Intervention de Andrea Enria

Commission des affaires européennes — Réunion du 15 février 2012 : 1ère réunion
Economie finances et fiscalité — Table ronde sur la régulation bancaire et le financement de l'économie

Andrea Enria, président de l'autorité bancaire européenne :

Je présenterai quelques propos liminaires et aborderai deux sujets. Le premier concerne le travail de l'EBA destiné à renforcer les capitaux propres des banques européennes à partir des tests de résistance réalisés en 2011 ; je m'appesantirai davantage sur les éléments qui pourraient avoir un impact sur le crédit...

Le second sujet concerne le travail de réglementation de l'EBA. Il s'agit de mettre en oeuvre un ensemble unique de réglementations sur le marché bancaire européen et de nous atteler à la définition de nouvelles règles en matière de capitaux propres et de liquidité.

En 2011, nous nous sommes lancés dans des tests de résistance des banques européennes. Nous avons essayé d'établir des définitions communes pour les banques en matière de critères communs, de processus d'examen par les pairs et de niveau de fonds propres. Nous avons également essayé de maintenir un maximum de transparence en ce qui concerne la situation des banques européennes. Je pense d'ailleurs que le marché a favorablement accueilli cet exercice.

Au moment de la crise des dettes souveraines, le manque de confiance était criant, particulièrement concernant les banques exposées. L'EBA a proposé l'été dernier de nouvelles mesures afin de renforcer la position en capitaux propres des différentes banques. Fin octobre, nous avons fait des propositions plus larges afin d'essayer de gérer la crise sur les marchés. Les recommandations faites aux banques consistaient à augmenter jusqu'à 9 % les capitaux propres de base.

Nous avons eu, la semaine passée, l'occasion de discuter des plans de recapitalisation des banques européennes afin d'étudier s'ils étaient conformes à nos recommandations. Ces demandes auraient pu pousser les banques à se désendetter ce qui aurait pu avoir un impact sur l'économie réelle. Nous avons essayé de pallier ce problème en renforçant les capitaux propres sans réduire les prêts consentis à l'économie réelle ; nous avons constaté que les banques avaient pris nos recommandations très au sérieux.

Le processus de recapitalisation est en bonne voie ; nous ne prévoyons pas d'impact majeur résultant de cet exercice sur l'économie réelle du crédit mais il est évident que les banques ont eu à gérer des problèmes de financement, que nous surveillons de très près.

J'en viens au second volet de mon intervention qui concerne la préparation de normes harmonisées qui seront appliquées sur le marché unique. Cet effort résulte des recommandations adoptées par le groupe de haut niveau présidé par M. de Larosière. Il s'agit d'accentuer la priorité à la quantité et à la qualité des capitaux propres, tout en se concentrant sur les risques de liquidité.

Nous avons engagé un dialogue avec le Conseil européen, le Parlement européen et les parlements nationaux. Le traité de Lisbonne est bien entendu au centre de cet exercice. Plusieurs autorités ont toutefois émis quelques doutes sur ce concept.

Etant donné ce qui s'est passé avant, pendant et après la crise - et encore récemment - il existe un besoin criant de règles uniques et harmonisées sur le marché. Nous devrons donc rédiger plus d'une centaine de normes ; quarante devront l'être d'ici la fin de l'année.

Nous nous concentrons actuellement sur deux secteurs : la définition des capitaux propres d'une part et les normes de liquidité d'autre part.

La définition des capitaux propres est un domaine essentiel. Nous devons absolument arriver à nos fins. La proposition de la Commission en matière de capitaux propres est conforme aux exigences contenues dans les accords de Bâle mais aucun critère spécifique n'est imposé concernant les instruments juridiques. Or, l'EBA a la possibilité de garder le contrôle sur la définition des capitaux propres. Une fois les nouveaux règlements adoptés, un certain nombre d'innovations verront le jour en matière de financement ; nous devrions conserver le contrôle de ces innovations et procéder à une harmonisation des différentes juridictions. Nous avons bien vu, par le passé, ce que coûte le fait de perdre le contrôle.

Le second point concerne les exigences en matière de liquidité. C'est la première fois que nous adopterons des normes européennes harmonisées en la matière. Les propositions émanant du Comité de Bâle ont suscité beaucoup de préoccupations dans le secteur bancaire. Certaines autorités ont exprimé leur inquiétude concernant les conséquences imprévues que ces règles pourraient avoir sur le fonctionnement des marchés monétaires.

Je voudrais insister sur deux points. En premier lieu, les principes de Bâle sont sains ; nous voulons un coussin de liquidité permettant de résister aux crises et souhaitons davantage d'adéquation entre les engagements et les fonds propres des banques. Nous ne voulons plus qu'il existe autant de volatilité concernant le financement sur les marchés bancaires.

Cela étant, les détails techniques des ratios proposés par Bâle doivent être calibrés très soigneusement afin d'être sûrs d'atteindre les objectifs souhaités. Nous pensons qu'il pourrait être nécessaire d'ajuster ici ou là certains paramètres de base.

Pour cela, l'EBA devrait collecter des informations auprès des banques et effectuer des analyses factuelles et empiriques afin de présenter si nécessaire des propositions de changement précises au Parlement et au Conseil.

Nous allons présenter de nouvelles idées sur la base des éléments que nous allons recueillir auprès des banques. Il faut veiller à prendre en compte les caractéristiques spécifiques du secteur bancaire européen. Nous savons que les banques européennes fonctionnent avec des obligations garanties, contrairement aux banques américaines, qui peuvent éventuellement recourir aux compagnies d'assurance comme Freddie Mac ou Freddy May.

Nous devons bien sûr présenter des mesures proportionnées à la taille des établissements. L'EBA en est encore à ses balbutiements. Nous sommes soumis à beaucoup de pressions à différents égards. Nous avons dû relever un énorme défi. Au cours de ces premiers mois d'activité, nous avons prouvé que nous pouvons prendre des décisions. Nous voudrions aussi remercier les superviseurs nationaux. Je suis sûr que l'EBA ne pourra réussir que si nous pouvons fonctionner la main dans la main !

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