Nous sommes particulièrement heureux de vous accueillir aujourd'hui au Sénat, à l'occasion de la visite de trois jours que vous effectuez en France. Je rappelle à nos collègues que vous avez été élue en janvier 2014 à la présidence de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE). Vous avez succédé à Jean-Claude Mignon que nous avions reçu ici-même en février 2012.
L'Assemblée parlementaire que vous présidez est composée de parlementaires nationaux représentant les 47 États membres du Conseil de l'Europe. En son sein, la délégation française, forte de 36 membres dont 12 sénateurs, joue un rôle actif sous la présidence de René Rouquet. Je veux saluer la présence parmi nous de nos collègues qui font partie de cette délégation. Le Sénat coopère avec l'Assemblée parlementaire, notamment en accueillant dans ses locaux des réunions de ses commissions. En outre, notre collègue Jean-Claude Frécon a été élu, en octobre, président du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe.
Tout cela me paraît propice à la prise en compte des travaux de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe par le parlement français. Les sujets que vous avez vous-même identifiés dans votre discours d'investiture témoignent d'ailleurs que nos préoccupations convergent très largement. Je pense en particulier à la question des flux migratoires dans un contexte de crise économique et de montée de l'extrémisme, et à la coopération avec le voisinage au sud et à l'est.
La crise en Ukraine mobilise toute notre attention. Nous serons donc intéressés d'entendre vos analyses. Je rappelle que votre assemblée a décidé, en avril dernier, de retirer ses droits de vote à la délégation russe.
Nous sommes aussi très attachés à la complémentarité entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne. Un accord d'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'Homme a été finalisé en avril 2013. Il doit encore être ratifié par chaque État membre et approuvé par le Parlement européen. Nous avions exprimé, sur le rapport de notre ancien collègue Robert Badinter, notre attachement au maintien du monopole d'interprétation du droit de l'Union au profit de la Cour de justice. Celle-ci doit rendre son avis sur cette adhésion le 18 décembre. Nous entendrons vos analyses avec intérêt.
La Cour européenne des droits de l'Homme, qui siège à Strasbourg, rend des arrêts qui ont souvent un grand retentissement. Elle a réussi en quelques années à surmonter l'engorgement qui entravait son action. Certains de ses arrêts ont pu toutefois faire l'objet de critiques, notamment de la part du Royaume-Uni. Vous nous direz comment vous voyez son rôle et sa place.
Je remercie sincèrement le Sénat pour son accueil. Je suis à Paris pendant trois jours et j'essaie de mieux y faire connaître l'Assemblée que je préside. En effet, le siège du Conseil de l'Europe à Strasbourg donne parfois l'impression d'être un peu à l'écart de la politique française et c'est pourquoi j'ai souhaité rencontrer des responsables de votre pays tels que la ministre de la justice, le Défenseur des droits, et, bien sûr, des parlementaires. La délégation française à l'APCE est très active et je salue en particulier l'implication de Josette Durrieu qui a établi de nombreux rapports sur des sujets très importants.
L'APCE compte 318 parlementaires issus des 47 États membres du Conseil de l'Europe. À ce titre, c'est une plateforme parlementaire extraordinaire pour échanger sur les sujets les plus divers. Le Conseil de l'Europe est devenu plus important que jamais dans un contexte marqué par la résurgence du populisme, du racisme et de l'antisémitisme. Je rappelle d'ailleurs qu'en janvier 2015 sera lancée une Alliance parlementaire contre la haine qui traduit l'importance de se rassembler au-delà des clivages politiques. En effet, même les pays dont le système politique est assis sur le consensus n'échappent pas à la montée des discours de haine, comme l'ont montré les événements récents en Suède où un parti d'extrême-droite a doublé son nombre de voix. Je rappelle également que le Conseil de l'Europe a lancé une initiative « Non à la haine » qui s'adresse aux jeunes via Internet.
L'APCE concentre une partie de ses travaux sur la question des flux migratoires. Sur ce sujet sensible, il convient de trouver une solution ensemble car le problème se pose à l'échelle européenne. Il est important de ne pas laisser certains États membres, l'Italie ou la Grèce en particulier, seuls face à ce défi. En matière d'asile, il est nécessaire de concilier un raccourcissement des délais de procédure et le respect des libertés fondamentales. À ce titre, le Conseil de l'Europe est à la disposition des États membres pour analyser leur législation au regard de ses normes et pour les conseiller.
L'Ukraine est la principale crise à laquelle l'Europe est actuellement confrontée. Force est de constater que l'Ukraine n'a pas réussi à se doter d'institutions stables : sa Constitution reste perfectible et n'assure pas suffisamment la séparation des pouvoirs ; sa loi électorale doit être revue de manière à empêcher les achats de siège ; la corruption atteint des proportions extrêmement inquiétantes. Pour résoudre ces problèmes, une forte volonté politique est indispensable. Or, le parlement ukrainien a été très longtemps divisé et j'espère que la nouvelle majorité issue des récentes élections législatives permettra d'aller de l'avant. Pour ma part, je considère que le Conseil de l'Europe ne s'est pas montré suffisamment exigeant envers l'Ukraine pour la contraindre à effectuer les réformes nécessaires. La faiblesse et l'inefficacité des institutions de ce pays se traduisent par un État vulnérable. Les violences qui ont eu lieu à Maïdan et Odessa au début de l'année ont conduit le Secrétaire général du Conseil de l'Europe à se montrer très attentif au caractère impartial des investigations menées par les autorités ukrainiennes sur ces événements. L'enquête sur les violences à Maïdan est désormais close et ses conclusions devraient être présentées au début de l'année prochaine, avant de poursuivre les investigations sur ce qui s'est passé à Odessa.
Comme vous l'avez dit, l'Assemblée parlementaire a décidé de suspendre, en avril dernier, le droit de vote de la délégation russe, jusqu'à la fin de l'année 2014, en réaction à l'annexion de la Crimée à la Fédération de Russie. Le parlement russe a alors choisi de mettre un terme à sa participation aux travaux de notre assemblée, alors que la suspension du droit de vote ne signifie pas, aux termes du Règlement, l'annulation pure et simple des droits à siéger. J'ai entrepris plusieurs démarches pour renouer le contact avec le président de la Douma. Je ne vous cacherai pas que c'est très difficile. Je l'ai rencontré le 2 septembre dernier à Paris, puis le 13 novembre à Moscou. L'atmosphère au cours de cette dernière réunion était moins mauvaise. La première partie de session de 2015, en janvier prochain, donnera très probablement l'occasion à certains membres de l'APCE de contester les pouvoirs de la délégation russe et je ne peux vous affirmer qu'ils ne seront pas suivis par la majorité de l'Assemblée. Il est vrai que, pour revoir sa position, l'Assemblée a besoin de propositions constructives de la part de la délégation russe, ce qui n'a pas été le cas jusqu'à présent. Pour autant, je reste convaincue qu'il est préférable de dialoguer car la violence ne peut pas être une solution. J'ai également eu un entretien téléphonique avec le ministre ukrainien des affaires étrangères et je me rendrai en Ukraine en janvier prochain. Il est évident que la partie ukrainienne doit, elle aussi, réaliser certains efforts. De manière générale, le respect du cessez-le-feu dans le Donbass est un pré-requis à toute solution politique au conflit.
Un entretien s'est tenu récemment entre les présidents Hollande et Poutine. Ce dernier a affirmé publiquement vouloir respecter l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
C'est vrai, mais je regrette que les discours du président Poutine soient souvent contradictoires : un discours pour l'étranger et un autre pour l'intérieur. À ce titre, je rappelle qu'il a récemment tenu un grand discours dans lequel il exaltait les valeurs patriotiques. Lors de la récente réunion de la commission des questions politiques de notre assemblée, qui s'est d'ailleurs tenue au Sénat, la situation politique en Ukraine était inscrite à l'ordre du jour et je déplore l'absence de parlementaires russes, alors même que leurs collègues ukrainiens étaient présents, ce qui, vous en conviendrez, ne facilite pas le dialogue.
L'APCE s'inscrit pleinement dans le processus de coopération entre le Conseil de l'Europe et l'Union européenne. Vous le savez, il y a souvent une confusion entre les deux institutions, notamment entre le Conseil de l'Europe et le Conseil européen, d'autant plus que les emblèmes du Conseil de l'Europe, tels que le drapeau, ont été repris par l'Union européenne, naturellement avec l'accord du Conseil. Le Conseil de l'Europe recouvre un champ géographique plus large que celui de l'Union européenne puisqu'il comprend 47 États membres, soit l'ensemble des pays du continent, à l'exception de la Biélorussie, qui n'est pas une démocratie, et du Kosovo, en raison de son statut. Le Vatican y a un statut d'observateur. Nous avons tout intérêt à ce que le Conseil de l'Europe et l'Union européenne coopèrent plutôt que d'entretenir une rivalité stérile, même s'il me paraît indispensable d'éviter les doublons, comme la création par l'Union européenne de l'Agence européenne des droits de l'Homme avait pu le laisser craindre. Les relations entre l'APCE et le Parlement européen sont excellentes et j'entretiens les rapports les plus cordiaux avec le président Martin Schulz. J'ai également rencontré les hauts dirigeants de l'Union européenne, Jean-Claude Juncker, que je connais naturellement très bien depuis de longues années, Federica Mogherini, Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et Johannes Hahn, le commissaire européen en charge de la politique européenne de voisinage et des négociations d'élargissement. Je rappelle d'ailleurs que Jean-Claude Juncker avait établi en 2006 un rapport sur les relations entre les deux organisations internationales, qui est devenu une référence, et il devrait venir s'adresser à l'APCE en janvier prochain. Pour autant, le Conseil de l'Europe ne doit pas être réduit à une « salle d'attente » de l'Union européenne. L'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'Homme est prévue par le traité de Lisbonne et je la considère donc comme un acquis. Je rappelle que la Cour de justice de l'Union européenne doit rendre un avis sur cette question le 18 décembre prochain. Je regrette le discours actuel, selon moi à caractère électoral, du gouvernement britannique sur la portée des arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme. Dans plusieurs États membres, le parlement assure un suivi des décisions de la Cour de Strasbourg, par exemple au sein d'une commission spécifique, et sans doute conviendrait-il de généraliser cette pratique qui constitue une recommandation de notre assemblée. De même, le Conseil de l'Europe et l'Union européenne ont mis en place d'importants programmes de coopération. Je tiens toutefois à exprimer ma vive inquiétude sur les perspectives financières du Conseil de l'Europe dans un contexte marqué par la volonté de nombreux États membres, dont la France, d'appliquer à leur contribution une croissance nominale zéro.
Enfin, je voudrais exprimer mon inquiétude sur le respect des droits de l'Homme dans certains États membres. Je pense en particulier à l'Azerbaïdjan qui vient d'achever sa présidence de six mois du Comité des ministres du Conseil de l'Europe. Dans ce pays, beaucoup de défenseurs des droits de l'Homme sont aujourd'hui emprisonnés sans motif valable. Les autorités azerbaïdjanaises viennent ainsi de rayer du barreau l'avocat d'un prévenu qui a pour seul tort de déplaire au gouvernement. Elles ont également ordonné l'arrestation d'une célèbre journaliste d'investigation qui avait témoigné quelques mois auparavant devant l'APCE. Je pourrais également donner l'exemple d'un dirigeant d'une organisation non gouvernementale qui vient d'être arrêté. Ce harcèlement judiciaire est inacceptable et je suis intervenue auprès des autorités de l'Azerbaïdjan pour évoquer ces différents cas. Mais je pourrais aussi citer les atteintes à la liberté d'expression en Hongrie ou en Turquie. Vous le voyez, le Conseil de l'Europe a encore beaucoup de travail dans le contexte actuel.
Je remercie Anne Brasseur pour sa présence au Sénat et je salue sa force de conviction et ses capacités de rassemblement. Je forme le voeu que sa visite officielle à Paris permettra d'améliorer la connaissance du Conseil de l'Europe en France. Je regrette en effet l'insuffisante visibilité de cette organisation internationale et de son assemblée parlementaire dans notre pays alors que leur rôle n'est pas mineur. Le Conseil de l'Europe joue ainsi un rôle important pour ce qui concerne les conflits gelés, pour débattre et échanger entre parlementaires de toute l'Europe ou encore pour nouer des partenariats avec la Méditerranée et le Maghreb. À ce titre, je souligne l'importance du statut de partenaire pour la démocratie, attribué aux parlements d'États non membres tels que le Maroc, et peut-être, à l'avenir, à la Jordanie. Le Conseil de l'Europe a élargi son champ d'investigation géographique et c'est une bonne chose. Ainsi, l'APCE débat, avec le Maroc, de la situation au Sahara occidental, ou encore avec l'Algérie. Mais je pourrais également mentionner l'importance des arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme et de l'activité de la commission de Venise qui apporte une expertise juridique à de nombreux États.
Si la situation financière du Conseil de l'Europe est délicate, je note cependant que la France, avec plus de 37 millions d'euros par an, reste son premier contributeur. Vous aviez souligné, dans votre discours d'investiture, la nécessité de traiter la question des flux migratoires et de ses conséquences humanitaires. Je pense en particulier à la situation en Méditerranée ou à Calais. La meilleure solution pour tarir ces flux consisterait sans doute à donner aux jeunes migrants qui cherchent à fuir leur pays de meilleures perspectives d'avenir. De ce point de vue, les préoccupations du Conseil de l'Europe peuvent rejoindre celles de l'Union pour la Méditerranée.
Si le Conseil de l'Europe est méconnu en France, je rappelle que les institutions de l'Union européenne ne sont guère mieux connues par nombre de nos concitoyens. Lorsque j'étais députée européenne, je trouvais que le Parlement européen n'avait pas suffisamment d'influence. Qu'en est-il de l'APCE ? Quelle appréciation portez-vous sur la situation à Famagouste, à Chypre ?
Je suis aussi membre de la délégation française au sein de laquelle j'ai succédé à Jean-Louis Lorrain, avant d'y être réélu. Je me considère néanmoins toujours comme un « apprenti » car siéger à l'APCE est un véritable mandat qui nécessite d'en connaître les us et coutumes. Je suis membre du groupe d'amitié France-Caucase du Sénat et je m'interroge sur les nombreux discours, souvent très négatifs, portés sur l'Azerbaïdjan. Lors d'une rencontre avec les juges de la Cour européenne des droits de l'Homme, il nous a été expliqué que l'Azerbaïdjan était loin d'être le pays le plus concerné par les violations des droits de l'Homme alors que d'autres, la Russie par exemple, sont très souvent condamnés à ce titre. En outre, l'Azerbaïdjan est un pays en guerre, avec le conflit au Haut-Karabagh, et je rappelle que l'ONU a enjoint l'Arménie d'évacuer ce territoire azerbaïdjanais. Enfin, l'Azerbaïdjan est situé dans une région confrontée à de nombreux problèmes géopolitiques, avec des pays voisins potentiellement agressifs. C'est pourquoi je considère que le discours sur ce pays devrait être plus modéré, même si, naturellement, il ne doit rien cacher de la réalité sur le terrain.
Il est important, selon moi, de faire connaître les compétences et le rayonnement du Conseil de l'Europe. Je me félicite de ce que l'assemblée que vous présidez a su garder sa capacité à dialoguer avec les Russes. Le Conseil de l'Europe a aussi des activités qui touchent à des questions quotidiennes telles que les problèmes d'éthique, les échanges entre jeunes ou encore la formidable action de la commission de Venise qui a joué un rôle particulièrement important pour aider des États en transition démocratique - je pense aux premières élections libres en Tunisie. Je me mets parfois à rêver d'une session commune ou, à tout le moins, de temps de travail communs, entre l'APCE et le Parlement européen. Enfin, je considère que la présence à Strasbourg du Conseil de l'Europe constitue une grande fierté pour la ville.
Je suis avec toujours beaucoup d'intérêt les travaux du Conseil de l'Europe. Comme d'autres, néanmoins, je regrette une insuffisante connaissance de cette organisation dont on a cependant parlé à l'occasion de la récente visite du Pape François. Je souhaiterais que le Conseil de l'Europe mette à la disposition des parlementaires un bilan annuel de ses travaux. Je pense qu'il existe des synergies possibles entre ceux-ci et certaines commissions du Sénat. Je rappelle que certaines ONG, comme Amnesty international, établissent un rapport annuel qu'elles présentent éventuellement aux parlementaires, et sans doute conviendrait-il que le Conseil de l'Europe fasse la même chose.
La France est certes le premier contributeur au budget du Conseil de l'Europe, mais elle bénéficie également des retombées économiques liées à la présence du siège de l'institution à Strasbourg, avec plus de 2 000 fonctionnaires et de nombreux experts. Il me paraît important que la commission des lois du Sénat vérifie la conformité des projets de loi nationaux aux normes du Conseil de l'Europe et à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme. Le Conseil de l'Europe souffre en effet d'une médiatisation insuffisante, mais il est difficile de « vendre » des valeurs, en particulier si les gens ne sont pas directement concernés. Néanmoins, il a un atout formidable qui consiste à pouvoir réfléchir à moyen et long terme, alors que la politique nationale est souvent réduite au court terme, voire à l'immédiateté. Le Conseil de l'Europe a les outils nécessaires pour travailler en relation avec les pays de la Méditerranée. Plusieurs parlementaires palestiniens participent d'ailleurs très régulièrement aux travaux de notre assemblée, même si je regrette qu'une de ces parlementaires soit systématiquement privée de visa par les autorités israéliennes. C'est inacceptable. Mon prédécesseur Jean-Claude Mignon était déjà intervenu auprès de la Knesset et j'entends également le faire après les prochaines élections en Israël. L'influence du Conseil de l'Europe s'est considérablement renforcée depuis la chute du mur de Berlin, mais il est indéniable que sa perception est différente sur le continent, selon que l'on se trouve à l'est ou à l'ouest, où la liberté est un acquis de longue date. Notre assemblée adresse à l'ensemble des parlements nationaux un relevé des textes adoptés au cours de chacune de ses parties de session. Pour ce qui concerne Chypre, j'ai évoqué dans mon discours, lors de la visite du Pape, la persistance de « murs dans les esprits », souvent plus difficiles à surmonter que les murs érigés sur le terrain. Malheureusement, la situation à Famagouste en est une parfaite illustration et entrevoir une solution à ce conflit gelé est pour l'instant difficile. Sur l'Azerbaïdjan, il convient naturellement d'être très prudent dans l'utilisation des informations dont on dispose sur ce pays, mais je constate que de nombreux ressortissants azerbaïdjanais qui ont travaillé avec le Conseil de l'Europe ont été arrêtés, en général sous de fallacieuses incriminations telles que trafic de drogue ou trahison. En outre, il arrive que l'Azerbaïdjan ignore délibérément les arrêts rendus par la Cour européenne des droits de l'Homme, y compris ceux rendus par sa grande chambre.
Le site Internet de la Cour européenne des droits de l'Homme comporte des fiches très précises relatives à chaque État partie à la Convention. L'Azerbaïdjan ne figure pas parmi les pays les plus condamnés. En juillet dernier, 1 500 affaires relatives à l'Azerbaïdjan avaient été déposées à la Cour.
Je me sens un peu strasbourgeoise car je m'y rends très souvent, et je m'y sens très à l'aise. Je voudrais illustrer l'importance de nos travaux par le cas de la Tunisie. J'ai été rapporteure pour ce pays à partir de janvier 2011. Après la chute du régime de Ben Ali, les Tunisiens avaient discuté d'un projet de Constitution peu conforme au respect de certaines libertés fondamentales et qui mentionnait, par exemple, que la femme était le complément de l'Homme. Or, je me réjouis de constater qu'après de longues discussions, parfois difficiles, nous avons réussi à faire évoluer le texte grâce à des relations étroites nouées entre des parlementaires tunisiens et des experts de la commission de Venise. Aujourd'hui, la Constitution tunisienne est l'une des plus avancées du monde arabe et permet de construire un véritable État de droit.
Je terminerai en remerciant vivement le Sénat pour ces échanges et je suis très sensible à ce que votre assemblée mette régulièrement à disposition des salles pour organiser des réunions de nos commissions. Je rappellerai que je suis venue au Sénat pour la première fois en 1976, dans le cadre d'une réunion des libéraux européens.
La réunion est levée à 15 h 45.