Intervention de Alain Richard

Commission des affaires européennes — Réunion du 19 janvier 2017 à 8h40
Culture — Paquet « droit d'auteur » : proposition de résolution européenne et avis politique de mme colette mélot et m. richard yung

Photo de Alain RichardAlain Richard :

Ayant légiféré depuis longtemps sur le sujet de l'extension du concept de droits d'auteur par la création des droits voisins, ce sujet est important dans les échanges que régule l'Union européenne, et je me différencie de la position de M. Gattolin. Le droit d'auteur est fondamentalement un droit de propriété. C'est pour cela qu'il est apparu concomitamment avec la philosophie des Lumières, qu'il s'est développé autant dans la culture britannique que française, accessoirement nordique.

Ce droit de propriété sert à la protection privative individuelle de l'oeuvre par son auteur mais aussi à en faire un commerce. Rien n'est compréhensible si on ne perçoit pas que le droit d'auteur se dirige vers un marché. Ce sont les principes du droit privé et de l'économie de marché qui le régissent. Par définition, les droits dits du commun ou de l'appropriation collective, sans garant, sont une exception à ce droit, et non l'inverse. C'est une victoire des conceptions françaises. En 1984-1985, quand on tenait compte de la première phase technologique du développement secondaire des oeuvres via des adaptations audiovisuelles, beaucoup étaient convaincus que la conception purement commercialiste du copyright l'emporterait. Au contraire, c'est une conception privative, personnaliste du droit d'auteur qui l'a emporté : cela a une importance fondamentale pour l'histoire de la pensée et culturellement. La territorialité doit rester la règle : pour une application du droit d'auteur, il faut un public, des acheteurs, un marché... Les conditions de diffusion et de négociation de ces droits sont différentes selon qu'elle a plus ou moins de chances de toucher un public ou de rester seulement un objet de recherche pour les spécialistes.

Pour les percepteurs, c'est comme le droit de propriété : pour l'exploiter économiquement, il faut un savoir-faire et un contrat. Légalement, ces organismes ne sont bénéficiaires d'aucun monopole. Rien n'empêche ceux croyant qu'ils peuvent percevoir facilement les droits d'auteur à la place de la Sacem ou de la SACD auprès de publics immenses et distants de le faire. Mais nous sommes dans un monde imparfait. C'est cette construction juridique et ce système d'équilibre entre les droits de l'oeuvre et de son auteur et l'accès au public qui sont satisfaisants. L'Union européenne, malgré ses différences, continue à faire vivre ce droit et c'est rassurant.

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