctionnement est très particulier, ce qui n'autorise que des comparaisons extrêmement prudentes.

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