Intervention de Jean-François Humbert

Commission des affaires européennes — Réunion du 28 avril 2011 : 1ère réunion
La situation au kosovo communication de m. jean-françois humbert

Photo de Jean-François HumbertJean-François Humbert :

Dans le cadre de son déplacement dans la région, le groupe interparlementaire s'est également rendu au Kosovo afin de rencontrer les responsables politiques locaux, cinq mois après les dernières élections législatives.

Notre collègue Marie-Thérèse Bruguière et l'ambassadeur de France au Kosovo nous avaient présenté, le 16 février dernier, la situation politique locale. La seule nouveauté consiste en l'élection d'une femme à la présidence de la République. L'élection du milliardaire Beghjet Pacolli par le Parlement kosovar le 22 février dernier, a, en effet, été invalidée faute de quorum, les deux partis d'opposition, l'AAK et la LDK refusant de participer au scrutin. Mme Atifete Jahjaga, 36 ans, général de la police kosovare et inconnue du grand public, a été élue à la présidence le 7 avril après un accord entre les partis politiques négocié par l'ambassadeur américain au Kosovo.

Cette élection semble mettre fin à la crise politique qui dure depuis près d'un an au sein du pays. Elle devrait être suivie dans les prochains mois d'une réforme des institutions en vue de présidentialiser le régime. Nous avons noté avec intérêt que la Présidente de la République était entourée de conseillers dont une large partie n'a pas participé au conflit de 1999 et n'appartiennent pas aux partis traditionnels. Cette rupture avec les logiques d'après-guerre n'est pas sans intérêt pour un pays qui souhaite donner une image moderne, européenne et multiethnique, de lui-même.

La situation à Pristina ne doit pas, cependant, occulter la réalité du nord du pays ou celle des enclaves serbes. Si la plupart des responsables d'origine serbe rencontrés ne militent pas pour une partition du pays, s'ils semblent faire avec le statut du pays sans l'accepter - douze députés serbes soutiennent ainsi le gouvernement de l'ancien commandant de l'UCK, Hashim Thaçi -, nous n'avons pas pour autant senti une envie tangible de mieux vivre ensemble, comme en témoigne, par exemple, l'absence d'enseignement bilingue.

Si le nord se caractérise par l'absence d'institution kosovare proprement dite et une administration serbe de facto, les enclaves sont dans une situation particulière puisqu'elles perçoivent des financements, certes modestes, du gouvernement kosovar et voient, dans le même temps, la plupart de leurs services publics - écoles, hôpitaux - en large partie financés par Belgrade.

Les négociations entre la Serbie et le Kosovo qui se sont ouvertes à Bruxelles le 8 mars dernier sous l'égide de l'Union européenne pourraient peut-être permettre de dépasser ce mode de fonctionnement, par le biais d'une coopération technique dans plusieurs domaines. S'il ne s'agit pas d'aborder le statut du Kosovo au cours de ces réunions, les questions liées à l'état-civil, au cadastre, aux douanes, à l'électricité, aux télécommunications ou encore au survol du territoire seront traitées.

L'une des principales demandes du gouvernement, partagée par la minorité serbe, consiste en une libéralisation du régime des visas pour entrer dans l'Union européenne. A l'heure actuelle, le Kosovo est le seul territoire issu de l'ex-Yougoslavie qui ne bénéficie pas de ce régime allégé. Cette situation pénalise grandement la population, qu'elle soit d'origine albanaise ou d'origine serbe. Elle est, par ailleurs, un frein considérable au développement du pays et participe du renforcement de son enclavement.

Une libéralisation ne constitue pas un risque considérable pour l'Union européenne, d'autant qu'elle possède avec EULEX un instrument capable de surveiller, sur place, la circulation des individus. Je rappelle qu'EULEX constitue la plus grande mission civile déployée dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune de l'Union européenne.

Cette libéralisation renforcerait par ailleurs la légitimité de la présence sur place de l'Union européenne. L'importance des moyens accordés à la mission, son extrême visibilité - 1300 véhicules pour près de 3000 agents, dont 1200 locaux environ - contrastent, en effet, à l'heure actuelle, avec la faiblesse des résultats enregistrés.

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