Intervention de Jean Bizet

Commission des affaires européennes — Réunion du 5 novembre 2015 à 8h35
Agriculture et pêche — Recherche et propriété intellectuelle - brevetabilité des variétés végétales : communication de m. daniel raoul

Photo de Jean BizetJean Bizet, président :

Ces questions sont fondamentales. Derrière la brevetabilité du vivant, il s'agit de l'arme alimentaire. La France fait de la sélection depuis des décennies. Certaines de nos entreprises semencières sont parmi les plus réputées au monde, et nous avons acquis une génothèque remarquable que des firmes étrangères veulent acquérir à prix d'or pour développer ensuite la transgénèse, ou identifier le gène d'intérêt par la génomique. N'est brevetable que le triptyque gène-fonction-application, qui constitue l'innovation. Les États-Unis et l'Europe sont des mondes tout à fait différents dans ce domaine. Il y a plus d'une dizaine d'années, j'avais été surpris de l'arrêt Chakrabarty, du nom d'un sénateur américain, selon lequel tout ce qui est sous le soleil est brevetable. Les avocats américains ont fait fortune sur les batailles juridiques auxquelles cet arrêt a donné lieu entre la France et les États-Unis.

Quant au Haut Conseil des biotechnologies (HCB), sa fonction est de garantir aux agriculteurs et aux consommateurs le droit de cultiver ou de consommer avec ou sans OGM. Alors qu'autrefois, un organisme commun présidait à l'autorisation de mise en culture, le HCB a créé deux collèges, l'un scientifique et l'autre économique, social et éthique. Le premier fonctionne bien, mais le comité social et éthique a du mal à se prononcer sur la pertinence de mettre ou non un OGM sur le marché. Sans doute est-ce dû au fait que M. Borloo, ministre à l'époque, y a malicieusement nommé une majorité de personnalités opposées à toute évolution sur les OGM. J'ai siégé avec Daniel Raoul dans ce comité : ce n'étaient que débats sans fin remettant en question les décisions du collège scientifique. Nous avons fini par partir. Je salue la présidente, Mme Christine Noiville, dont le travail n'est pas facile. Les semenciers ont aussi fini par déserter le comité, faute d'arriver à rien. C'est d'autant plus regrettable que de l'autre côté de l'Atlantique, on continue à avancer. En France, le sujet a quitté la sphère scientifique pour devenir sociétal. Quand les passions l'emportent sur la raison, mieux vaut se retirer sur la pointe des pieds. La France avait beaucoup d'avance ; elle a pris un retard considérable. Les biotechnologies font partie des évolutions, qu'on le veuille ou non.

Un règlement serait en préparation sur des nouvelles techniques qui relèveraient de la mutagenèse dirigée, qui permet de modifier un gène pour aller beaucoup plus vite que la sélection classique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion