Intervention de Fabienne Keller

Commission des affaires européennes — Réunion du 3 décembre 2014 à 17h05
Économie finances et fiscalité — Procédure européenne d'examen des budgets nationaux - communication de mme fabienne keller et de m. françois marc

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller :

Je tiens, à titre liminaire, à saluer les services techniques du Sénat qui ont organisé une visioconférence avec nos interlocuteurs de la Commission européenne. Celle-ci nous a ainsi permis de mieux préparer cette communication.

Selon l'avis rendu par la Commission vendredi dernier, les projets de budget de cinq États membres (Allemagne, Irlande, Luxembourg, Pays-Bas, Slovaquie) apparaissent conformes au Pacte de stabilité et de croissance ; quatre autres (Estonie, Lettonie, Slovénie, Finlande) ont présenté, selon elle, des projets « globalement » conformes aux règles budgétaires européennes. Sept pays (Belgique, Espagne, France, Italie, Malte, Autriche, Portugal) présentent en revanche un risque de non-conformité avec les dispositions du Pacte de stabilité et de croissance. Je note qu'en l'absence d'instance politique spécifique à l'Eurogroupe, toutes les décisions relatives au Pacte de stabilité relèvent des 28 États membres dans leur ensemble.

Finalement, après de vifs débats, la Commission européenne a décidé que les cas de la Belgique, de l'Italie et de la France feront l'objet d'un suivi particulier au printemps : la Commission examinera, début mars 2015, leur situation budgétaire à la lumière de la version définitive des lois de finances pour 2015 que ces pays auront adoptées et des précisions qu'ils apporteront à leurs programmes de réformes structurelles.

Je rappelle qu'en 2014, la dette publique avoisinera en Belgique 105 % du PIB et qu'elle dépassera 130 % du PIB en Italie. La France se distingue pour sa part par l'ampleur de son déficit budgétaire annuel.

Comme vous le savez, la France fait l'objet, sur décision du Conseil de l'Union européenne, d'une procédure de déficit excessif depuis 2009. Au titre de cette dernière, il était prévu qu'elle ramène son déficit public en deçà de 3 % du PIB en 2013. Toutefois, compte tenu de la « forte détérioration de la position budgétaire due à une position globale de l'économie moins favorable que celle sur laquelle se fonde la recommandation du Conseil de 2009 », la Commission a proposé le 29 mai 2013 d'accorder à la France une prolongation jusqu'à 2015 du délai pour corriger son déficit excessif. Cette position a été validée par le Conseil de l'Union européenne le 21 juin 2013.

Ce report de deux années, soit un délai doublé par rapport au délai d'un an prévu par les textes du retour sous la barre des 3 %, s'est accompagné de recommandations du Conseil portant sur la trajectoire de solde public de la France jusqu'à 2015. Elles comprennent des cibles de déficit effectif ainsi que des objectifs d'ajustement du solde structurel : le Conseil demandait à la France de ramener son déficit en 2015 sous la barre des 3 % et de dégager un effort structurel de 0,8 point de PIB en 2014 et 2015.

La France a transmis son projet de plan budgétaire mi-octobre à la Commission européenne. Celle-ci a réagi en adressant une semaine plus tard un courrier dans lequel elle indiquait, d'une part, que le projet français ne prévoyait pas que la France ramène son déficit budgétaire nominal sous le seuil de 3 % du PIB en 2015, comme prévu par la recommandation du Conseil de 2013 et que, d'autre part, en matière de déficit structurel, l'effort annoncé était bien en dessous du niveau recommandé. Le Pacte de stabilité et de croissance prévoit effectivement un effort structurel d'au moins 0,5 point de PIB pour les États faisant l'objet d'une procédure pour déficit excessif.

En réponse, la France a adressé un courrier le 27 octobre dernier présentant des précisions et des mesures nouvelles, qui permettaient d'afficher un déficit public réduit de 3,6 milliards d'euros sans réelle modification structurelle par rapport au projet initial.

Après examen, la Commission européenne a jugé que les mesures annoncées dans ce courrier ne contribueraient qu'à améliorer de 0,1 point de PIB l'effort d'ajustement structurel et ne garantissaient pas que le déficit structurel français serait réduit de 0,5 point de PIB en 2015. À ce stade, elle estime même l'effort structurel pour 2015 à 0,3 point de PIB, très loin de l'objectif de 0,8 recommandé par le Conseil en 2013. Il s'agit bien sûr d'une estimation car, comme nous l'ont fait remarquer les services de la Commission, « l'effort structurel se calcule, il ne s'observe pas ».

Comme le Haut Conseil des Finances publiques l'avait fait fin octobre dans son avis, la Commission européenne a aussi jugé que les prévisions macroéconomiques du Gouvernement étaient un peu trop optimistes, surtout pour 2015.

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