Intervention de Philippe Marini

Commission des affaires européennes — Réunion du 15 février 2012 : 1ère réunion
Economie finances et fiscalité — Table ronde sur la régulation bancaire et le financement de l'économie

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, président de la commission des finances :

Cette table ronde porte sur la régulation bancaire et le financement de l'économie. Notre préoccupation est double : il s'agit de la seconde rencontre organisée conjointement par nos deux commissions depuis le début 2012, après celle du 18 janvier dernier sur la régulation des marchés financiers. Nous venons d'arrêter une proposition de résolution du Sénat sur l'« European market infrastructure regulation » (EMIR), ainsi que sur la directive-règlement sur les marchés d'instruments financiers (MIF 2).

C'est un sujet en relation directe avec ce que nous allons traiter car il s'agit bien de la solidité et de la solvabilité du système financier. Cette préoccupation prend place dans toute une série d'initiatives européennes et nationales.

Tout cela résulte pour une bonne part de la crise qui a révélé les inadaptations et les difficultés potentielles des établissements bancaires européens. Lors de l'audition organisée la semaine dernière par la commission des finances du Sénat, les économistes que nous avons entendus nous ont rappelé que le suivi des valeurs d'actifs par les banques centrales européennes est une question cruciale. L'Irlande est là pour nous rappeler qu'un système apparemment prudent peut exploser quasiment d'un jour à l'autre, avec des conséquences systémiques importantes si on n'a pas prêté attention aux risques pris par certains acteurs de l'économie et, en l'espèce, ceux représentant le marché immobilier ! Qu'un aussi petit marché, dans un aussi petit pays, ait pu provoquer de telles conséquences financières peut nous conduire à méditer sur la régulation à mettre en oeuvre et sur les règles à faire respecter dans les bilans des établissements financiers !

Problème de fonds propres, problèmes de liquidité, tous sujets familiers au Comité de Bâle. Tout notre environnement est façonné par ce Comité qui n'a pas de réalité organisationnelle de droit public mais qui, néanmoins, fait partie de notre quotidien, celui des banquiers et aussi celui des élus que nous sommes.

Aucun représentant démocratiquement élu ne siège au Comité de Bâle mais la normalisation qu'il a mise en oeuvre s'impose, notamment aux autorités communautaires et donc nationales - ce qui ne peut qu'alimenter un assez grand nombre de frustrations. Il faut bien comprendre cela. Même si nous sommes bien placés dans nos commissions pour avoir une conscience aiguë de la réalité des problèmes financiers, il n'en reste pas moins qu'en dehors de nos enceintes, les modes de décisions incontournables s'agissant d'une telle matière ne peuvent qu'alimenter largement la frustration et les tensions dans la période de crise que nous vivons.

D'autres initiatives figurent à l'ordre du jour européen. Je pense aux exigences fixées de concert par le Conseil et par l'EBA demandant aux banques de détenir 9 % de fonds propres à l'horizon de juin 2012.

Ces contraintes vont-elles se traduire par un resserrement du crédit ? Je ne parle pas de « credit crunch », qui constitue un effondrement du crédit mais de resserrement du crédit.

Si nous vous avons demandé de venir devant nous, c'est pour que vous nous disiez la vérité, même si nous savons bien qu'il existe un langage de banque centrale qui permet de communiquer dans le monde entier et qui a son utilité mais qui est très policé. Nous vous demanderons donc de bien vouloir nous dire très directement tout ce que vous pensez de ces sujets.

Il y a un élément très positif dans la situation actuelle : il s'agit du refinancement à 36 mois par la Banque centrale européenne (BCE). C'est une initiative pleine d'imagination et assez inattendue - au moins pour ceux qui ne partageaient pas sa préparation - mais au-delà de cette mesure très puissante, l'équilibre reste à trouver sur notre continent entre, d'une part, la nécessité de réguler le secteur bancaire, de s'assurer de sa solidité en cas de crise, d'éviter que le contribuable ne soit de nouveau appelé ici ou là à renflouer les établissements qui en auraient besoin et, d'autre part, le besoin de financement et de croissance de nos économies ainsi que des collectivités territoriales. Il a fallu à deux reprises, dans ce pays, mettre en oeuvre un dispositif exceptionnel, un filet de sécurité, grâce à une entité très spécifique - même si elle est quelque peu bancaire - la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Sans cela, c'était la disette, directement issue de Bâle III car le banquier qui ne reçoit pas de dépôts ne prête plus !

Or, en France, les collectivités territoriales déposent au Trésor et c'est une des clés de notre organisation financière. Ceci a des conséquences très importantes en termes de finances publiques.

C'est dans ce contexte que nous allons vous entendre, sans oublier la place des banques dans la souscription et l'animation du marché des titres représentatifs des dettes souveraines. J'espère vivement que vous allez nous aider à faire la part des choses.

Je suis heureux, en notre nom à tous, d'accueillir M. Andrea Enria, président de l'autorité bancaire européenne (EBA), Mme Danièle Nouy, secrétaire générale de l'autorité de contrôle prudentiel (ACP), MM. François Pérol, président du directoire de BPCE, et Dominique Plihon, professeur d'économie financière à l'université de Paris-Nord (Paris XIII), car nous estimons toujours utile, au Sénat, que les universitaires nous apportent leur éclairage, en toute indépendance. Dans chacune de nos auditions, nous nous efforçons, lorsque c'est possible, de faire participer des autorités représentant l'école économique française.

La parole est à M. Enria...

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