Ma communication portera sur l'un des volets de l'Union bancaire. Nous avions déjà traité l'aspect surveillance qui concernait la mise en place du Mécanisme de Surveillance Unique par la Banque centrale européenne. Les tests de résistance et la revue de la qualité des actifs bancaires y ont été publiés ; la Banque centrale européenne est désormais effectivement le superviseur unique des banques de la zone euro.
Nous avions adopté, en mars dernier, une résolution européenne qui portait sur ce mécanisme de résolution. Cette résolution, présentée par la commission des affaires européennes et approuvée sans modification par la commission des finances, s'intégrait dans la continuité des travaux menés par le Sénat sur les différentes étapes de l'union bancaire. Elle visait notamment les modalités de la mise en place de règles uniformes pour les 28 États membres en ce qui concerne la résolution et le financement des crises bancaires sous la forme d'une directive dite BRRD qui précise l'ordre d'appel des fonds allant des actionnaires privés jusqu'aux fonds nationaux eux-mêmes auxquels se substituera progressivement un fond européen. Rappelons que cette démarche s'avère motivée notamment par le souci de prévenir que les contribuables ne soient mobilisés en lieu et place des banques.
Elle visait aussi le règlement dit MRU instituant un mécanisme de résolution unique et un Fonds de résolution unique destinés à traiter les défaillances bancaires au sein de la zone euro.
Ce règlement très technique doit permettre, en trente heures, de faire face à une défaillance bancaire au sein de la zone euro.
Si l'adoption du règlement MRU, de la directive BRRD et la poursuite de la mise en place du mécanisme de surveillance unique sont autant d'éléments que le Sénat a soutenu dans sa résolution, il reste encore aujourd'hui des points majeurs en négociation.
En effet, la mise en place du Mécanisme de Résolution Unique, est étalée dans le temps et complexe.
Étalée dans le temps tout d'abord car, malgré l'adoption du règlement MRU, il faudra attendre la mise en place du Fonds de résolution unique pour que les dispositions relatives à la résolution s'appliquent. Or, la mise en place du Fonds de résolution suppose la ratification de l'accord intergouvernemental (AIG) qui n'entrera en vigueur que lorsqu'il aura été ratifié par les États membres représentant 90 % des votes pondérés au sein de l'Union bancaire.
Complexe car le mécanisme de résolution des crises bancaires a été scindé en deux instruments juridiques : un règlement créant un mécanisme de résolution et un accord intergouvernemental (AIG), portant sur l'utilisation des fonds.
La question du financement du fonds, qui sera doté à terme de 55 milliards d'euros, et de sa répartition nationale entre les banques de l'Union bancaire est rapidement apparue comme centrale au bon fonctionnement du mécanisme. La résolution adoptée par le Sénat avait d'ailleurs souligné l'importance des règles de contribution des banques au fonds de résolution unique et la nécessité de ne pas créer de distorsion entre les systèmes nationaux. C'est dans le même esprit que le Sénat a, lors de l'examen du projet de loi DDADUE visant notamment à adapter notre droit au règlement MRU, conditionné la participation de la France au MRU à l'issue des négociations sur les contributions nationales au fonds de résolution.
Ce paquet de mesures contient ainsi un acte délégué, qui correspond à l'appel des fonds, et un acte d'exécution, qui détermine le mécanisme de montée fort complexe au demeurant.
On le voit, ce mécanisme de résolution de crise est relativement complexe à mettre en oeuvre. En effet, à quels critères doit-on recourir pour déterminer la répartition entre les États ? Le total des actifs, c'est-à-dire le poids, qui est défavorable à la France puisque les établissements bancaires y sont de grande envergure, ou les actifs pondérés par les risques, puisqu'une banque, fût-elle de taille moyenne, peut s'avérer aussi dangereuse qu'une plus grande banque. Le choix de ces critères a occasionné un débat entre la France et l'Allemagne dont les petits établissements bancaires n'ont pas été pris en compte pour la détermination de la quote-part au fonds. Une telle démarche a ainsi occasionné une différence de participation entre la France, qui devait honorer une participation de l'ordre de 18 à 21 milliards d'euros, et l'Allemagne qui acceptait de participer à hauteur de 15 milliards d'euros. Cette situation a conduit la France à protester et le Sénat à voter une résolution, lors de l'examen par la commission des finances, de la loi DDADUE, précisant qu'il ne ratifierait pas ce traité tant que la clef de répartition ne serait pas satisfaisante. Notre démarche a semble-t-il fonctionné, dans la mesure où, comme le ministre l'a indiqué à la commission des finances, un accord a été trouvé avec son collègue M. Wolfgang Schäuble, sur une répartition plus équitable entre la France et l'Allemagne, mettant finalement à la charge du système bancaire français environ 15 milliards d'euros. Cet accord de principe n'a cependant pas fait, pour le moment, l'objet d'une confirmation formelle.
Les négociations se poursuivent à Bruxelles et elles restent délicates même si la présidence italienne de l'Union espère voir cette démarche aboutir avant la fin de l'année. Il me semble toutefois qu'un accord politique est possible, puisque une majorité qualifiée du Conseil est nécessaire pour s'opposer à cet acte délégué.
La position du Sénat sur ces points a été largement prise en compte par le Gouvernement. Nous avions également souligné la nécessité de mettre en place un « filet » de financement permettant de recapitaliser des banques en utilisant le mécanisme européen de stabilité (MES), puisque, pour le moment, le MES ne peut être utilisé pour recapitaliser les banques. Nous avions d'ailleurs proposé que ce fonds de résolution dispose de sa propre capacité d'emprunt. La réalisation de ces deux propositions n'a pas, pour l'heure, connu d'avancée.