C'est vrai, mais je regrette que les discours du président Poutine soient souvent contradictoires : un discours pour l'étranger et un autre pour l'intérieur. À ce titre, je rappelle qu'il a récemment tenu un grand discours dans lequel il exaltait les valeurs patriotiques. Lors de la récente réunion de la commission des questions politiques de notre assemblée, qui s'est d'ailleurs tenue au Sénat, la situation politique en Ukraine était inscrite à l'ordre du jour et je déplore l'absence de parlementaires russes, alors même que leurs collègues ukrainiens étaient présents, ce qui, vous en conviendrez, ne facilite pas le dialogue.
L'APCE s'inscrit pleinement dans le processus de coopération entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne. Vous le savez, il y a souvent une confusion entre les deux institutions, notamment entre le Conseil de l'Europe et le Conseil européen, d'autant plus que les emblèmes du Conseil de l'Europe, tels que le drapeau, ont été repris par l'Union européenne, naturellement avec l'accord du Conseil. Le Conseil de l'Europe recouvre un champ géographique plus large que celui de l'Union européenne puisqu'il comprend 47 États membres, soit l'ensemble des pays du continent, à l'exception de la Biélorussie, qui n'est pas une démocratie, et du Kosovo, en raison de son statut. Le Vatican y a un statut d'observateur. Nous avons tout intérêt à ce que le Conseil de l'Europe et l'Union européenne coopèrent plutôt que d'entretenir une rivalité stérile, même s'il me paraît indispensable d'éviter les doublons, comme la création par l'Union européenne de l'Agence européenne des droits de l'Homme avait pu le laisser craindre. Les relations entre l'APCE et le Parlement européen sont excellentes et j'entretiens les rapports les plus cordiaux avec le président Martin Schulz. J'ai également rencontré les hauts dirigeants de l'Union européenne, Jean-Claude Juncker, que je connais naturellement très bien depuis de longues années, Federica Mogherini, Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et Johannes Hahn, le commissaire européen en charge de la politique européenne de voisinage et des négociations d'élargissement. Je rappelle d'ailleurs que Jean-Claude Juncker avait établi en 2006 un rapport sur les relations entre les deux organisations internationales, qui est devenu une référence, et il devrait venir s'adresser à l'APCE en janvier prochain. Pour autant, le Conseil de l'Europe ne doit pas être réduit à une « salle d'attente » de l'Union européenne. L'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'Homme est prévue par le traité de Lisbonne et je la considère donc comme un acquis. Je rappelle que la Cour de justice de l'Union européenne doit rendre un avis sur cette question le 18 décembre prochain. Je regrette le discours actuel, selon moi à caractère électoral, du gouvernement britannique sur la portée des arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme. Dans plusieurs États membres, le parlement assure un suivi des décisions de la Cour de Strasbourg, par exemple au sein d'une commission spécifique, et sans doute conviendrait-il de généraliser cette pratique qui constitue une recommandation de notre assemblée. De même, le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont mis en place d'importants programmes de coopération. Je tiens toutefois à exprimer ma vive inquiétude sur les perspectives financières du Conseil de l'Europe dans un contexte marqué par la volonté de nombreux États membres, dont la France, d'appliquer à leur contribution une croissance nominale zéro.
Enfin, je voudrais exprimer mon inquiétude sur le respect des droits de l'Homme dans certains États membres. Je pense en particulier à l'Azerbaïdjan qui vient d'achever sa présidence de six mois du Comité des ministres du Conseil de l'Europe. Dans ce pays, beaucoup de défenseurs des droits de l'Homme sont aujourd'hui emprisonnés sans motif valable. Les autorités azerbaïdjanaises viennent ainsi de rayer du barreau l'avocat d'un prévenu qui a pour seul tort de déplaire au gouvernement. Elles ont également ordonné l'arrestation d'une célèbre journaliste d'investigation qui avait témoigné quelques mois auparavant devant l'APCE. Je pourrais également donner l'exemple d'un dirigeant d'une organisation non gouvernementale qui vient d'être arrêté. Ce harcèlement judiciaire est inacceptable et je suis intervenue auprès des autorités de l'Azerbaïdjan pour évoquer ces différents cas. Mais je pourrais aussi citer les atteintes à la liberté d'expression en Hongrie ou en Turquie. Vous le voyez, le Conseil de l'Europe a encore beaucoup de travail dans le contexte actuel.