Intervention de André Gattolin

Commission des affaires européennes — Réunion du 2 juillet 2015 à 9h05
Économie finances et fiscalité — Réunion interparlementaire sur les rescrits fiscaux : communication de m. claude kern

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Il est important de rappeler ce qu'est un rescrit fiscal, et toutes les nuances qu'il peut prendre. Dans certains cas, ce sont des adaptations bienvenues, et un certain nombre de ces rescrits sont, d'ailleurs, publics. Mais c'est loin d'être le cas général : un réel problème de transparence se pose.

C'est bien de compétition fiscale qu'il convient de parler, car le terme de compétitivité, dès lors que tout est déterminé par des négociations, ne veut rien dire. Pour en avoir discuté avec plusieurs ministres de Bercy, je sais que la première demande des entreprises internationales qui envisagent une implantation est de négocier un rescrit.

Il faut rappeler que la commission spéciale présidée par Alain Lamassoure n'est qu'un pis-aller. Elle a été mise en place à défaut d'une commission d'enquête, dont le principe avait recueilli 194 voix, au-delà de la majorité de 188. Par un tour de passe-passe institutionnel, c'est, en fait de commission d'enquête, cette commission spéciale qui a été mise en place, pour six mois, éventuellement renouvelables. Et tout cela pour ne pas déplaire à M. Juncker, dont le gouvernement a négocié secrètement des rescrits fiscaux. On ne peut pas déclarer qu'il faut taxer les GAFA sans balayer devant sa porte. Les parlementaires qui participent à cette commission spéciale, qui n'a rien de partisan, en sont à se demander si l'on ne cherche pas à la saboter : à l'exception de Total SA, toutes les grandes entreprises qu'ils ont souhaité entendre se sont dérobées. C'est le cas de McDonald's, d'Ikea, de Google, de Fiat, de Chrysler, d'Amazon Europe, de HSBC. Quant à certains groupes comme Coca Cola, Barclays, Walt Disney ou Facebook, ils tentent de négocier les conditions de leur audition ! On peut reprocher beaucoup de choses au système américain, mais quand le Congrès met en place une commission, aucune entreprise ne peut se soustraire à une audition. On en est loin ici. C'est même à se demander si une recommandation de ne pas s'y rendre émanant du plus haut niveau de la Commission ne leur a pas été adressée. L'autorité du Parlement est bafouée. Qu'une commission parlementaire, qui ne dispose pas, de surcroît, de pouvoirs exorbitants, ne puisse pas même imposer des auditions à de grands groupes qui bénéficient de rescrits très discutables témoigne d'une réelle faiblesse de l'Union européenne.

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